Aloys (Tome 3): Lie and The End

Chapitre 6 (2/2)

Je me retournai vers lui, fatigué d'avance d'avoir à hausser le ton encore une fois.

— Aaron, soupirai-je, on n'a plus rien à se dire tous les deux...

— Le hic, c'est que je ne suis pas d'accord avec ça. J'ai besoin de savoir comment tu vas, comment tu gères tout ça, lâcha-t-il en désignant vaguement la pièce autour de nous. J'ai besoin que tu me parles, que tu te plaignes, franchement je t'écouterai dire n'importe quoi...

— Tu es sûr que je n'y suis pas allée trop fort l'autre fois ? Tu as l'air d'avoir pris un sacré coup sur la tête. Depuis quand tu supplies une fille de t'accorder un peu d'attention ?

            Je tentai d'être blessante pour cacher à quel point l'entendre dire ça m'avait rendu nerveuse. Je pouvais essayer de me convaincre que les choses étaient finies entre nous, je l'avais toujours dans la peau et c'était justement pour cette raison que j'avais refusé de le voir pendant tout ce temps. Le risque que je lui cède une nouvelle fois était bien trop grand, mais cette fois je refusais que les choses se passent de la même manière. Je ne pouvais plus jouer sur tous les tableaux et me battre dans un camp tout en voulant protéger l'autre.

            Mais au lieu d'être touché par ma remarque acide, il se contenta de hausser les épaules avec insolence.

— Tu sais bien pourquoi Aloys, arrête un peu de te voiler la face.

            Il attendait visiblement une réponse, mais comme rien ne venait, il finit par souffler en se penchant légèrement vers moi.

— Je t'ai...

            Je plaquai rapidement mes mains sur sa bouche pour étouffer la fin de sa phrase. Une seconde de plus et j'aurais été bonne pour une véritable crise de nerfs. Je les avais attendus ces mots, je les avais attendus longtemps ! Mais ce n'était vraiment plus le moment de me les jeter au visage.

— Ne redis jamais un truc pareil c'est clair ? Non mais franchement à quoi tu joues ? Il y a dix minutes tu en galochais une autre !

            Il dégagea mes mains, les sourcils froncés, et les emprisonna dans les siennes. Mon cœur rata plusieurs battements alors qu'il me tirait doucement vers lui. Il se pencha en avant, encouragé par mon absence de réaction, mais bifurqua avant d'atteindre ma bouche pour chuchoter à mon oreille d'une voix grave.

— Je pensais que c'était toi. Je n'ai envie que de toi...

            Mon corps frémi, trahissant l'effet qu'il avait sur moi. Chacune de mes terminaisons nerveuses brûlaient au simple souvenir de sa peau contre la mienne et je peinais à garder ce feu sous contrôle. Ce que mon corps voulait était une chose et ce que je devais faire en était une autre. Ce n'était plus le moment d'avoir « envie », nous étions à l'aube d'une guerre, il était trop tard pour tout ça...

— Pourtant il va bien falloir que tu passes à autre chose, j'ai une tumeur dans la tête Aaron. Je te conseille de choisir le prochain modèle dans une catégorie viable sur au moins une dizaine d'années.

            Son visage se tendit brusquement, non pas par la colère comme j'en avais l'habitude mais plutôt par un mélange de peur et d'inquiétude bien plus difficile à soutenir.

— Quoi ? Qui a dit ça ? Pourquoi tu ne m'as rien dit avant ? Ils peuvent l'enlever ?

            Sa voix tremblait nerveusement et ses mains me broyaient pratiquement les doigts tant elles étaient crispées.

— Heal me l'a appris il y a quelques jours... Et non, elle n'a pas parlé de la retirer, elle m'a simplement donné des cachets.

— Des cachets contre une tumeur ? s'étonna-t-il. C'est pour quoi ? La douleur ? Tu souffres ?