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Felix regardait au loin, ses cheveux virevoltaient au loin et je ne pouvais pas m'empêcher de le regarder comme s'il était là plus belle œuvre d'art d'un musée. Ses traits fins ornés de petites tâches de rousseurs lui donnaient un charme fou. Il était très mignon, je l'avouais encore. Felix regardait la mer claquer avec rage contre les rocher, comme si elle était en colère. Pourquoi la mer pouvait elle être en colère ? J'en savais rien, mais ça fascinait Felix alors je voulais que ça dure encore une éternité pour que je puisse l'observer sans fin.

Moi aussi j'étais en colère. Contre tous, contre moi, contre mes cellules incapables de se retenir et de me rendre si faible un peu plus chaque jour. C'était dur de penser qu'il ne me restait que quelques mois, que dans quelques semaines je serais enfermé dans une boîte de chêne et que je n'en sortirais plus jamais. C'était angoissant.

Dans les films, le personnage malade fait toujours une chimiothérapie mais le docteur m'avait dit que la chimiothérapie allait me tuer plus vite que la maladie, ça ne servait à rien de dépenser dans la souffrance, la peur et l'odeur de l'hôpital jusqu'à mon dernier souffle. De plus, j'avais l'immense honneur de pouvoir garder mes cheveux sur mon crâne et ça je ne pouvais qu'en remercier le Seigneur. Enfin cela dit, je l'aurais aussi remercié de me laisser aller plus loin que la vingtaine. Mais bon, c'est comme ça, tant pis. Je mourrais vierge et sans amour, sans enfant, sans diplôme. Mais j'aurais au moins ma famille, c'était le plus important.

- Tu penses à quoi ? m'interrompit Felix.

Cette fois, c'était lui qui me
regardait fixement.

- À Jyp, j'avais répondu du tac au tac.

J'aurais pu trouver mieux.

Felix me dévisagea avant de pouffer en haussant les épaules puis me tendit son téléphone.

- Tu veux écouter ?

- T'as pas autre chose ? je grimaçai doucement en le regardant fixement dans les yeux.

JYP était peut-être sympa, ou pas j'en savais rien, mais comme musiques on a fait mieux. Quoi que, en tant que producteur il est pas mal.

- J'ai PSY.

- Wouah mais t'as quel âge ? je ronchonnais avant de soupirer en abdiquant.

Quelques secondes plus tard, un écouteur dans mon oreille et le second dans celle de Felix, le vieux hit de psy tourna, n'empêchant pas de nous ambiancer.

***

Je ne me sentais pas bien. À vrai dire, j'avais une horrible envie de vomir le peu que contenait mon estomac, il fallait pourtant réprimer cette envie. J'avais déjà perdu trop de kilos en trop peu de temps, je ne voulais pas mourir jeune et sans muscle, c'était trop triste.

- T'as déjà fait une liste de truc à faire avant de mourir ? J'avais soudainement demandé en tournant la tête vers la mer à mon tour.

Parler me fera du bien, je penserais à autre chose.

- Ouais.

- Tu l'as fini ?

- Pas du tout, pouffa-t-il. Et toi ? T'en as une ?

- Non...

- Faisons la ensemble alors !

Felix sortit son téléphone avant de se précipiter vers l'application note, où il ouvrit une nouvelle page. J'avais juste eu le temps de voir qu'il y avait de nombreuses pages déjà ouvertes.

- Alors, reprit il. Numéro un.

- Envie d'aller dans un très bon restaurant et partir en courant.

Il ricana en l'écrivant. L'idée lui plaisait.

- En deuxième, j'ai envie de m'allonger dans la mer et profiter de l'eau froide qui claque doucement contre ma tête.

- C'est une sensation agréable.

Il nota.

- En troisième, j'ai envie d'aller mieux.

Il ne posa aucune question, il se contenta d'écrire. Il n'ajouta rien, ne me regarda même pas. Est-ce qu'il s'en fichait ?

- Tu ne dis rien ? j'osa demander après de longues secondes silencieuses.

- Pas vraiment. Il leva la tête pour me regarder. Je t'avoue que j'ai souhaité la même chose.

Wow. Il était sacrément beau. Encore plus quand il me regardait fixement dans les yeux, j'étais prêt à bondir sur les lèvres.

- En quatrième ? il demanda sans quitter mes yeux du regard.

- Embrasse-moi.

La seconde d'après, je venais de réaliser ce que j'avais dit. Nos yeux s'écarquillèrent, j'étais déjà rouge, mort de honte. Bordel la honte la honte la putain de honte ! Encore heureux que je mourrais bientôt !

- T'es sérieux ? ricana Felix avant de secouer la tête.

J'étais sérieux alors je n'avais rien ajouté d'autre, juste un regard terriblement gêné lancé vers les vagues. Je n'aimais pas cette ambiance, j'étais le débile et Felix encore plus gêné.

- Changbin ? continua-t-il un peu plus sérieux.

- Rien laisse tomber c'est la honte... je marmonnais en baissant la tête vers mes pauvres petites pattes.

Un lourd silence s'en suivit. Et voilà, tout gâché. Bravo Changbin. Tu vas crever, tu rencontres un mec incroyable et tu gâches tout six mois avant de finir sous terre, très fin ça.
Bordel de merde, j'étais qu'un con. Felix me regardait encore, peut-être que je le dégoûtais ? J'osais encore moins le regarder. C'était trop bizarre.

- J'aurais aimé que ce soit sérieux, lança-t-il soudainement avant de soupirer.

- Hein ?!

Il ricana, encore. Ah il se foutait de moi ? Encore plus gênant. Je me voyais déjà aller me noyer un peu plus loin lorsqu'il prit mes joues entre ses doigts pour me forcer à le regarder.

- Pourquoi t'agis comme un gamin ?

J'aurais aimé répondre mais mes lèvres coincées avec mes joues entre ses doigts m'empêcheraient de dire quelque chose de sensé. Encore plus quand il était si prêt de moi.

- Je t'aime bien, moi.

Là, à cet instant, j'aurais pu mourir sans regret.

- Même si t'es sûr de rien, que ça sera sûrement une expérience pour toi, moi je t'aime bien.

Il avait doucement dégluti tandis que mes yeux faisaient d'innombrables aller retour entre les siens et ses lèvres.

Putain qu'il était beau, magnifique même, tellement que je n'avais pu m'empêcher de m'approcher dans l'espoir de l'embrasser timidement.

Il avait souri, puis il m'avait embrassé. C'était très furtif, comme si on était des gamins, innocents face à toutes les horreurs de la vie qui nous attendaient.

Le court silence qui s'en suivit fut briser par Felix qui lâcha mes joues pour me laisser bouger seul.

- On peut...? Il demanda doucement, rouge comme une tomate.

Les quelques minutes qui s'en suivirent furent accaparées par nos baisers calmes et timides, pourtant emplis d'envie. C'était agréable, c'était doux, j'adorais ça. J'adorais embrasser Felix, j'adorais quand c'était que lui et moi, j'adorais quand on marchait sur la plage, quand on discutait des heures durant, et bordel que ses lèvres sont délicieuses.

J'aurais aimé ne penser qu'à ça, me dire que c'était probablement le plus beau moment de ma vie, mais à la place je ne pensais qu'à mon corps qui mélangeait la douceur de cet amour pur et la douleur de ce corps malade. Bien que je voulais ne pas y penser, elle était là.

J'étais si bien dans les bras de Felix.

J'aurais aimé que ça dure pour l'éternité.

REGARDE MOI. changlixOnde histórias criam vida. Descubra agora