Quarantaine - Jour 1 : Ou comment semble débuter la fin.

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Je me réveille sans même savoir si le jour est levé. Je retire le bras de Cynthya de mon torse nu et le pose près de sa tête encore engloutie dans le sommaire oreiller de ma couchette. Les souvenirs de la veille ressurgissent d'un bloc et jouent au flipper entre mes neurones.

Comment est-ce que j'en suis arrivé là... ?

Les yeux mi-clos et encore brouillés par un léger voile opaque, je jette un coup d'œil sur le corps couché de la jeune rousse sous la couverture grise. Le tissu épouse à la perfection les courbes avantageuses de sa fine silhouette et met en valeur ses lignes déjà très bien dessinées. Je bloque un instant sur ses fesses et résiste à l'envie de les lui claquer.

Enfin non, je n'en ai juste plus vraiment envie. En fait, je ne sais plus trop.

Après une journée comme celle d'hier, le « no man's land » de ma vie vient de passer au niveau supérieur. Mon esprit est dans le même état que Bagdad au lendemain de la bataille de 2003. C'est comme si tous les dieux du monde s'étaient concertés pour faire de mon existence un casse-tête chinois à base d'évènements abracadabrants, de décisions foireuses et de rencontres invraisemblables, le tout réunis en un joyeux cocktail explosif.

Et comme si cela ne suffisait pas, me voilà maintenant dans de beaux draps avec la rousse, et c'est le cas de le dire.

Je me redresse et dépose la couverture sur elle. Je sors finalement du coaltar en me tapotant les joues de mes mains.

Ma chambre – si on peut considérer un parallélépipède rectangle de trois mètres de long, deux de haut et deux de large comme une chambre – est plongée dans une obscurité partielle, notamment à cause de l'absence de fenêtre. Les murs gris en béton nu n'aident pas vraiment à rendre l'atmosphère plus chaleureuse.

Je me lève cette fois pour de bon en faisant attention à ne pas réveiller la jolie jeune femme à mes côtés. Je la regarde une dernière fois avec un petit sourire triste.

Le Léopold d'il y a une semaine aurait honte de moi. Je récupère mes vêtements et les enfile en silence.

Je marche vers la porte en métal gondolée et enclenche la poignée à la peinture partiellement écaillée. Je prends garde de ne pas l'ouvrir en grand pour ne pas qu'un rayon de lumière n'avertisse Cynthya de mon départ. Je me glisse dans l'embrasure et sors de la pièce. Le jour est à peine levé, la luminosité est encore faiblarde et l'aurore peine à percer l'épaisse couverture nuageuse à l'horizon.

Les faces calcairisées du chapiteau vitré sous lequel je me trouve finissent de filtrer le phare solaire pour réduire sa puissance à celle d'un simple projecteur. J'exagère, évidemment, mais on n'est pas loin de la réalité.

Je reste un instant à regarder le sol cimenté sous mes pieds. Je ne pensais pas revoir un jour une matière de ce type. Je me retourne et marche à reculons pour observer dans son ensemble le bâtiment gris monochrome duquel je viens de sortir. Bâti sur quatre étages, un peu à la manière d'une ruche d'abeilles à laquelle on aurait substitué les rayons par des portes en acier, quelques escaliers en caillebotis s'élèvent toutes les cinq entrées et délivrent un système d'échafaudage de fer assez précaire permettant l'accès aux portes des étages supérieurs.

Au-dessus de la mienne est lisible, peint au pochoir, le numéro 21. L'inscription semble âgée et partiellement effacée. De mémoire, le bloc de Cynthya est le 22, celui d'Arthur, le 20, 23 pour Sébastien et 24 pour monsieur Ferguson.

Harmony ne s'est pas vue attribuer de local dans le bâtiment. Les gardes l'ont ramassée inconsciente dans le sas avant de l'emmener derrière l'espèce d'immeuble en béton où le reste d'entre nous a été installé. Il est construit en suivant un diamètre perpendiculaire à l'axe de l'entrée et sépare le chapiteau en deux hémicycles : le premier, celui où nous sommes, et celui dont l'accès est rendu impossible par la présence d'une grille coulissante sévèrement cadenassée et surveillée. Si la blonde a ainsi disparue, il n'y a donc qu'une seule option : elle a été emmenée de l'autre côté du lazaret.

Biohazard - Disparus [ Tome 1 Terminé ]Where stories live. Discover now