Chapitre 3: Joachim

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Madeleine avait passé la nuit à discuter avec ce mystérieux Joachim avant de rentrer chez elle seule dans son grand duplex. Elle avait pensé à lui pendant tout le trajet du retour et rêvé de lui toute la nuit. Le lendemain, elle se demanda toute la journée si elle allait revoir le jeune homme à l'Apaloosa et passer sa soirée avec lui. 
Elle but un café en écoutant la radio avant de s'allumer une cigarette. Rien de nouveau sous le soleil. Elle éteignit la radio et partit se doucher. Elle devait retrouver ce Joachim. Elle pourrait faire toute la ville à pieds si il le fallait. Elle ne voulait pas le laisser partir. Il lui avait plu et elle en avait assez des hommes faciles avec qui elle allait à l'hôtel habituellement. Il était temps pour elle de changer et vivre plus simplement si il le fallait. 


Elle s'était mise sur son trente-et-un et était allée à l'Apaloosa rempli d'espoir. Mais une fois arrivée, pas de Joachim. Son cœur était serré mais la nuit venait de commencer alors elle en profita pour trouver un client pour la nuit. Alors qu'elle commençait à amasser quelques dollars elle l'aperçut. Il était entrain d'enlever sa veste juste avant d'allumer une cigarette. Il se dirigea vers le bar et commanda un scotch. 
Madeleine continua de danser avec son client avant de l'abandonner dans la foule de corps en délire. Elle essaya de se frayer un chemin entre les danseurs avant de rejoindre celui qu'elle avait attendu toute la journée. 

En la voyant arriver , Joachim lui adressa un léger sourire. Le barman lui servit son scotch dans un large verre en cristal délicatement posé sur un tissu blanc. Les deux jeunes gens reprirent alors leur conversation là où elle s'était arrêtée. Mais ce soir là, Joachim s'était laissé charmer, il avait lâché prise et s'était autorisé une nuit dans l'inconnu. Alors que l'Apaloosa fermait ses portes, lui et Madeleine était toujours sur le trottoir entrain de fumer. 
Ils étaient sortis, l'air humide et chaud qu'il y avait à l'intérieur les avait étouffé, et finalement ils s'étaient trouvés bien assis dehors. Le calme leur avait permis de discuter sans avoir à élever la voix pour couvrir la musique qui jouait de toutes ses forces dans les enceintes du dancing. 

Ils étaient entrain de parler musique quand ils furent surpris par le soleil qui se levait déjà. C'est alors qu'ils décidèrent qu'il était temps de rentrer. Ils commencèrent par se dire adieu mais Joachim décida finalement de raccompagner Madeleine. 
Quand ils arrivèrent devant son immeuble, il y eut un moment de silence. Puis Joachim embrassa Madeleine qui le fit monter chez elle. Il passèrent le reste du matin ensemble et se quittèrent tard le soir suivant. Ce soir la Madeleine était restée chez elle, elle ne voulait pas sortir, elle préférait rester chez elle à rêver de son amant qu'elle espérait revoir dans les jours suivants.

Malheureusement, aucune nouvelle, elle était revenue à l'Apaloosa, fit le tour du centre ville, visita les boutiques qu'il disait apprécier mais rien. Son amant était comme la fumée d'une cigarette, évaporé dans l'air. Elle continua d'espérer, elle avait arrêter les passes et attendait patiemment et désespérément que le buveur de scotch ne revienne. 
Au bout de plusieurs semaines, cette aventure d'une soir était devenue une obsession qui avait fait basculer Madeleine dans la folie. Elle se demandait même parfois si il avait vraiment existé, si elle l'avait vraiment embrassé. Elle ne savait plus. Ses souvenirs ainsi que les jours qu'elle vivait depuis cette disparition furent confus. 

Elle arrivait à son deuxième mois de désespoir quand quelque chose d'inattendu se produisit. Un lendemain de soirée à l'Apaloosa, Madeleine était épuisée, elle ne pouvait plus se lever, elle se sentait mal, nauséeuse, prise de sueurs froides. Était-ce le chagrin qui peu à peu rongeait son corps comme le ferait un ver dans une pomme? 
En effet elle sentait bien un ver en elle, ce qui lui souleva soudain le cœur. Elle courut jusqu'aux toilettes et se mit à vomir tripes et boyaux. N'ayant plus la force de faire quoi que ce soit elle appela sa cousine pour passer quelques jours chez elle. 

Les jours passaient mes rien ne s'améliorait, Madeleine était à bout de forces, tremblante, elle ne pouvait plus rien avaler à cause de ses nausées récurrentes. C'est finalement au bout d'une semaine sans amélioration que Sharon décida de l'amener à l'hôpital. 
Allongée sur un brancard, Madeleine voyait des lumières blanches et aveuglantes défiler au dessus d'elle. Elle avait froid , chaud , faim, plus faim, envie de vomir, soif, envie de vomir, froid... Son champ de vision s'était obscurcit et sa douleur semblait s'estomper, elle perdait connaissance. 

Quand elle ouvrit de nouveau les yeux, Sharon était prêt d'elle, elle lui disait que ses parents n'allaient pas tarder à arriver pour fêter la bonne nouvelle. Madeleine ne comprenait rien de tout ce charabia jusqu'à ce que les neurones soient tous reconnectés. Sa tête fonctionnait complètement de nouveau, le réveil fut accéléré par la nouvelle qui venait de faire changer sa vie à jamais, elle portait la vie. 
Tout l'alcool qu'elle avait consommé depuis la disparition de Joachim avait sérieusement atteint son enfant qui lui envoyait désespérément des appels au secours sans jamais être entendu.
Que penser de tout cela? Elle portait un enfant venant d'un homme qu'elle pensait aimer éperdument mais qui avait disparu après avoir semé la vie en elle. Allait-elle aimer cet enfant? Ou allait-il lui rappeler chaque jour l'affreuse trahison qu'elle avait subit plusieurs mois plus tôt? Elle chassa ces questions de sa tête, elle allait être mère et c'était son monde entier qui venait de s'effondrer pour laisser place à une nouvelle vie.

Maintenant qu'elle allait devenir mère, Madeleine voulut changer absolument tout son mode de vie. Elle prit un appartement moins luxueux qui lui permit d'acheter tout ce qu'il fallait pour l'arrivée de l'être qui chaque jour prenait plus de place sous son nombril. Elle arrêta l'Apaloosa et devint de nouveau serveuse mais dans un café juste en bas de chez elle. Puis finalement, s'était convertie. 

Elle avait lu la Bible, l'avait relu, et sa foi autrefois que partielle était revenue en elle plus forte que jamais. Elle priait chaque jour, allait à l'Eglise le dimanche et demandait sans cesse à Dieu de la pardonner pour les péchés qu'elle avait commis par avarice. 
Sa foi s'était convertie en obsession, Dieu était devenu son nouveau Joachim.  

Les mois passèrent et Madeleine avait arrêté de travailler en attendant l'arrivée de son enfant. Un matin, une lettre arriva chez elle, ses parents venaient tous deux de perdre la vie dans un accident de voiture. Son cœur se brisa en mille éclats comme du cristal. Les larmes creusèrent ses joues déjà abîmées par la fatigue, Sharon était partie vivre au Texas, elle était seule au monde. 
Seule au monde pour affronter l'épreuve la plus importante de la vie, avoir un enfant. Tout son corps se mis à brûler de douleur, elle tremblait de tristesse et gémissait de chagrin. 

Soudain elle sentit son corps se relâcher, quelques chose venait de se produire. Elle baissa les yeux et étouffa un cri d'effroi, elle avait perdu les eaux, son enfant allait arriver d'une minute à l'autre et elle n'était pas prête pour ça. 
Elle descendit jusqu'au café ou elle travaillait et supplia son patron de l'aider, on l'emmena à l'hôpital et finalement l'enfant était là. C'était un beau petit garçon, tout petit,  frêle, fragile mais beau malgré tout. Madeleine n'avait d'yeux que pour lui, et la vue de son visage avait effacé toute sa douleur. Elle avait pris dans ses bras et le regardait en souriant. Il avait son visage, fin et doux, elle s'en félicita. Mais quand il ouvrit les yeux elle se rappela qu'elle ne l'avait pas fait toute seule. Il avait les yeux d'un bleu profond, comme l'homme qui l'avait abandonné quelques mois auparavant pour disparaître dans la nature.

Une infirmière lava le bambin, l'habilla et le rendit à Madeleine. Elle commença à lui donner le sein en écoutant attentivement le moindre conseil. Finalement, l'infirmière dit au revoir à la jeune maman et commença à sortir mais elle fût stoppée net. Elle semblait avoir oublié quelques chose. Elle regarda dans son carnet et se tapa le front en riant avant de se tourner vers Madeleine. Elle n'avait pas noté le nom du bébé. Madeleine du choisir un nom, elle aurait voulu l'appeler Adam pour montrer sa foi éternelle à Dieu. Mais les yeux du bébé l'avait ramené à la réalité.

Il s'appellerait Joachim. 

JoachimWhere stories live. Discover now