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Du haut de mes vingt-sept ans, j’ai du mal à choisir quel a été, pour l'instant, le plus beau jour de ma vie.

Quand on me pose la question, je réponds que c’était la naissance de mes jumeaux. Ce n’est pas entièrement vrai. Premièrement, je ne comprends pas comment un accouchement peut être considéré comme un “bon” moment. Il n’y a rien d’agréable là-dedans, encore moins dans ma situation, où après en avoir sorti un, je devais recommencer. Deuxièmement, même si je m’étais déjà évanouie à l’annonce d’une grossesse gémellaire, j’ai eu besoin de moins de vingt-quatre heures après leur naissance pour réaliser que ma réaction n’avait pas été excessive : s’occuper de deux bébés, c’est un challenge de chaque seconde.

Trois ans plus tard, je ne contrôle toujours pas la situation.

J'ai du mal à l'admettre à mon entourage. Tout le monde semble avoir naturellement développé des dons à la naissance de leurs enfants, et moi, je suis toujours au même point : je n'arrive pas à gérer deux enfants. Et je ne sais pas si j’y arriverais un jour. En attendant, je fais semblant de maîtriser la situation.

-Maman, cornichons !

Je quitte immédiatement ma liste de courses des yeux en entendant la voix de mon fils. Je soupire de soulagement en voyant qu’heureusement, les pots de cornichons lui sont hors de portée, et c’est justement pour ça qu’il m’appelle.

-Il y en a à la maison, Samuel, réponds-je calmement, et à ma grande surprise, il hoche simplement la tête avant de venir s'accrocher au chariot, comme je lui demande de le faire lorsque c’est lui qui doit marcher. Nathan, plus jeune de neuf minutes, est assis sur le siège, et ne bronche pas depuis que nous sommes entrés dans le magasin.

Nous changeons de rayon, et je me concentre de nouveau sur ma liste.

-Maman, de la confiture ! de la confiture !

Quand je relève la tête, mes yeux s’arrondissent en voyant que mon fils a le pot de confiture en question dans les mains, et qu’il l’a ouvert, le nez dedans, probablement pour savoir de quel fruit il s’agit.

-Samuel, il ne faut pas toucher aux articles dans les magasins, je te l’ai déjà dit ! m’exclamé-je en lui prenant le pot de confiture des mains. Samuel a plus de forces qu’on ne l’imagine, alors je tire un peu plus pour le saisir, et c’est à ce moment-là qu’il m’échappe des mains, et je n’ai pas le temps de réagir : je vois le pot de confiture voler avant d’atterrir sur le dos d’un client, qui était occupé à regarder les différents paquets de céréales.

J’attrape Samuel dans mes bras avant de m’approcher de l’homme pour m’excuser, et celui-ci se retourne, l’air complètement secoué. C’est le moment que choisit Nathan pour intervenir, s’exclamant :

-Marco Verratti !

framboises » VERRATTI ✓Where stories live. Discover now