6.

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- Quelles sont vos questions ? 

- Je voudrais savoir qui est réellement Matteo Corelli, je commence. 

- Le plus grand traître de ma carrière, dit-il.

- Pourquoi il m'a laissé en vie ? 

- Il vous a laissé mourrir dans une rue mais vous vous en êtes sortie, nuance t-il. 

- Je ne pense pas, j'assène. Sinon, il ne m'aurait pas laissé ce papier. 

C'est vrai. Moi aussi j'ai cru ça au début, j'ai cru qu'il m'avait tiré une balle et qu'il était persuadé que j'allais mourrir et que j'avais survécu par une chance absolument incroyable. Mais quand je me suis penchée sur le traumatisme, sur ce qui était arrivé, et sur les ténèbres qui entouraient cette tentative d'assassinat, j'ai compris que ce n'était pas juste ça. Quand le papier qu'il m'avait glissé dans la main a pris du sens, j'ai réalisé que c'était bien plus qu'une balle perdue.

- Pourquoi moi ? je questionne.

- Parce que vous étiez là.

- Pourquoi me laisser ce papier ? 

- Bonne question, remarque t-il.

- Pourquoi vous avoir trahi ? 

Ma question déclenche chez lui une réaction extrêmement étrange. Il fixe le vide quelques secondes en silence puis desserre la cravate autour de son cou comme si il était en train d'étouffer. L'absence de réponse me confirme que même lui n'a aucune idée de pourquoi le traitre a fait ça, ce qui appuie encore plus mes propos. Je sens que je suis en train de gagner du terrain et il faut que je continue à lui prouver que cette histoire n'a pas de sens, et que je peut lui livrer Corelli une bonne fois pour toutes. 

- Matteo Corelli est soi-disant mort dans un accident de bateau en juillet 2015, je dis, et il m'a tiré dessus six mois après. Pourquoi se compromettre gravement de la sorte ? 

Nouveau silence. L'homme devant moi me fixe, les yeux perçants, et je continue. 

- Pourquoi simuler sa mort et se mettre dans une telle affaire ? Il savait que la police allait enquêter. 

- Peut-être qu'il ne le savait pas, annonce t-il en posant sa serviette à côté de lui. 

- Oh, vraiment ? Il m'a enlevé la balle. 

L'homme devant moi relève soudainement la tête. J'ai dit quelque chose qu'il ne fallait pas, je crois. Il me fait répéter ce que je viens de dire, et je lui répète donc que lorsque Corelli m'a tiré dessus et que l'autre homme s'est enfui, il est venu près de moi et m'a enlevé la balle du thorax. 

- Comment je pourrais vous convaincre ? je m'écrie devant son air indifférent. 

J'en ai marre qu'il passe d'un interêt soudain à un ennui déprimant devant mes yeux, j'en ai marre de ne pas comprendre ce qu'il cherche à me faire dire. J'en ai marre de que le plan ne marche pas, j'en ai marre de devoir me justifier sur ce que m'a fait Corelli ou de poser des questions auxquelles seules l'intéressé peu répondre. Rien que le fait qu'il aie simulé sa mort devrait être assez pour le faire sortir de ces gonds et accepter le marché que je lui propose !

- Ne me parlez pas sur ce ton, dit-il à voix basse. 

Sans que j'aie le temps de dire quoi que ce soit, j'ai l'arme pointée sur moi. Mes ongles raclent sur mes cuisses et je me mords l'intérieur de la joue, l'adrénaline battant dans mes veines. Une mine inquiète anime le visage de mon interlocuteur, qui fini par me demander : 

- Vous êtes féministe ? 

- Quoi ? je demande, perdue. 

Il réitère sa question et parait s'impatienter. 

ULTRAVIOLENCEWhere stories live. Discover now