Chapitre 3

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Elena Anderson.

Essayant de faire le moins de bruit possible, je refermai lentement la porte qui menait à l'arrière de ma maison et par où je m'étais enfuie quelques heures plus tôt. J'enlevai doucement mes chaussures pleines de terre et de feuilles mortes et les posai sur le paillasson. Puis, je m'avançai à pas de loup – c'était le cas de le dire – dans la maison. Je me dirigeai vers l'escalier et le montai, priant à chaque marche pour qu'elle ne craque pas. Arrivée en haut, je me précipitai dans ma chambre, refermai la porte et soufflai un grand coup. Je me retournai et retins un cri que je réussi à coincer au fond de ma gorge. Mon père et ma belle-mère étaient tous les deux assis sur mon lit défait par Emily le matin-même. Tout ça pour rien. Sachant qu'aucune explication ne serait valable, je me contentai d'attraper ma chaise de bureau et de m'asseoir en face d'eux, attendant la sentence.

Ils restèrent silencieux un bon bout de temps. Je les soupçonnai de vouloir me torturer l'esprit à chercher quelle pouvait bien être cette fichue punition. Et j'avais beau me creuser la cervelle, je n'en avais pas la moindre idée. Alors, j'attendis patiemment, pensant qu'au bout d'un moment, ils craqueraient et cesseraient de me laisser dans l'ignorance. Et effectivement, c'est après un très long soupir que mon père prit la parole.

« Elena, nous ne te cachons pas que nous sommes affreusement déçus de ton bulletin. Mais nous le sommes surtout par ton attitude. Nous croyions que nous n'avions pas à être derrière toi pour que tu travailles à l'école. Nous pensions que tu étais responsable. Mais nous nous sommes trompés, apparemment. Alors, nous avons pris une décision. Dès lundi, tu iras en pension. »

Quand mon père lâcha cette dernière phrase, je cru que j'allais tomber de ma chaise. En pension ?! Était-ce une blague ? Jamais je n'irai là-bas, ce n'était tout bonnement pas possible. Même si ma vie n'était pas bien ici, j'avais ma tranquillité et je pouvais faire à peu près ce que je voulais sans que mes parents ne m'obligent à quoi que ce soit. Même si la vérité était qu'ils ne s'intéressaient pas vraiment à moi. Et apparemment, ils avaient enfin trouvé la solution pour se débarrasser de moi et vivre leur parfaite petite vie avec Emily. Alors que si j'allais en pension, des personnes seraient derrière mon dos à me dicter ma conduite et à m'obliger à faire des choses que je ne souhaiterais pas forcément. Ce serait comme une prison.

« Je n'irai pas, me contentai-je de répondre, tenant tête pour la première fois à mon père. »

Ce dernier fut choqué. Il sursauta, ne s'attendant pas à ce que ma voix soit si sèche et cassante. Ses traits d'habitude si paisibles se contractèrent et j'eu l'impression qu'il venait de prendre dix ans de plus en une seconde. Jamais je ne lui avais répondu lorsqu'il me disputait. Je m'étais toujours écrasée devant lui, mais je sentais qu'aujourd'hui, ce temps était révolu. Je devais m'affirmer, je n'étais plus une enfant qui avait besoin d'être guidée pour comprendre le sens de la vie.

« Comment ça, tu n'iras pas ? demanda-t-il en élevant le ton et en fronçant les sourcils, visiblement mécontent.

-Je n'irai pas, répétai-je. J'ai dix-huit ans, je suis majeure alors je prends les décisions que je veux.

-Nous sommes tes parents ! Tu nous dois le respect et la reconnaissance. Depuis que tu es née, je prends soin de toi et te loge avec moi et ma famille. Je te nourris, t'habille, t'éduque et tu n'en as rien à faire ! Mais de quoi as-tu besoin ? s'exclama-t-il, ne comprenant visiblement pas quel était le rôle d'un parent.

-J'avais besoin d'amour ! D'un père qui m'aimait et qui me le montrait. De quelqu'un qui ne m'en voudrait pas pour quelque chose que je n'ai pas fait et qui me soutiendrait chaque jour suite à l'absence de ma mère. Parce que même si toi tu n'es pas mort, c'est tout comme. J'ai l'impression de ne pas avoir de père, en plus de ne pas avoir eu de mère.

Echos - EN PAUSE/RÉÉCRITUREWhere stories live. Discover now