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Chapitre 22

Il est resté silencieux jusqu'au déjeuner. Il savait que je n'allais rien lui demander pour l'instant, que j'allais voir s'il m'en parlerait de lui-même. Je faisais toujours comme ça. Le silence régnait alors que nous regardions tous les trois nos assiettes de pâtes. Ça sentait clairement le malaise.
Heureusement, ça n'a pas duré. Simon a fini par lâcher sa fourchette avant de prendre la parole.

- Avant qu'on ne me pose la question, je ne lui ai rien fait. C'est elle qui m'a frappé.
- Qui « elle » ?
- May.

Li venait de lever la tête, comme si ça l'étonnait. Ce n'était pas mon cas, je lui avais bien dit d'éviter de traîner trop près d'elle.

- Ma sœur n'a jamais frappé personne, il y a bien une raison ?
- La seule raison, c'est que je ne suis un peu maladroit, et que j'aurais dû être un peu plus délicat pour lui dire qu'elle ne m'intéressait pas.
- Qu'est ce que tu lui as dit ?
- Que ça ne m'intéressait plus de coucher avec elle.

Li s'etait levé d'un coup, faisant renverser son verre en se cognant contre la table. Il avait compris la même chose que moi.

- T'as baisé ma sœur ?
- Calme toi, je ne lui ai rien demandé. C'est elle qui a proposé.
- Mon cul oui !

Je lui ai pris la main en lui demandant de se calmer, de le laisser s'expliquer. Son regard s'est adouci quand il a tourné la tête vers moi. Il s'est laissé tomber sur sa chaise et a défié mon frère de son plus beau regard féroce.
Il a raconté que May lui avait proposé de monter dans sa chambre le week-end précédent, qu'il avait couché avec elle mais que, pour lui, ça s'était mal passé. Quand elle lui a demandé s'il voulait remettre ça ce week-end là, il a décliné. Il n'avait pas tout a fait choisi la meilleure manière de refuser, certes, mais ça n'excusait pas ce coup.

- Tu aurais pu refuser la première fois !
- Je ne pouvais pas savoir que ça se passerait comme ça.
- Peu importe, tu ne pouvais pas te trouver quelqu'un d'autre ?
- Est-ce que tu m'as demandé mon avis avant de te taper mon frère toi ?
- C'est différent...
- C'est exactement la même chose. Ils sont assez grands pour savoir ce qu'ils veulent.
- Au moins, moi, je ne l'ai pas jeté comme une vulgaire chaussette juste après.
- Tu préfères que je la laisse espérer, en lui mentant ?

Il n'a pas répondu. Simon avait raison sur ce point. Je lui avais conseillé de ne rien faire sans en avoir envie, et il m'a écouté. A quoi bon faire souffrir cette fille si elle venait à s'attacher à lui ? Autant lui dire tout de suite que ça ne pouvait pas continuer comme ça. Je ne cache pas que ça m'arrangeait.
On a enfin pu finir notre assiette en silence, puis Li s'est enfermé dans la salle de bain après avoir débarrassé la table.
Mon frère en a profité pour me parler.

- Tu crois qu'il m'en veut ?
- Ça lui passera, ne t'inquiète pas.
- Je ne voulais blesser personne, je n'y peux rien.
- Je n'en doute pas.
- C'était ma première fois, mais je ne lui ai pas dit. Je croyais que c'était juste parce qu'elle ne m'attirait pas, mais non. Je n'aime pas ça Sacha. Tu crois que j'ai un problème ?
- Oui, tu as un problème. Tu te poses beaucoup trop de questions. C'était peut-être l'ambiance, ou la situation, tu le sauras avec le temps. Tout ce que je sais, c'est que se forcer n'est pas la bonne solution.
- J'ai réessayé, avec une autre fille un peu louche. Je lui ai demandé de me faire mal, au cas où ce serait mon genre de délire, mais toujours pas. Ça m'a tourmenté toute la semaine.
- Tu sais que tu aurais pu m'en parler.
- Je l'ai un peu fait. Tu as répondu à mes questions et ça m'a presque rassuré.
- Alors c'était ça...
- J'étais tellement perdu que, ce week-end, je me suis tapé un mec, au cas où. C'était la même chose, ni chaud ni froid. Après ça je suis au moins sûr  d'une chose : plus jamais je ne laisserai quelqu'un passer par l'entrée des stars. Plus jamais !