Chapitre 20

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Si l'extérieur du manoir Eliar paraissait gigantesque, l'intérieur, lui, n'était pas en reste. Avec tous ces couloirs et toutes ses portes, Scyllia avait l'impression de se trouver dans une des ailes de l'académie. Même à cette heure tardive, des serviteurs s'attelaient encore à toutes sortes de tâches et rendaient l'endroit bien plus vivant que s'il n'y avait que sa famille qui y résidait. Ces quelques personnes qu'elle croisait la dévisageaient étrangement. Sans doute savaient-ils qui elle était pour le grand inquisiteur. Cependant, personne ne tentait quoi que se soit en apercevant qu'elle était au côté du doyen de la famille.

— Dites, osa demander l'adolescente après quelques minutes de marche dans les couloirs. Est-ce que la famille Eliar compte beaucoup de membres ?

— Avec toi, nous sommes neuf, répondit-il.

— Seulement ? S'étonna-t-elle. Je pensais qu'avec une demeure comme celle-ci, il y aurait plus de monde.

— C'était le cas lorsque j'étais encore jeune, mais des tensions se sont créées entre la branche principale et les secondaires lorsque ton arrière grand-père était le chef de famille. Tous les autres ont décidé de partir et faire leur vie ailleurs et, même si j'ai réussi à redevenir en bon terme avec la plupart d'entre eux lorsque j'ai repris les rennes, ils ont presque tous changés de nom et ne veulent plus rien avoir à faire avec nous.

— C'est triste. Cet endroit doit paraître bien vide.

— C'est vrai, et c'est peut-être l'une des causes qui a poussé ton père à partir. Aujourd'hui, seul moi, Archibald, sa femme Rebecca, et Maximilien leur fils vivent ici.

Scyllia recompta sur ses doigts les noms énoncés et se retourna vers son grand-père, perplexe. Même en se comptant dans les membres de la famille, il n'en ressortait que cinq noms alors qu'il avait parlé de neuf personnes.

— Ma fille aînée ne porte peut-être plus le nom d'Eliar, mais elle le restera toujours à mes yeux, expliqua-t-il à sa question silencieuse. Et il en est de même pour ses trois enfants. Ils ne vivent pas à Eronne, mais c'est toujours un plaisir de les voir à l'occasion.

— Et ma grand-mère ?

— Elle est décédée il y a cinq ans maintenant. J'aimerai te dire qu'elle aurait été ravie de te connaître, mais les messages que m'envoyait ton père n'était pas codés pour rien. Elle lui en a toujours voulu pour son départ et, même sur son lit de mort, elle ne lui a pas pardonné.

— Il y a à peine quelques mois, je ne savais pas qu'il me restait de la famille. Le directeur de mon académie, même s'il était un ami de mon père, n'est resté que très évasif sur les raisons de sa fuite. Vous pourriez peut-être m'éclairer à ce sujet.

— Beaucoup de choses ne lui plaisaient pas. Par exemple, la manière d'enseigner à l'académie.

Tien, tien. Les chiens ne font pas des chats.

— Sur ce point-là je ne peux qu'être d'accord avec lui.

— Ce système est dépassé depuis longtemps, admit son grand-père.

— Mais si vous étiez grand inquisiteur à l'époque, vous deviez aussi être le directeur. Pourquoi ne pas l'avoir changé ?

— Le poste de directeur et le titre de grand inquisiteur ne sont communs que depuis peu de temps. À l'époque, je n'avais rien à voir avec l'académie et Archibald n'y est à la tête que depuis deux ans et essai de changer les choses.

— Essayé de changer ? J'ai du mal à vous croire. Il n'a pas arrêté de me répéter de rester à ma place alors que j'essayais de leur faire entendre raison sur le fait que leur manière d'enseigner était totalement stupide.

Scyllia tome 3: EliarOù les histoires vivent. Découvrez maintenant