Un Vieil Ami

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Elle n'allait pas l'abandonner.

Son regard s'ouvrit sur un être en blouse blanche. De fines plumes parcouraient son cou et son visage était affublé d'un nez au bout si incurvé vers le haut qu'il en était atypique. Il possédait deux petits yeux retroussés et un air concerné.

Se redressant immédiatement, un peu groggy, Near De Lullaby observa le décor. La lumière du soleil était vivace, aveuglante. Alors que ses rouages prenaient le temps de s'y habituer, il entendit parler l'étranger.

« La bande perforée principal est fragilisée et il n'en existe plus d'autre versions sur le marché. Certes, on pourrait tenter d'en fabriquer une nouvelle, mais celle-ci est chargée en magie. La retirer reviendrait à lui effacer définitivement la mémoire. De plus, il semble s'agir de l'artefact contenant l'âme. »

Il n'en comprit que la moitié, mais il en comprit assez pour saisir : Il était ici en danger et on venait de trifouiller dans ses engrenages. Hors de question de rester plus longtemps dans ce... ! Où était-il, d'ailleurs ? Il chercha à se relever mais retomba, abattu. Il semblait que son corps ne suivait pas. L'automate commença à paniquer ; la peur et l'épuisement lui renvoyaient des souvenirs d'autrefois, des notions de danger qu'il ne pouvait ignorer. Mais une voix l'interrompit.

« Combien de temps cette bande va-t-elle tenir ? » C'était une voix grave aux intonations changeantes, de celles qu'on a lorsqu'on ne sait pas soi-même qui on est. Une voix étrange, désaxée. Une voix familière.

« Il lui reste très peu de temps. » Déclara le savant. Autour de lui, Near entendait le son diffus de jeunes gens silencieux. Certains écrivaient.

« Combien ? » Imposa la vampire sur un ton calme.

« Pardon ? »

« Combien, pour le réparer. » C'était souvent ainsi, dans ce monde et dans l'ancien. Mais elle savait qu'elle allait tout entreprendre pour sauver cette marionnette-là.

« Huit mois, tout au plus, pour le détruire. » Lui répondit-on, impuissant.

« ...Huit mois ? » Articula Near. Il chercha à se rappeler de ce qui s'était produit jusqu'ici. La raison pour laquelle il se retrouvait assis dans- une sorte- ses doigts faisaient le contour de l'objet. C'était une caisse, un cercueil peut-être ? Et cet endroit... Il n'avait jamais connu telle luminosité.

La langue, cependant, qu'il comprenait avec tant de facilités, malgré quelques lacunes dû à l'ancienneté de ses souvenirs, il la connaissait. Mais il ne parvenait pas à la reconnaître. Du temps où les années s'étendaient avec Nelly, il avait retenu énormément de dialectes disparus ou inventés. Il était certain qu'il s'agissait de l'un d'eux.

Une main se posa sur son épaule et il sursauta ; en détestant le contact.

« Vous pouvez nous laisser. » Ses yeux s'étaient habitués maintenant. Il détaillait son environnement, devinait qu'il s'agissait là d'une place riche, peut-être encore d'un château. Il releva son regard vers Zune.

« Bien, mademoiselle Kiuun. » Dit le savant. Near le vit quitter avec ses disciples.

« Il va falloir que vous m'expliquiez... » Zune sourit, lui tendant la main. Cet air de malice dans son regard en disait long. Il était resté assez d'années avec la vampire pour savoir quand les choses devenaient malsaines. Il prit sa main.

En tentant de le soulever, elle manqua de tomber en avant.

« J'avais oublié que tu pesais une tonne ! » Ragea-t-elle alors qu'il était finalement debout et elle essoufflée. Near chercha un endroit où s'assoir, à défaut de trouver un endroit solide, il se posa sur le sol même, les genoux ramenés contre lui et la main contre le visage. La 'mademoiselle Kiuun' s'en alla fermer les portes puis revint s'assoir en face de lui. Elle avait le coude sur un genou plié, l'autre jambe était allongée au sol.

L'Éden des RejetésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant