-XVII- She laughed but her mouth was rotten

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La ville était déjà envahie par une vague de froid de canard. J'étais obligée de mettre le chauffage dans la boutique et de redoubler d'efforts pour m'occuper des plantes afin qu'elles ne subissent pas les effets de la météo changeant à chaque jour de ce foutu mois d'Octobre. Il pouvait faire un grand soleil pendant toute une journée avec presque vingt degrés et, le lendemain, une putain de tempête de sa mère pouvait m'empêcher de sortir les plantes sur le trottoir et d'ouvrir les fenêtres. Quelle plaie.

Plus d'une semaine était passée depuis ma visite chez Brenna. Je ne l'avais d'ailleurs pas revue dans ma boutique, elle devait certainement profiter de sa nouvelle jeunesse sur le trottoir,des trucs de vieux quoi. Je m'en foutais vraiment car une autre personne m'inquiétait beaucoup plus. J'avais envoyé des messages à Molly, tenté de la contacter par internet... Rien. Même pas un seul accusé de réception, elle avait l'air de faire comme si j'avais été effacée de sa vie. Je n'aimais vraiment pas ça. Les flics ne s'étaient toujours pas pointés chez moi, je ne l'avais pas non plus vue passer dans la rue menant vers la fac. P'tet que sa maladie avait empiré ? J'espérais vraiment qu'elle n'avait pas fait de connerie. Enfin, si ça avait été le cas, ça serait partout sur Facebook. De toute façon, j'avais qu'une seule façon de savoir si elle allait bien.

Nous étions mardi. J'avais fermé la boutique vers 18 heures. Il n'y avait pas grand monde, il faisait méga froid dehors, mais c'est tout. Pas de neige, pas de pluie, des nuages partout dans le ciel, mais rien d'autre. Je n'aimais pas ces journées où il faisait froid pour rien, il fallait s'habiller chaudement de la tête aux pieds mais pas pour s'amuser, juste pour pas choper la crève. La veste en cuir sur mes épaules, avec un bon t-shirt et un jean en-dessous, je descendais la rue pour me diriger vers sa maison,les mains dans les poches, admirant les lampadaires qui s'allumaient de plus en plus tôt au fur et à mesure que la nuit se faisait plus précoce.

Il y avait encore pas mal de monde dans les rues.J'étais ni spécialement à l'aise ni flippée, je savais que j'allais pas loin et qu'avec le monde, on ne pourrait rien me faire.A moins que l'on ne m'agresse et que personne ne réagisse. Ça m'étonnerait pas trop que les passants foutent rien à part me filmer en train de me faire culbuter le cul. De toute façon, ce coup-ci, j'étais sortie avec une bombe au poivre dans la poche. Je pouvais m'en sortir cette fois. De toute façon, j'avais l'impression qu'on voulait pas que je crève.

Impossible de voir le ciel lorsque je levai mon nez, le temps était bien trop dégueulasse pour ça. Je n'avais pas d'autre distraction pendant le trajet que de regarder du coin de l'œil les gens qui marchaient, ou ceux qui ne bougeaient pas, sans trop me faire repérer. Il y en avait avec des looks pas très communs, un peu comme moi, qui ne me remarquaient pas vraiment. D'autres étaient emmitouflés dans les mêmes manteaux, si bien que j'avais l'impression d'être passée dix fois à côté de la même personne, ils me fixaient jusqu'à ce que je les regarde avec mes sourcils les plus froncés possible, jusqu'à l'intérieur de mes naseaux. Visiblement, même aujourd'hui, ça jugeait toujours sur les vêtements. A moins qu'ils ne me trouvaient bonne, mais j'étais pas vraiment d'humeur à flirter ces temps-ci. L'amour, ça attendra. J'avais un bout de mon cœur que cette fille avait gardé.

J'arrivais devant sa porte en peu de temps. Je frissonnais, comme si mon corps avait essayé de se débarrasser du froid que j'avais accumulé pendant le trajet. Je reniflai même un peu, quelle météo de merde, putain je voulais pas choper la crève.Il y avait quelqu'un chez elle, les lumières étaient allumées,fallait sonner ou frapper dans ces cas-là ? On ne m'entendrait peut-être pas. J'appuyais sur le bouton, quelques secondes, puis je patientais, immobile, sur un magnifique paillasson « Welcome » qui n'avais même pas été chipé depuis qu'ils avaient emménagé dans cette ville. Quelle prouesse.

Son père vint m'ouvrir la porte. Il avait l'air un peu gêné en me voyant, essayant de m'éviter du regard tout en me parlant.


How to Fly in a White Sky (vers.1)Where stories live. Discover now