Les créatures du Nord [Hopemin]

Chapitre 6

Jimin dormait paisiblement dans l'herbe, à l'ombre, près de la mare, en cette fin d'après-midi agréable. Hoseok essuyait ses propres larmes en rangeant son matériel, soulagé.

La fleur de lys était plutôt bien passée, le blessé avait versé quelques larmes silencieuses mais avait su contenir ses gémissements de douleur. En revanche, dès les premiers passages de l'aiguille, il s'était mis à hurler et à sangloter, si bien que ça en avait brisé le cœur de Hoseok. Ce dernier, la gorge serrée par l'empathie, n'avait pas pu retenir ses propres larmes, mais il avait continué. De toute façon, il devait poursuivre l'opération, il ne pouvait pas s'arrêter en plein milieu.

Il avait rarement dû recoudre des patients, mais ça lui était arrivé qu'on vienne le voir lui plutôt qu'un médecin, notamment parce qu'il acceptait les clients à n'importe quelle heure du jour ou de la nuit, il suffisait de faire tinter une petite cloche située à l'entrée de son commerce – son bruit le réveillait à tous les coups.

Par chance, si on pouvait parler ainsi, la douleur l'avait emporté et Jimin avait fini par faire un malaise après quelques points de suture. Hoseok s'était assuré qu'il allait bien puis, une fois certain qu'il était simplement endormi, il avait pu terminer tranquillement son œuvre.

Il ressortit de la serre et observa Jimin d'un œil curieux : le jeune homme dormait paisiblement, dès la fin de l'opération un sourire s'était inconsciemment formé sur son visage, et à présent il avait l'air serein. Ses jambes n'avaient pas bougé, et Hoseok les trouva sublimes : fines, musclées, et puis il avait pu en effleurer la peau si douce couverte d'un duvet invisible. Il était vraiment beau, et ses oreilles ainsi que sa queue ne faisaient que se rajouter encore à son charme juvénile.

L'apothicaire donc s'installa auprès de son patient, devant la mare dont il se servit de l'eau pour se rafraîchir le corps. Son torse ruisselait et il s'allongea pour profiter du soleil malgré les arbres. Il ferait nuit d'ici quatre ou cinq heures, et Hoseok préféra ne pas se demander ce qu'il ferait de Jimin une fois ce dernier réveillé. Les questions, ça serait pour plus tard.

Pour lors, il ferma les yeux, enfin tranquille lui aussi : depuis le premier appel à l'aide de Jimin, son cœur n'avait pas trouvé la moindre minute de repos, ne cessant de tambouriner violemment contre ses côtes. Toute l'adrénaline accumulée pouvait enfin le quitter, le laissant complètement épuisé.

Il se réveilla un certain temps plus tard, alors que le soleil s'apprêtait à entamer son lent déclin. Il tourna les yeux vers Jimin qui avait les paupières ouvertes, et l'air pensif.

« Jimin, dit-il en se redressant brutalement, tu vas mieux ?

- C'était à peu près aussi atroce que ce que tu m'avais dit, souffla l'hybride, j'avais jamais eu aussi mal de toute ma vie.

- Je suis vraiment désolé...

- Si tu veux savoir d'ailleurs j'ai encore super mal.

- Je... j'ai à manger, proposa Hoseok pour changer de conversation.

- Oh, tu as quoi ?

- Du pain du début de la semaine et des fruits cueillis hier.

- Je suis preneur, mais... j'ai jamais mangé de pain, bredouilla Jimin.

- Alors ça sera l'occasion de goûter. Je vais chercher ça. »

Heureusement pour les deux garçons, il y avait assez à manger pour les rassasier tous les deux. Jimin apprécia le pain, alors Hoseok lui laissa la plus grosse portion : il avait besoin de se remettre à la fois du temps passé sans manger à cause du piège, et en même temps de l'opération qu'il venait de subir. Il allait lui falloir des forces.

« Jimin, hésita Hoseok après leur dîner, qu'est-ce que tu vas faire maintenant ?

- Je ne sais pas...

- Tu devrais rester avec moi, que je puisse surveiller tes blessures.

- Il est hors de question que j'aille à la ville, protesta Jimin en sentant ses muscles se raidir, on me traiterait comme un ennemi.

- Je peux toujours t'y faire entrer en cachette.

- Non, ça serait trop compliqué. Et je m'y sentirais oppressé, je ne veux pas, je suis désolé.

- Dans ce cas... tu peux rester à la serre : la nuit il y fera bon, tu pourras y dormir, et le jour tu pourras te prélasser auprès de la mare pour te rafraîchir. »

Jimin sembla trouver l'idée bonne, néanmoins il réfléchit quand même quelques secondes avant d'acquiescer avec un sourire charmant qui affinait ses yeux pourtant déjà en amande. Hoseok lui rendit son sourire et tira une clé de sa ceinture : la clé de la serre. Il la confia à son nouvel ami qui promit de toujours fermer lorsqu'il en sortirait.

« Alors je te fais confiance, sourit l'apothicaire. Je vais bientôt devoir rentrer, mon élève va me tuer pour m'être absenté toute la journée. Je passerai tous les matins m'occuper de mes plantes, de tes blessures, et j'en profiterai pour t'amener à manger et de quoi te vêtir. Ça te va ?

- Oui, bien sûr, acquiesça Jimin, encore merci de ta gentillesse, je... je sais que tous les hommes n'en auraient pas fait autant. Je te dois très certainement la vie, Hoseok, je ne l'oublierai pas.

- C'est mon métier d'aider les autres, sourit Hoseok, tu ne me dois rien.

- Je n'oublierai pas ce que tu as fait pour moi, et quand je retournerai chez moi, mon peuple saura ce que tu as fait pour me sauver. Je ne suis pas un garçon courageux, j'ai beaucoup de défauts, mais j'ai de l'honneur et je sais ce que je dois aux autres.

- Tu ne me dois rien, c'est normal d'aider quelqu'un qui en a besoin.

- Les hybrides ont de l'honneur, pas les humains ? se moqua gentiment Jimin.

- Fais gaffe sinon ce sont tes lèvres que je couds. »

Jimin grimaça au souvenir flou mais toujours présent de l'insupportable douleur subie.

« Oublie ça, Jimin, c'est derrière toi, lui assura Hoseok avec un sourire rassurant. Je te promets que désormais, tu ne souffriras plus. Il faut simplement attendre que ça guérisse. Il ne te faudra pas trop bouger, je compte sur toi.

- Je sais, tu me l'as répété cent fois...

- Je te trouve bien irrespectueux, râla-t-il.

- Désolé, rigola Jimin, je suis quelqu'un de très honnête. »

Hoseok haussa les épaules et annonça qu'il allait partir. Jimin choisit de rester auprès de la mare et ils s'adressèrent un dernier salut avant le départ de l'aîné.

La journée avait été épuisante, l'un comme l'autre avait hâte de dormir.

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Petit point culture :

La suture chirurgicale existe depuis l'antiquité égyptienne, on a même retrouvé un fil sur le ventre d'une momie.

(D'après Wikipédia :P)