5-Mordue de toi

7 1 0
                                    

Jeudi.

Les jours me semblaient interminables quand je ne me rendais pas au Starbucks de Cambridge. Une journée sans voir Dara était devenu un véritable supplice.J'étais déprimée. Même monsieur Jefferson et Raphaëlle n'avaient rien pu changer. J'avais passer mon mercredi à me lamenter dans ma chambre. Je m'étais enfermée dans mes livres et mes lectures à grand remède de Baudelaire, Verlaine, Allan Poe et de Musset, travaillant ainsi mon prochain poème.

Thomas Jefferson, mon professeur, était passé me voir dans la soirée. Nous avions discuté pendant près de trois heures de la poésie, américaine comme française. J'avais cité mes références, lui les siennes.

Raphaëlle m'avait dit qu'il était tombé amoureux de moi, malgré nos sept ans de différence et la barrière professeur-élève. Je trouvais cette expression bizarre, mais compréhensible. Tomber amoureux, c'était comme une évidence soudaine, une chute brutale quand on s'y attendait le moins. Sauf que c'était tomber d'amour pour quelqu'un. Être éperdument amoureux d'une personne qu'on trouve unique, même si c'est le pire des êtres.

Peut-être que Thomas Jefferson était tombé amoureux de moi, mais j'avais déjà fait moi-même une chute magistrale en tombant d'amour pour une jolie brune dont je ne connaissais que le prénom et l'écriture. Dara.

Je me suis levée ce matin avec l'envie irrésistible que les heures accélères jusqu'à l'heure de mon rendez-vous au Starbucks. Pour voir si elle m'avait laissée un mot, que je prenne le temps d'y répondre. Une correspondance amoureuse anonyme digne d'un roman à l'eau de rose.

J'ai trépigné d'impatience jusqu'à l'heure fatidique, puis j'ai entraîné Raphaëlle avec moi jusqu'à Cambridge. Nous sommes passées à côté de Harvard et j'ai fouillé le campus des yeux, espérant sans doute apercevoir la démarche gracieuse de Dara parmi tous les étudiants.

-Rappelle-moi pourquoi je suis là ? A bougonné Raphaëlle dans le métro.

-Parce que tu m'adores, ai-je répondu en l'embrassant sur la joue.

Elle a levé les yeux au ciel et resserré son écharpe autour de son cou. Elle était adorable, emmitouflée avec soin dans sa veste en jean. Elle méritait tout l'amour du monde. Elle a plongé ses yeux marrons dans les miens puis a poussé un soupir pensif.

-J'aime beaucoup tes yeux, a-t-elle soufflé en passant sa main dans mes cheveux.

J'ai souri. Mes yeux. D'après Raphaëlle, c'étaient eux qui me donnaient ma capacité de séduction. J'avais des yeux vert-grisé avec une touche de bleu. Apparemment, ils brillaient quand le soleil se montrait et pétillaient de vie.

-Tu me l'as déjà dit, ai-je simplement répondu.

Elle s'est redressée face à moi et a pris le temps de nouer mes cheveux en un chignon, du même genre que celui que Dara s'était fait, un jour.

-Ça te va bien, m'a-t-elle complimentée.

J'ai hoché la tête pour la remercier. Je n'étais pas du genre bavarde, mais Raphaëlle était mon pur contraire. Nous nous complétions et c'était peut-être pour ça que je m'étais tant attachée à elle. J'avais besoin de mon amie pour vivre sereinement. Une âme-sœur.

Nous sommes sorties du métro puis nous avons marché dans Cambridge jusqu'au Starbucks. En entrant, la chaleur du café m'a fait un bien fou. Il faisait vraiment froid à l'extérieur.

J'ai laissé Raphaëlle s'installer à la table tandis que j'allais récupéré nos boissons et déposer mon poème. Pour compenser le fait que j'avais traîné mon amie dans le Starbucks, j'avais promis de lui offrir un muffin. J'étais une chic fille, quand même.

Un café à CambridgeKde žijí příběhy. Začni objevovat