ÉTAPE 7

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"Vivre sans espoir, c'est cesser de vivre." - Fiodor Dostoïevsky





Sous le point de vue de Selena

Je cache mes yeux des rayons du soleil tout en les plissant, essayant de voir si Harry approchait.

Aujourd'hui, j'ai décidé de passer notre séance dans un parc. Après maintenant quatre semaines que nous nous connaissons, il m'avait demandé de changer nos habitudes. Je crois sincèrement que c'est un bon signe. Le changement est signe de guérison.

Je le vois finalement apparaître, tenant avec précaution les deux cornets de glace qu'il est allé acheter au marchand d'en face. Il a insisté longuement pour m'en offrir alors j'ai du céder, presque attendri par son insistance. Nos entrevues doivent rester professionnelles, biens sur. Je me suis rassuré en me disant qu'il commençait simplement à se sociabiliser et que je n'avais rien à me reprocher.

– Vanille, c'est ça ? Il sourit légèrement, ses yeux verts scrutant ma réaction alors qu'il me tend mon cornet.

– Le meilleur parfum au monde, je réplique avec un grand sourire, et me décale sur le banc en bois pour qu'il puisse s'installer à mes cotés.

Il hésite un moment puis se décide à s'assoir à plus d'un mètre de moi. Je me retiens presque de soupirer puis goûte silencieusement ma crème glacée. Même si nos séances étaient régulières maintenant, il garde toujours ces espèces de manie à fuir chaque personne qu'il croise. Je dissipe le malaise en pointant son cornet du regard en riant.

– Qu'est-ce que c'est que ça ?

Il repose son attention sur la crème violette entre ses mains puis s'exclame fièrement.

– Parfum Lavande !

Mon rire s'intensifie et il lève un sourcil vers moi, un petit sourire aux lèvres.

– Excuse moi si Madame n'acceptes pas l'originalité.

Je prend un faux air offusqué et arrive à lui arracher un léger ricanement.

Je sais que ce qui se passe avec Harry n'est pas dans le contrat, mais une certaine amitié s'était installé entre nous. Sa méfiance cachée par son arrogance était quelque peu attachante. Pas que j'étais attachée à lui... Simplement que je voulais vraiment l'aider, et apparemment aller au delà de certaines limites faisait parti de cela.

Je sors de mes pensées lorsque j'entends Harry fouillait dans la poche de sa veste pour en sortir un paquet de cigarette. Il sent surement mon regard noir sur lui, et me jette un regard furtif avant de rouler des yeux d'un air blasé.

– Ouais, je sais ce que tu vas dire. Mais s'il te plaît, épargne moi ta leçon de morale.

Il coince une cigarette entre ses lèvres, avant de tâter une nouvelle fois ses poches et sortir un briquet. Ce qui est clair, c'est qu'il n'aime pas qu'on lui dise ce qu'il doit faire, et ça, je l'avais compris dès la première séance. Mais ce qui attire plus mon attention sont ses gestes machinaux lorsqu'il allume sa cigarette et en tire une latte.

Un silence s'installe automatiquement. À plusieurs reprises, il passe une main nerveuse dans ses boucles brunes, recrachant une grande bouffée de fumée grisâtre.

– Depuis quand fûmes-tu ?

Avec Harry, j'ai appris que le contre dire ne sert à rien, et la seule chose qui me reste est de lui poser des questions. Il hausse à peine les épaules et grommelle.

– Depuis que j'ai arrêté de chanter, j'imagine.

Une mine choquée prend possession de mon visage, et je demande, les yeux écarquillés.

– Tu... Chantes ?

– Avant ouais. Avec les gars on se regroupaient de temps en temps pour chanter. C'était... plutôt cool.

Il semble s'enfoncer dans ses souvenirs, un sourie triste étirant ses lèvres alors qu'il reprend une bouffée de sa cigarette.

– Pourquoi avez vous arrêtez ? Je sais que je vais trop loin, et qu'il redoute cette question depuis le départ.

Le mégot restant de sa cigarette tombe à terre alors qu'il l'écrase avec sa chaussure sans me regarder. Pourtant la tristesse n'avait pas quitté ses traits.

– J'en sais rien.

Sa voix est sorti dans un murmure empli d'émotions. Je hoche lentement la tête, la gorge serrée, observant les quelques cendres éparpillés sur le sol et fronce légèrement les sourcils dans la réflexion. Je ne sais pas si c'est à moi de le faire, mais je sens que je dois le faire. Même si je dépasse la limite entre le psychologue et le patient, je devais le faire. La seule et unique chose qui l'empêche d'avancer est la peur. Alors si il faut que j'entre dans sa vie privée pour l'aider, je le ferais.

Harry se racle la gorge, les lèvres légèrement pincées ensemble, et me regarde fébrilement dans les yeux. Sa soudaine gêne m'interpelle, car ce n'est pas celle de d'habitude, comme s'il n'osait pas me demander un service. Il se gratte l'arrière de la tête puis parle d'une voix basse.

– Tu crois que les choses redeviendront un jour comme avant ?

Mon coeur se fend en deux lorsque je remarque la détresse avec laquelle il m'a parlé. Nous nous regardions quelques instants dans les yeux, et étrangement, il ne détourne pas le regard, attendant patiemment que je réponde. J'inspire lentement et secoue la tête.

– Tout est entre tes mains, Harry. Il suffit que tu acceptes l'aide des autres.

Il baisse ses yeux, au travers lesquels passent les rayons du soleil, et se mord la lèvre.

– Je ne pense pas qu'ils veuillent encore de moi.

Un doux sourire apparait sur mon visage et j'ose prendre sa main dans la mienne, lui faisant relever son regard surpris vers moi.

– Pourquoi ne pas aller leur demander ?

Il me regarde sans répondre et très discrètement les coins de ses lèvres se courbent en ce qui me semble être un sourire. Peut être le plus sincère que j'ai pu voir jusque là.



(un peu de retard pour le poste de ce chapitre qui assez différent des autres je trouve. Vous a-t-il plu?)

Philophobie // h.s.Where stories live. Discover now