6 : LA RUMEUR

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6 : LA RUMEUR

Comme tous les lundis matins, je traîne des pieds. Le week-end n'a même pas été mouvementé. Je n'ai quasiment rien fait : accompagner et raccompagner Judith à la soirée d'Hugo sans y poser les pieds, préparer mes fiches d'SVT et commander des sushis avec André qui est enfin rentré de son voyage d'affaires. Mon beau-père nous a rapporté des caramels, c'était ma foi pas mauvais du tout.

Il ne faut que sortir de mon immeuble pour voir en face les adolescents aux sacs tous plus communs que les autres. Du Vanessa Bruno, du Kanken, Michael Kors, des Eastpak et un peu de Herschel. Un vrai délire.

- Enterrez-moi, m'écrié-je en faisant la bise à Judith, déjà en train d'attendre devant la porte du lycée.

Celle-ci affiche une mine grave. Comme tous les lundis matins. Mais là encore plus grave que d'habitude.

- Écoute... Ewel, ne panique pas... Mais il y a une rumeur sur toi.

Mes sourcils pourraient être un mono sourcil, ça ne changerait pas le fait que je les fronce progressivement à cette annonce.

- Accouche.

Nous nous éloignons un peu de la rue du lycée, surveillant les alentours.

- Ceux qui étaient à la soirée d'Hugo croient qu'Ewel t'a pécho.

Blanc. Gros blanc.

- Hein ?

La surprise fait maintenant place à la confusion puis à l'irritation.

- Mais j'y étais même pas à cette soirée ! Et pourquoi on m'aurait pécho ? Je rappelle que je suis puceau de la bouche hein !

Judith tente de calmer ma pique de nerfs.

- Parce que... je sais pas... c'est juste la rumeur et tout le monde y croit vu que t'es resté deux minutes pour checker si Magalie était là pour me surveiller... et qu'Ewel Cohen s'est levé du canapé quand t'es arrivé.

Nouveau blanc. Je ne lui ai même pas dit bonjour ce soir-là.

- Allons au lycée, j'irai discuter avec Ewel, achevé-je remonté contre ces rumeurs de merde.

Sur le trottoir de l'établissement scolaire, des adolescents se sourient tout en me regardant. Une atmosphère spéciale plane. Rien de très moqueur, même plutôt courtois. Mais tout ça reste trop déstabilisant pour un mec qui ne s'embarrasse jamais comme moi.

Nous rentrons dans le lycée, attentifs aux moindres gestes des autres lycéens. Alors c'est ça la sensation de savoir que les gens puissent parler sur toi ? Bah, c'est vraiment pas fameux d'après moi.

**

Dans la classe, tout le monde chahute en cours d'AP. Le professeur de maths veut élire les délégués. Comme toujours, Ewel Cohen se présente.

J'ai tenté de discuter avec lui en arrivant en classe, mais celui-ci parlait avec Magalie avec tellement de ferveur que ça me dérangeait presque de devoir les interrompre.

Ou c'est juste moi qui fuis cette rumeur pourrie.

Au moins, ça a le mérite d'estomper celle sur les parents de Magalie. Et ça, ça reste une très bonne nouvelle.

- Je propose l'autre Ewel ! lance Anatole avec un ton moqueur.

Tout le monde se tourne vers moi, comme si, subitement, durant le court laps de temps séparant ce lundi du samedi, chaque élève avait pris en compte mon existence. Et tout ça, parce qu'on croit que j'ai fourré ma langue chez celle du mec le plus cool du lycée.

DEUX EWEL POUR LE PRIX D'UNUnde poveștirile trăiesc. Descoperă acum