Maria Cortesi

54 2 0
                                    

Deux semaines plus tard, toujours aucune nouvelle de Reina.
Giulia passe ses journées à se ronger les sangs, apparemment Angelo a décidé de ne rien dire à sa femme non plus. Les oncles et tantes qui habitent ici, les plus proches, sont là pour la soutenir et ils commencent à s'inquiéter aussi. Rosa est toute triste. Enzo est toujours à la maison et il aide Angelo dans le travail, quant à moi je ne sers plus à grand chose. Je n'ai plus de petite déesse de l'audace à surveiller et c'est là que je me rends compte qu'elle a vraiment conditionné les derniers mois de mon existence. Son absence me rend monotone, elle n'est pas là pour me hurler dessus ou me narguer. Mais il faut que j'arrête de rêver, si elle est partie il y'a de grandes chances pour que ce soit de ma faute. Si j'avais fermer ma gueule au lieu de lui balancer une partie de ce que je ressens, elle serait peut-être encore ici.

Angelo et Enzo ne veulent rien me dire sur l'endroit où elle serait potentiellement allée. Alors j'ai décidé de résoudre ce problème moi-même. Je fais des recherches sur les propriétés de Cortesi dans le monde, sur la fameuse « Maria » mais je ne trouves rien du tout. Si cette femme fait partie de la famille, elle se cache bien. Il me faudrait trouver quelqu'un qui connaît la famille mieux que personne, mais qui ? Une lumière éclaire mon esprit et je laisse mon ordinateur pour partir à la recherche de Rosa.
Je la trouve à la cave, elle cherche du vin pour servir avec le poisson qu'elle va servir ce soir au dîner. Je toque contre l'épaisse porte en bois pour m'annoncer, elle se retourne en souriant tendrement. Elle a vraiment l'allure de la femme aimante et familiale de nos terres. Ses cheveux noirs se teintent joliment de gris et ses yeux noirs pansent les moindres égratignures de l'âme.

Rosa: Que fais-tu ici mon garçon ?
Moi: Je voulais vous demander quelque chose...
Rosa: Tutoies moi voyons. Quelque chose, à quel propos ?
Moi: Quelque chose sur la famille Cortesi.

Je vois quelque chose changer dans son regard, on dirait qu'elle se met en mode « secret ». Ça risque d'être plus difficile que prévu.

Moi: Je me demandais, qui est cette Maria Cortesi ?
Rosa: Pourquoi tu t'intéresses à ça ?
Moi: Sur la bâche de la voiture qu'a pris Reina, il y'a avait ce nom écrit.
Rosa: Je vois, je ne sais pas qui c'est.
Moi: Attends Rosa, je sais que tu sais qui c'est. J'en ai besoin pour retrouver Reina.

Elle me regarde tendrement en élargissant son sourire puis pose sa main dodue sur mon épaule.

Rosa: Je comprends que tu veuilles savoir où elle est, elle est très importante pour toi... Mais elle reviendra ne t'inquiètes pas.
Moi: S'il te plaît...
Rosa: Ce n'est pas à moi de t'apprendre ça, c'est tout.

Elle sourit encore et quitte la pièce pour repartir vers la cuisine j'imagine. Je reste perplexe, elle sait qui est cette femme mais elle n'a pas le droit de m'en parler. Ni Angelo, ni Enzo accepteront de me dire qui elle est. Retour à la case départ.
À moins que, je ne joue mes cartes et force la situation pour qu'on me dise le fin mot de cette histoire. C'est la seule solution qui me reste pour découvrir qui se cache derrière ce nom. Je sens aussi que cette histoire n'est pas simple et qu'elle dissimule un large secret, peut-être même le plus gros secret de la famille. Je passerai à l'action au dîner.

*******

Nous sommes tous à table et une conversation basique sans beaucoup d'animation occupe nos oreilles. Ce n'est pas habituel et assez gênant. Je ne sais pas quand est-ce que je pourrais caser les petites phrases que j'ai préparées. Quand soudain...

Giorgio: Angelo, tu comptes inviter la famille à l'anniversaire de Reina, elle va avoir vingt ans.

Je vois Angelo changer de tête suite à la phrase de son frère. Quelque chose me dit qu'il n'est pas au courant de la tenue du secret. Mais les membres Cortesi ne s'autorisent pas de nommer cette « famille ». J'en profite.

Moi: Qui dont ?
Giorgio: Euh..  ce n'est rien d'important.

Angelo le fixe en écarquillant les yeux d'une façon plus que discrète : une manière de dilater sa pupille tout en poussant le bord de ses paupières sans avoir l'air trop choqué ou énervé. Une manie que j'ai observé d'abord sur Reina puis sur Angelo.

Moi: Si voyons, vous parlez de la famille Cortesi ou d'une autre famille qu'on ne connaît pas ?
Angelo: Ce n'est rien d'important Cristiano.

Son ton est calme mais ferme, j'ai compris qu'il fallait que je me taise mais j'ai vu aussi qu'Angelo est touché mais pas assez alors je continue.

Moi: Non je disais par simple curiosité, parce que je ne connais pas de Maria Cortesi. Ça m'intrigue, c'est tout.

C'est Enzo qui regarde Angelo à présent. Les deux hommes s'observent une seconde puis Angelo reprend la parole tout en restant calme et sans s'énerver.

Angelo: Tu n'as pas à te faire du soucis pour ça, ce n'est personne d'important.

Le repas se poursuit avec la même conversation inutile. Quant à moi, j'ai réussi ma mission. J'espère qu'Angelo sera plus propice à me parler de cette personne qui ne compte pas apparement. Je verrais cela après le repas.

*******

Une heure qu'on a tous fini de manger. Tout le monde est dans ses appartements respectifs et personne ne fait beaucoup de vieux os ce soir. Les hommes ne discutent pas dans le salon rouge comme souvent et les femmes sont parties se coucher. L'ambiance est vraiment étrange sans Reina. On dirait que tout le monde sait où elle peut être mais que son absence inquiète tout de même. Elle a un statut spécial ici cet je suis persuadé que ça n'a rien à voir avec son rôle d'héritière.
Je suis dans le salon où je joue habituellement à la console mais ce soir, pas d'écran. Je tiens dans les mains un verre de Martini, les coudes appuyés sur mes genoux. Je me suis assis face à une fenêtre où l'on peut voir le croissant de lune éclairer la mer au loin. Ça me fait repenser aux nuits que j'ai passées dans les bras de Reina parce que je n'arrivais pas à trouver le sommeil, ces nuits où la lune éclairait la chambre à travers les grandes fenêtres sans volets fermés.
Soudain, quelqu'un s'assoit à côté de moi. Angelo s'appuie dans le fond du fauteuil en soufflant de soulagement. Je lui jette un coup d'œil mais ne dis rien. Il me regarde un instant puis suit mon regard et observe l'horizon à travers la vitre.

Angelo: Le soleil reviendra après cette nuit, il ne faut pas s'inquiéter.

Il parle de Reina en disant cela, les métaphores portent souvent des messages mais je ne supportes plus d'entendre qu'elle va revenir et qu'il ne faut pas s'inquiéter. Ça doit se voir sur mon visage...

Angelo: Pourquoi tu cherches absolument à savoir où elle est ?
Moi: Je, elle est mon boulot, je dois la surveiller. C'est donc mon rôle de la trouver et la ramener ici. Mais c'est difficile.
Angelo: C'est pour ça que tu veux savoir qui est Maria ?
Moi: Oui.
Angelo: Mais es-tu certain, au fond de toi, que tu la cherches simplement parce que c'est ton travail ?

Un léger électrochoc dans mon coeur me fait tilter qu'il lit encore en moi ce que je ne vois pas moi même. J'ai peur de ce qu'il va me dire parce que je suis persuadé qu'il va faire allusion à ce que je ne veux pas affronter.

TronoWhere stories live. Discover now