T'aimer En Vers

2| ce sentiment qui les liait

Before You Go - Lewis Capaldi

❝ Les cœurs blessés portent le deuil éternel de leurs illusions perdues.❞
— Robert Mauzi

★

— un mois plus tôt

Sa main dans la sienne. Sa bouche contre sa peau. L'éclat de ses yeux verts dans lesquels il aimait se perdre. Son sourire. Tous ces éléments qu'il avait chéri pendant ces derniers mois et qu'il savait qu'il ne reverrait plus.

D'un geste brusque, Roméo déchire les dernières photos punaisées sur son mur. Elle l'a quitté et son cœur ne s'en est pas toujours remis. Plein de rage, il envoie son poing valser sur le tableau de clichés polaroïds pêle-mêle. Toutes ces photographies qu'il a pris d'elle. D'eux. De leur couple. Lorsque tout était encore parfait. Une décharge douloureuse lui parcourt le bras mais celle-ci est vite oubliée, remplacée par celle omniprésente de son organe vital. Le tableau se décroche du mur avec colère et se brise à ses pieds. Les larmes aux yeux, Roméo se laisse tomber, le dos appuyé contre le mur, au milieu de ces éclats de verre.

Le jeune homme est conscient qu'il faut qu'il se reprenne. Il ne veut pas la laisser le détruire plus qu'elle ne l'a déjà fait. Leur relation était tumultueuse, mais Roméo avait toujours cet espoir que le calme revienne. Leur rupture n'a fait que des ravages supplémentaires. En plus de lui avoir brisé le cœur, elle l'a réduit en miettes et consumé. Aveuglé par son amour pour elle, il n'a pas su détecter ses erreurs. Minable qu'il a été, il a toujours cherché à tout lui pardonner. Il voulait que cela redevienne comme avant. Lorsqu'ils marchaient main dans la main sur les berges de la plage. Lorsqu'ils s'embrassaient jusqu'à en perdre haleine et en avoir le tournis. Lorsqu'elle l'aimait encore et que l'idée de le tromper ne lui avait pas traversé l'esprit.

Son regard se pose soudain sur les cartons encombrant sa chambre. Son appartement actuel est déjà mis en vente par l'actuel propriétaire et ce dernier doit recevoir des visites de potentiels locataires intéressés dans les jours suivants. Son déménagement vers la capitale approche à grands pas. Bientôt, il repartira de zéro. Nouvel appartement. Nouvelle école. Nouvelle ville. Nouvelle vie. Plus aucune trace de cette trahison. De leur amour passionné. Plus aucune trace d'elle.

Il se rappelle encore ce jour où il a reçu cette enveloppe dans sa boîte aux lettres. Un rayon de soleil illuminant sa journée mélancolique. Entreposée délicatement sur la pile de courrier, au milieu de tout ce tas de publicités pour les magasins avoisinants, il savait pertinemment ce qu'elle contenait. Sa réponse pour le Conservatoire Libre du Cinéma Français, l'école parisienne dans laquelle il avait postulé. L'approbation ou non d'un nouveau départ. Il n'avait pas perdu une seule seconde, décachetant immédiatement cette enveloppe scellant son avenir.

Roméo fouille sa chambre à la recherche de cette fameuse lettre et l'aperçoit soudain, au milieu de son tas de photographies déchirées et éparpillées. Il l'extrait de la pile de souvenirs écrasés et la relit, avec plus d'assurance que lorsqu'il l'avait ouvert pour la première fois. Peu sûr de lui lors de sa réception, il avait sorti le papier plié en trois, tandis que ses mains tremblaient. Lorsque ses yeux s'étaient posés sur la réponse tant attendue, il avait été obligé de relire la phrase plusieurs fois, de peur de rêver. Très vite, un cri de joie lui avait échappé. Il était accepté ! Son dossier était retenu !

L'adolescent soupire en repensant à cette journée. Il n'a que trop longtemps rêvé de cette école de cinéma à Paris, et voilà qu'il fera, dès le mois prochain, partie de cette poignée d'élèves admis. Ses parents lui ont toujours dit de croire en ses talents et en ses rêves. Après toutes ces années de patience, ces impatiences et ces faux-espoirs, ces films qu'il a regardé dans le but de fortifier sa culture générale et cinématographique, son avenir se dessine petit à petit. Il peut enfin s'autoriser à souffler et à sourire à cette opportunité qui s'offre soudainement à lui. Étudier de sa passion et avoir la chance de pouvoir en faire son métier. L'aboutissement idéal de tout son travail. Une vie nouvelle, meilleure.