9- Barnabé

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Le carrousel se met en marche. J'évite le regard d'Aidan, sa dernière remarque m'a trop chamboulée. Je ne veux pas pleurer, je veux être forte. J'en ai marre de ces émotions qui reviennent sans cesse, de ces chagrins qui hantent mon esprit. Une larme quitte mon oeil et descend le long de mon visage. Mais merde! Ne pourrai-je donc jamais m'amuser sans avoir à penser à un autre aspect triste de ma vie? Je me contente d'essuyer rapidement ma joue et de me changer les idées. Je suis avec Aidan. Aidan, mon ami, mon prince, mon... âme soeur? Ou représenterait-il plus pour moi que je ne le pense? Ledit concerné passe sa main dans mes cheveux et tente de dévoiler mon visage. 

- April? 

Je prends une grande inspiration et essaie tant bien que mal de chasser toute pensée négative de ma tête, mais en vain. 

- April.. Est-ce que tu.. pleures? 

Je chuchote un faible petit «non» peu convaincant. Mes lèvres tremblent, ma vision s'embrouille.

Ma mère. Mon père.

Partis. 

À jamais

Je n'en peux plus, je craque. Aidan descend de son cheval et contourne le mien, qui continue de faire des hauts et des bas. Il grimpe derrière moi et enroule ses bras autour de ma taille. Il garde le silence pendant plusieurs secondes, et je tente de formuler des excuses à son égard:

- Pardonne-moi, Aidan, je ne sais pas ce qui m'arrive, ces temps-ci, d'habitude je... 

- Tu n'as pas à t'excuser, ma belle. Je sais qu'ils te manquent. 

Je sens mon coeur fondre. Je ne pourrais dire si cela est dû au fait qu'il me comprenne ou bien qu'il m'ait appelée «ma belle». Je me retourne vers lui. Sans un mot de plus, je lui souris de toutes mes dents. Il passe sa main dans ses cheveux, gêné. 

- Merci, Aidan. 

À partir de ce moment bien précis, je décide de passer à autre chose. Oui, ma mère est décédée bien des années auparavant, et mon père l'a suivie quelques temps après, mais je ne peux rien y faire. C'est hors de mon contrôle. Je veux vivre ma vie, désormais, faire mes propres choix, malgré les contraintes qui peuvent m'être imposées. Je veux tourner la page. Profite du moment présent, April, semble me souffler ma conscience. Vole de tes propres ailes.

Sans réfléchir, je me retourne vers l'avant, et, tandis que le carrousel s'anime toujours, j'agrippe  la barre de métal traversant le corps du cheval et monte debout sur celui-ci. Je ferme les yeux et profite de l'air qui fouette mon visage tandis que le cheval bouge de haut en bas. 

- April, mais qu'est-ce que tu fais? Tu pourrais te faire mal. 

J'ignore sa remarque et, à peine quelques secondes plus tard, mon ami m'a déjà rejoint et posé ses mains sur ma taille.  Il rit et j'ouvre grand les bras, reproduisant la fameuse scène de Titanic. Aidan rit de bon coeur, et le responsable de l'attraction nous crie à plusieurs reprises de nous asseoir. Lorsque le manège se termine finalement, Aidan m'aide à redescendre. Nous nous éloignons du carrousel en riant comme deux jeunes gamins, sous les yeux réprobateurs du gardien. 

Une fois bien éloignés du manège, nous nous arrêtons subitement de courir et nous regardons droit dans les yeux, ayant tout deux le sourire fendu jusqu'aux oreilles. Nous sommes face à face. Il prend mes deux mains dans les siennes, et penche la tête sur le côté. Ses yeux se plissent légèrement tandis qu'il me scrute et je sens mes joues rosir. 

- Vous  êtes vraiment une fille remplie de surprise, mademoiselle Curtis. 

Mon sourire s'élargit encore plus. 

Reine du BalWhere stories live. Discover now