Beautiful Liar (Victuuri)

5 - Secrets are coming

Bizarrement Yuri avait oublié le froid. Seules les paroles de son coach comptaient à présent.

Il avait tellement hâte de tout savoir sur Victor et en même temps, il s'en voulait de lui infliger ça... Mais c'était trop tard pour faire marche arrière surtout quand l'homme prit la parole, la gorge visiblement serrée par l'émotion.

-- Je suis né en Russie comme tu le sais, dans une grande maison, avec beaucoup de moyens et un tas de personnes. Petit je me disais que c'était comme une grande famille, que ces gens étaient des amis de mes parents et qu'ils me considéraient comme leur fils. C'était vrai. En partie du moins. Car il y avait un homme, Vladimir, dont j'avais peur. Chaque fois qu'il me voyait il me donnait une claque pour le plaisir et me frottait la tête avec une telle force qu'il m'en arrachait les cheveux. Au début je me plaignais à mes parents mais je passais toujours pour un menteur qui voulait juste attirer l'attention. Personne ne l'avait vu faire, c'était donc sa parole contre la mienne.
Mes parents étaient d'ailleurs rarement là pour moi. Je vagabondais dans la maison et les pièces où j'avais le droit d'accéder car elles ne m'étaient pas toutes permises. J'allais souvent à la patinoire aussi. Une dame qui faisait la cuisine pour nous avait demandé à sa fille de m'y amenait et j'avais adoré ça. C'est devenu une de mes activités préférée. Je me sentais tellement bien sur la glace même si au début je tombais souvent comme tu peux l'imaginer.

Un sourire naquit sur ses lèvres, très vite remplacé par la tristesse. Yuri en eut mal au cœur.

-- Le jour de mes sept ans, je cherchais ma mère et en passant devant une pièce j'ai entendu des cris. C'était une des salles où je n'avais pas le droit d'aller mais j'étais trop curieux pour faire demi-tour. (Victor serra les poings et fixa Yuri, les larmes aux yeux.) Il a tué ma mère. Vladimir. Je...je l'ai vu de mes propres yeux la tirer par les cheveux et lui enfoncer un poignard dans le ventre. Il y avait du sang partout et j'étais tellement sous le choc que je ne l'ai pas vu s'approcher de la porte et l'ouvrir pour me tirer à l'intérieur. À ce moment-là je savais qu'il était trop tard et que j'allais mourir. Il m'a...il m'a jeté dans le sang de ma mère et m'a battu à mort en me disant que si je parlais, il nous tuerait mon père et moi. J'ai...

Le russe se tue un instant, essuyant ses larmes.

Yuri, en pleurs lui aussi, passa un bras autour de ses épaules et le prit contre lui pour le réconforter. L'histoire n'était visiblement pas encore terminée mais c'était déjà tellement horrible...

Victor ne se défie pas et prit une grande respiration.

-- J'étais juste à côté d'elle, dans son sang et lui...il me frappait avec rage. Je n'avais que sept ans et j'ai entrevu la mort. Mais il a fait une erreur Yuri. Une seule erreur. (Victor se redressa et observa le japonais un instant avant de reporter son regard vers la mer au loin.) Il m'a laissé en vie.

Le silence s'installa quelques secondes avant qu'il ne reprenne sur un ton plus calme.

-- Il s'est arrangé pour que l'on croit que quelqu'un s'était infiltré chez nous et qu'il nous avait trouvés comme ça. Ça a marché. On avait tellement d'ennemis... Tu sais pourquoi Yuri ? Pourquoi j'ai grandi dans cette maison ? Pourquoi ma mère est morte ? (Il n'attendit pas de réponse.) Parce que tous ces gens que je considérais comme ma famille étaient de la mafia. Mes parents également. Ce qui faisait de moi...

Yuri écarquilla les yeux, sous le choc. Victor était donc issu d'une famille de mafieux. Sa mère avait été froidement tué et lui avait été battu par ce monstre sans que personne ne le soupçonne ? C'était déjà trop pour lui alors qu'il n'avait pas vécu cette situation, alors comment faisait Victor pour être lui ? Cet homme merveilleux et talentueux ? Comment s'en était-il sortit ?

-- Mon père est devenu encore plus absent après ça, poursuivit celui-ci. Il a sombré dans l'alcool, la haine et la vengeance, tuant beaucoup de nos ennemis pour se défouler sans jamais trouver le coupable. Il était sous ses yeux pourtant...
J'ai vite compris, après la mort de ma mère, que mes parents étaient des assassins. Tout est devenu clair à mesure que j'ouvrais les yeux sur ce qui m'entourait et sur le pourquoi du comment. Je vivais au milieu de meurtriers depuis ma naissance.
De mon côté, je n'ai plus parlé pendant un an. Je continuais à aller patiner pour m'éloigner de cet environnement qui devenait pesant pour moi. Et c'est à cette période que j'ai trouvé Makkachin sur le chemin. Je l'ai recueillis et très vite il est devenu mon meilleur ami. Ce n'était qu'un chien et pourtant j'avais l'impression qu'il me comprenait. (Il sourit avant de poursuivre.) Il m'arrivait encore de croiser Vladimir. Mais il ne m'a plus touché depuis son meurtre. Il se contentait de me lancer des regards noirs pour me faire peur. Mais je n'avais plus peur. J'avais la rage. Dommage qu'il ne l'ai pas compris plus tôt.
Un soir, j'ai entendu du bruit en bas. Il y avait des cris, des objets qui se cassaient, des gens qui couraient et j'ai compris qu'on était attaqué quand je suis sorti de ma chambre pour voir des corps au sol et des personnes armés que je ne connaissais pas au rez-de-chaussée.
Je me suis vite réfugié dans ma chambre et enfermé dans le placard. Je gardais un couteau dans une boîte alors je l'ai saisi et j'ai attendu jusqu'à ce que le silence s'installe. Un silence de mort après des échanges de tirs, des pleurs et des cris. Puis ma porte s'est ouverte et j'ai prié pour que ce soit mon père ou bien quelqu'un que je connaissais qui me dirait que tout allait bien et que je pouvais sortir. Mais rien de tout ça n'est arrivé.

Il garda le silence, ses yeux perdus dans le vague. Il revivait cette scène, c'était sûr. Il devait d'ailleurs se la remémorer très souvent...

-- Quelqu'un t'as découvert ? lui demanda Yuri.

Victor hocha la tête.

-- Oui, Vladimir. Il a ouvert, a braqué son arme sur moi en me disant qu'il venait de tuer mon père et que je devais voir ça. Il m'a traîné de force jusqu'au salon où j'ai vu son corps troué de balles.
Il m'a ensuite expliqué que c'était son œuvre et qu'il venait récupérer cet endroit avec des amis à lui. Plus personne n'était vivant. Il ne restait que moi. J'étais le seul survivant de ce clan de mafieux.
Alors il m'a poussé dehors pour m'abattre dans le jardin mais il a oublié de me retirer le couteau. Je l'avais caché dans ma manche quand il m'avait traîné de force, me disant qu'il y aurait forcément un moment propice où je pourrais m'en servir. Et c'est ce que j'ai faits. Il a commis l'erreur de tourner la tête vers la maison en entendant du bruit alors je lui ai sauté dessus et l'ai poignardé à la gorge. J'ai senti une haine immense m'envahir alors j'ai lâché le couteau et je l'ai frappé de mes poings, encore et encore comme il l'avait fait pour moi un an auparavant. Je crois que je me suis évanoui après ça car je ne me suis réveillé que le lendemain, alors que la police fouillait les lieux.
J'ai couru et me suis enfui avec Makkachin avant qu'ils ne me voient. Qui sait ce qu'il me serait arrivé entre leurs mains. Je venais de tuer un homme, peu importe les raisons, j'étais de la mafia comme mes parents, ils ne m'auraient laissé aucune chance. Je suis alors resté deux jours dans la rue, me cachant comme un fugitif, jusqu'à ce qu'un homme me trouve dormant dans un entrepôt. Il était spécialisé dans ce domaine. Sauver les jeunes à la rue, leur offrir une seconde chance et les aider à repartir du bon pied. Son nom était Slade. Il m'a offert l'asile dans son centre pour jeunes, une nouvelle identité pour qu'on ne puisse pas m'associer à mes parents et m'a demandé ce que j'aimais faire. Lorsqu'il m'a vu patiner la première fois, il m'a tout de suite conseillé à Yakov. Quelques jours plus tard, je patinais devant lui et il m'annonçait qu'il me prenait sous son aile et que j'allais devenir un champion. Ma vie est devenue ce qu'elle est aujourd'hui et grâce à Slade et Yakov, j'ai réussi à m'en sortir et vivre de ma passion même après tout ça.

Yuri était sous le choc de ces révélations. Tout s'était bien finis mais il n'y avait pas de mots pour décrire ce que Victor avait vécu. Et dire que tout le monde l'imaginait avec une vie parfaite, une famille parfaite et des amis parfaits. Au contraire, ils étaient loin de la vérité. Très loin. Lui-même n'aurait pu imaginer ce passé pour une star telle que lui.

Un détail avait néanmoins retenu son attention.

-- Tu as parlé de lui au passé, est-ce qu'il...?

Victor baissa la tête, une larme roula sur sa joue et tomba dans le sable.

-- Slade a été assassiné il y a une semaine et ceux qui l'ont tué me cherchent.