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Je ne sais pas comment vous parler de mon histoire sans parler de celle de Luna. Elles sont si liées que parfois, je ne sais plus les dissocier l'une de l'autre. C'était nous contre le reste du monde.

On était gamins quand on s'est rencontré, à peine plus hauts que le tabouret du salon de mon grand-père. Je l'aimais bien papi, et je n'avais jamais autant pleuré qu'à son enterrement. Même pour celui de mes parents, la douleur qui avait étreint mon coeur m'avait semblé moins intense.
Je me souviens de la maison de papi, je l'aimais bien aussi. Je m'y sentais chez moi. Souvent, après le repas du matin, j'allais m'asseoir sur les marches du perron, et je regardais la rue s'éveiller. Les persiennes des vieilles maisons baillaient de sommeil en grinçant, le soleil tapait fort. Il y avait le facteur, un chouette gars qui avait toujours un bonbon pour moi dans sa poche lorsqu'il passait en vélo déposer le courrier dans la boîte aux lettres rouillée de papi. Un jeune couple récemment installé faisait leur promenade quotidienne main dans la main autour du pâté de maison. Il y avait peu de monde, le quartier était calme, alors papi me laissait me balader si je m'étais bien comporté, et je n'avais jusqu'alors jamais posé de problème.

Et puis un matin, j'ai vu cette petite fille. Elle marchait, pieds nus, l'air hagard. C'est là que je me suis rendu compte qu'elle pleurait, tout en affichant un immense sourire sur ses lèvres. Elle avait une trace sur la joue, mais j'étais alors trop petit pour comprendre de quoi il s'agissait. Elle s'était arrêtée à ma hauteur, on s'était dévisagé de longues secondes, avant qu'elle ne m'adresse ces mots dont je me suis toujours rappelé.

- Toi aussi tu es puni ?

LunaDonde viven las historias. Descúbrelo ahora