15.3 Mon ami Pierrot...

228 36 8
                                    

Gabriel, comprenant que mon frère veut un tête-à-tête, s'efface et se dirige vers la sortie.

-Je t'attends à la voiture.

Il montre le sac et rajoute : 

-Je vais le ranger dans le coffre, dit-il comme pour se justifier. À demain Joem !

Il fait un signe de la main que mon frère lui rend d'un hochement de tête et il disparaît.

Je me rends compte que je suis restée spectatrice depuis quelques minutes et j'observe la scène qui vient de se passer devant mes yeux comme si rien ne pouvait m'atteindre.

Joem se renfrogne et prend un air blessé :

-Pourquoi tu ne m'as pas dit que tu voyais quelqu'un, plutôt que de me laisser le découvrir comme ça ? Je croyais que l'on se disait tout, tous les deux ? J'aurais dû être au courant en premier !

Son air contrarié me remplit de tristesse. Je comprends son ressenti mais à l'inverse il m'aurait aussi pourri la vie ou compliqué la situation et à choisir...

-Et ? je lui demande pour tenter de l'amener à trouver la réponse.

-Et quoi ? réplique-t-il un peu perdu.

-Et si tu l'avais su avant, tu aurais réagi comment ? je lui demande en toute sincérité.

Il souffle plusieurs fois d'affilé et se rend à l'évidence :

-Je sais ! J'aurais été impossible avec lui. Mais merde, Charlie ! Tu aurais pu au moins me dire que tu voyais quelqu'un ! J'ai l'impression d'être le dernier des imbéciles, dit-il, toujours froissé et dans le regard un air blasé qui me fait mal au cœur.

-Merci de le reconnaître, Joem. En fait, ce n'était pas volontaire. Je ne voulais pas te le cacher. Je ne sais même pas quoi en penser de cette relation, ni même comment la qualifier. Je sais simplement qu'il prend de l'importance à mes yeux et je ne veux pas gâcher ce semblant de bonheur que j'éprouve avec lui, je réponds en toute honnêteté.

Il m'observe avec des yeux tristes qui viennent poignarder mon cœur. Je le prends instinctivement dans mes bras et il répond à mon geste invasif, possessif.

-Je ne veux que ton bonheur, sœurette. Je ne veux pas qu'il te rende malheureuse, c'est tout. Excuse-moi de faire mon égoïste encore une fois, mais j'ai tellement peur de te perdre.

Cette sincérité qu'il me lâche, comme ça, sans prévenir, me percute avec puissance. Je me mets à son niveau et d'une main douce, je viens caresser sa joue. Un trop plein de sentiment m'envahit et je lui exprime avec de simples mots :

-Tu ne pourras jamais me perdre Joem et tu le sais très bien. Tu as déjà tout gagné de moi. Quoiqu'il arrive, tu resteras ma priorité. Tout ce que j'ai fait, ce que j'ai dû endurer, je l'ai toujours fait pour toi et rien que toi. Et il ne peut en être autrement.

-Alors je vais gâcher ta vie, et ça, je ne le veux pas ! me dit-il encore buté.

-Non, car la personne qui vivra à mes côtés acceptera cette situation. Je ne reviendrais pas là-dessus. Jamais ! dis-je aussi entêtée que lui. Demande-moi si je t'aime ?

Je vois ce sourire qui commence à s'étirer sur ses lèvres.

-Est-ce que tu m'aimes ? débute-t-il.

-C'est évident, je poursuis.

-Comment est-ce que tu m'aimes ? ajoute-t-il.

Je souris de notre complicité.

-Par-delà les mers...

-Même au centre de la terre.

Il me murmure plus qu'il ne dit la suite de mes phrases.

ÂMES...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant