Andreï Arazov (partie 2)

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La mine enjouée de Princeton, celui qui m'avait réconforté et aimé, me redonna du courage pour affronter les épreuves qui m'attendaient.

Il chercha dans son sac et me tendit le précieux ordinateur portable. Je le remerciai d'un signe de tête et m'empressa d'allumer l'appareil, en m'installant bien confortablement sur le canapé du salon.

Quand je tapai dans la barre de recherche : « Andreï Arazov », je ne trouvais rien de concluant. C'est alors que j'eu une idée. Mes parents, et surtout ma mère, m'avaient appris à craquer les sites gouvernementaux. J'avais quelques notions en hacking qui allaient finalement se révéler utiles aujourd'hui.

Je réussis à entrer dans la base de données de la CIA. C'était déjà un exploit, mais il ne fallait pas rester trop longtemps, sinon les forces spéciales interviendraient si vite que nous n'aurions pas le temps de dire « OUPS ». Aussitôt que je tapais le nom qui m'intéressait, des pages de codes apparurent sur mon écran. Un nombre de pare-feu inimaginable protégeaient les données de cet homme. Voilà qui était de plus en plus intrigant... Si seulement j'avais connu un peu plus d'éléments sur sa vie personnelle, j'aurais pu remonter à lui par d'autres biais.

Princeton vint me rejoindre. Il avait dû trouver un terrain d'accord avec Sacha pour qu'elle nous laisse tranquille.

- Besoin d'aide ?

- Si tu sais pirater ce genre de pare-feu destinés à protéger des données ultraconfidentielles de la CIA, alors je suis preneuse...

- Quoi ?

- Oui apparemment cet homme était quelqu'un de suffisamment important pour qu'il reste invisible sur les serveurs...

Princeton observa ma mine déconfite et finalement proposa quelque chose :

- Tu sais Tiffany ?

- Quoi ?

- Et bien... Elle est comment dire... Le hacking est l'une de ses passions et elle a appris très tôt à pirater tous les sites gouvernementaux pour son père. Pour un ingénieur opportuniste, l'espionnage industriel est parfois très utile. Pour ne pas avoir à payer quelqu'un qui aurait pu faire du chantage à sa famille par la suite, quoi de mieux que d'initier son unique jeune fille au QI impressionnant ?

Je réfléchissais longuement à la proposition déguisée de Princeton. Si nous impliquions à nouveau quelqu'un dans cette sombre affaire, il faudrait assumer la responsabilité de voire cette personne se faire assassiner par nos ennemis. Tiffany avait toute la vie devant elle, il serait injuste de lui en priver. Alors que j'allai faire part de mes doutes à Princeton, ce dernier avait déjà son téléphone à la main.

- Tiffany ? C'est Price ! Ça te dirait de pirater la CIA et accessoirement les services de renseignements russes.

Il émit un petit rire face à la réponse, que je supposais enjouée, de la jeune asiatique. Même sans haut-parleur j'arrivais à entendre le cri strident de cette jeune femme au tempérament de feu.

- Attends tu vas partir de chez toi, je ne t'ai même pas donné l'adresse.

Pendant que Princeton donna notre emplacement à Tiffany, je commençais intérieurement à me méfier. Je savais que je pouvais faire confiance à certaines personnes pour que j'arrive à avancer au sein de cet amalgame d'énigmes.

La jeune asiatique ne devait pas habiter loin car en moins d'une demi-heure, elle fut déjà sur le pas de la porte.

- Hey !

Son salut me laisse coite. On avait l'impression qu'on l'invitait à une fête sensationnelle ou à une Garden party. Elle avait sous le bras un énorme ordinateur et de nombreux appareils dont je ne connaissais pas l'utilité.

Princeton la serra dans ses bras et Tiffany me gratifia d'un grand sourire. Elle avait troqué ses grandes lunettes bleues contre une paire rouge aux verres ronds. Sa tenue était tout aussi excentrique : une robe blanche à pois vert, un foulard carmin, des collants couleur ivoire, le tout agrémenté de bottes militaire noires. Ses cheveux raides comme la justice étaient relevés en deux couettes, attachées toutes les deux avec des élastiques, eux-aussi rouges.

Princeton l'invita à aller s'installer au salon. Tiffany s'empressa de brancher un tas de câbles partout où elle arrivait à trouver des prises. Elle prit un air concentré et quand elle eut enfin terminé, elle se retourna vers moi et m'adressa un grand sourire.

- Alors comment est-ce que je peux aider notre chère Elena David ?

J'avançais timidement vers elle et lui montra le petit papier sur lequel j'avais écrit le nom de la personne que je souhaitais retrouver.

- J'aimerais que tu retrouves cet Andreï Arazov. Tout ce que j'ai pu en tirer ce sont des documents classés secrets qui contiennent plusieurs clés de codes et...

- N'en dit pas plus, j'ai saisi. À mon avis, cet homme doit avoir un sacré pédigrée. On va essayer de contourner les pièges que les gouvernements sèment sur leurs sites.

Tiffany se mit à taper plus vite que son ombre sur les trois claviers qu'elle avait apportés. Sa rapidité m'impressionnait et elle semblait totalement immergée dans son univers. C'est comme si elle était en transe.

Pendant ce temps-là, Princeton était allé s'occuper de Sacha. Je restais à côté de mon ancienne élève et observait les nombreuses fenêtres de codes qui s'ouvraient et se refermaient les unes après les autres.

Au bout de quelques minutes. Un dossier au nom d'Andreï Arazov apparut. La légende était sans équivoque : « национальная безопасность » (« sécurité nationale »). On était face à des données sensibles.

- Ok les amis, j'ai réussi à m'immiscer dans les services russes et j'ai téléchargé un logiciel de traduction automatique pour que l'on puisse lire les informations que l'on trouvera. Mais il y a un problème. Il va falloir que l'on soit rapide et surtout prudent. Je vais vous demander d'éteindre tous vos appareils. Il ne faut pas que l'on se fasse repérer par les renseignements. Portables, tablettes, ordinateurs, tous ces appareils pourraient aider à nous localiser.

La voix de Tiffany était remplie d'excitation. Heureusement qu'elle ne connaissait pas tous les tenants et les aboutissants de ce qu'on lui demandait.

Princeton, qui était juste dans la pièce d'à côté, avait entendu les recommandations de notre jeune hacker.

Mon souffle s'accéléra quand elle cliqua sur l'image du dossier. Un laps de temps d'environ une minute se déroula avant qu'une myriade de documents apparaissent devant nos yeux, ainsi qu'une photo de l'intéressé... Mon sang se glaça. Je connaissais cet homme. C'était le russe si gentil qui s'était occupé de moi, pendant une longue soirée de Noël, il y a quinze ans. C'était celui qui m'avait apporté toute l'attention que pouvait espérer une petite fille à cette période l'année. C'était lui qui m'avait offert ce mignon petit ours en peluche que j'avais sur moi tous les jours. C'était ce même homme que j'avais vu s'éteindre devant mes yeux, assassiné par ma propre mère...

Quand Tiffany vit l'effet que me faisait cette image, elle s'empressa de rechercher des informations utiles.

C'était un ancien membre du KGB, reconverti dans les services de renseignements clandestins russes. Il avait disparu il y a quinze ans et laissait derrière lui une femme et trois enfants. Des jumeaux et une fille.

- Attends une minute Tiffany. Que sont devenus les membres de sa famille une fois que cet Andreï ait disparu ?

Je savais que ça n'avait peut-être aucune importance mais mon instinct me disait que si je ne posais pas la question, j'allais le regretter. Je sentis Princeton derrière moi, observant lui-aussi l'écran d'un œil attentif. Il avait laissé Sacha s'amuser seule pour nous rejoindre et enfin, comprendre toute cette histoire en même temps que moi.

Tiffany tapa plusieurs fois sur son clavier et réussit à en sortir quatre photos et trois actes de décès.

May It BeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant