Chapitre 9. Révolte.

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CHAPITRE 9.

RÉVOLTE.

Haziel était devenu un ange torturé, tourmenté. Il vola longtemps, partout, en tous sens, en refusant de revenir. Tôt ou tard, ils viendraient le chercher par la force. De toute façon, il se posait trop de questions. Il lui faudrait des réponses.

En attendant, il survola, la rage au cœur, la mer du Nord, qui avait la couleur de ses pensées. Les fjords et leurs eaux miroirs ne l'apaisèrent pas. Il se tint longtemps sur un tertre, en Irlande, au cœur de la lande et des rochers noirs.

Comme il ne pouvait demeurer longtemps éloigné de son humain, il revint pour les funérailles. Il fut presque surpris par l'attitude du garçon, même s'il n'avait jamais douté de ses grandes capacités. Il ne pleurait pas. Ses pensées étaient claires, centrées sur celui qu'il avait aimé, sur l'amour qu'il avait appris et qu'il donnerait ailleurs, à d'autres.

Mais lui, Haziel, il était en colère, plein de désirs et d'envies non assouvis. Il devint invisible, mais fit en sorte que son humain entende le bruissement de ses ailes. Le garçon se tourna, promena ses yeux verts du côté de l'endroit où se tenait Haziel. Il tendit la main, et Haziel se rapprocha. Il posa ses doigts sur la paume de son humain, en y mettant toute sa chaleur, son amour. Le beau visage du garçon s'éclaira d'un sourire magnifique.

Je t'aime, Armel, murmura-t-il. Je sais que tu seras toujours là. Je voudrais te serrer dans mes bras.

Haziel jeta un coup d'œil vers les autres humains. Seule Lezalel, qui recevait leurs hommages, hocha la tête en guise d'assentiment en le regardant droit dans les yeux. Personne n'observait son humain à lui. C'était le moment.

Alors, l'ange fit en sorte de demeurer invisible, tout en permettant qu'on le touche, qu'on palpe sa présence. Il fit encore un pas, pour se trouver tout contre son humain, qui attendait, et l'enlaça. Le garçon frémit entre ses bras, collé à son torse, et gémit. Haziel cueillit les lèvres de celui pour qui il était prêt à tout. Il se sentait au bord d'une rupture capitale. Son humain promena son regard vert droit sur lui, sans le voir, pourtant, mais Haziel savait qu'il l'imaginait sans peine.

C'est à cet instant qu'ils fondirent sur lui. Il n'eut aucune chance, contre les dix anges, qui l'emportèrent, et le déposèrent devant Vehuiah. Les dix Vertus disparurent, et Haziel resta devant le premier ange. Celui-ci était entouré par Elémiah, Zadkiel le chef des Dominations, et Camael, le chef des Puissances. Mihael et Rehael étaient eux aussi présents, ces anges liés à l'amour, qu'Elémiah avait promis de faire intervenir. Mais cela n'apaisa pas Haziel, qui serra les poings, et agita furieusement ses ailes.

Pourquoi avez-vous permis que j'apprenne l'amour humain, et m'avoir ôté si vite l'objet de cet amour ? cria-t-il à l'adresse du premier ange.

Tu devais lui apprendre à aimer.

Je l'ai fait. Et vous avez fait en sorte que j'apprenne la même chose, accusa Haziel.

Tu étais libre de succomber ou pas, Haziel, rétorqua Vehuiah. Tu as choisi d'abandonner ta sérénité.

Non, martela Haziel. J'étais destiné à succomber. C'était plus fort que tout. Parce que c'était lui et pas un autre. Vous le saviez, toi et...

Les voies du Seigneur sont impénétrables, jeta Vehuiah.

Je sais que je n'aurai jamais SA réponse, dit Haziel. Mais les anges se sont montrés cruels avec moi. Les anges sont cruels, et d'autres anges pleurent. Je pleure. Je suis tombé amoureux.

Nous le savons. Et si tu acceptes d'abandonner toute révolte, de ne pas devenir un Déchu, de rester parmi nous, qui tenons à toi, tu ne seras pas puni.

Peu m'importe, si je n'ai pas ce qui compte le plus à mes yeux.

Nous le savons aussi. Nous sommes conscients que tu ne retrouveras ton empathie et ta capacité à aider les hommes, qu'avec ton épanouissement personnel. Nous t'offrons donc deux choses, Haziel. Mais pour cela, tu dois renouveler ton allégeance.

Haziel fixa son supérieur droit dans les yeux. Sans le lâcher du regard, il s'agenouilla, fier.

Je prête allégeance, déclara-t-il.

Très bien, Haziel. Voici donc nos offrandes. Nous te donnerons une seule et unique rencontre avec ton humain. Ensuite, lorsqu'il quittera à son tour son monde, qu'il mourra après avoir aidé bien des gens, tu le retrouveras.

À jamais ?

À jamais, et tel qu'il est actuellement.

Merci, dit Haziel, submergé par l'émotion.

À toi de faire une promesse.

Tout ce que tu veux.

Garde cette révolte, que nous avons réussi à faire naître chez un ange doux et résigné. Tu étais courageux, Haziel, mais désormais, nous savons que ta force te permettra toujours d'aller jusqu'au bout. Et nous avons de grands desseins pour toi.

Haziel entrevit alors un pan des projets divins. N'avait-on pas tenté le tout pour le tout, afin de créer un ange tel que lui, et qui ne soit pas un Déchu ? Un révolté qui gardait ses fonctions ? Il n'était pas seulement guidé par son sens de l'abnégation et du rôle qu'il avait à jouer, mais par une énergie bien plus subtile, née de ce sentiment, si complexe, si élevé : l'amour, tel que les hommes le concevaient.

Mihael et Rehael, les deux autres anges liés à l'amour, s'approchèrent de lui et l'entourèrent. Ils formeraient un trio auquel rien ne résisterait. Mihael inspirerait l'amour, Rehael déploierait toutes les facettes de ce sentiment, du respect de l'autre au sacrifice pour l'autre. Quant à Haziel, il insufflerait l'amour inconditionnel, immortel.




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