REGARDE MOI. changlix

23

Felix s'était assis aux côtés de la mère tandis que le père n'avait même pas sourcillé, bien trop occupé à admirer son petit bébé endormi.

Endormi, parce que c'était trop difficile de se dire qu'il n'allait désormais plus se réveiller. Changbin se transformait en un amas de cellules toutes plus malades les unes que les autres, fatiguées de supporter tout ce poids, toute cette auto-destruction.

Changbin avait espéré tenir plus longtemps. Être un peu plus présent, aller confronter la grand-mère et les parents de Felix, embrasser son petit ami, prendre ses parents dans ses bras, s'amuser avec Junghyeong et passer une dernière soirée assis sur le banc aux côtés de sa grande sœur.

Changbin avait trop espéré. Espéré plus de temps, espéré choisir son propre cercueil, ses propres fleurs tombales, espéré être dans sa chambre aux côtés de ceux qu'il aimait lorsqu'il aurait passé l'arme à gauche.

Et si c'était possible ?

Il n'était pas encore mort. Sacrément mal en point, c'était certain, mais il était encore vivant. Il respirait toujours, avec peine mais il y arrivait.

En prenant conscience de cela, Felix se redressa pour venir serrer la main de son petit ami et ainsi lui témoigner toute sa force et son amour pour lui, essayer de lui transmettre sa peine et sa passion, essayer de le raisonner et de le réveiller, juste pour une fois, juste pour lui.

Il y avait encore trop à espérer, il y avait encore trop de moments à passer ensemble. C'était trop peu, Felix en revoulait, encore et encore.

La chambre d'hôpital plongée dans un silence assourdissant angoissait Dongsun. Elle n'avait pas la force de rentrer, de voir son petit frère chéri qu'elle s'était promis de toujours protéger allongé sur ce lit blanc, dans cette chambre blanche, accroché à des fils, un masque à oxygène cloué à son visage si doux.

- Maman, maman, qu'est-ce qu'il a Changbin ? demanda Junghyeong d'une voix si basse, comme s'il avait peur de déranger sa pauvre mère, la tête entre les mains, le regard perdu sur le sol.

- Il se repose.

- Pourquoi ?

- Tais-toi. Arrête, s'il te plaît, juste aujourd'hui tais-toi.

- Mais il a quoi Changbin ? s'agaça son fils. Je veux le voir, je veux jouer avec lui !

- Arrête ! cria d'un seul coup la pauvre mère, faisant sursauter un infirmier qui passait par là ainsi que Junghyeong. Je t'ai dit de te taire, alors tais-toi !

Effrayé, le jeune garçon se mit à pleurer bruyamment, agaçant encore plus sa mère déjà à bout. N'ayant plus la force de s'énerver, elle se mit à pleurer à son tour, tout aussi bruyamment, avant de prendre son bébé dans ses bras et de lui supplier de la pardonner, qu'elle l'aimait de tout son cœur, que maman était juste un peu triste mais que ça ira très vite beaucoup mieux.

Un peu perdu, le jeune garçon pleurait désormais car sa mère pleurait, si sa maman pleurait, alors lui aussi. Qu'il n'aimait pas la voir pleurer, ça lui faisait peur. En revanche, il aimait quand elle souriait, il trouvait que c'était la plus belle quand elle souriait.

En entendant les sanglots, Felix avait décidé de sortir de la chambre voir ce qu'il s'était passé. Voyant la soeur et le neveu de Changbin dans cet état, il sentit son coeur se briser un peu plus, bien qu'il ne croyait pas ça possible.

Il s'approcha petit à petit, timidement, avant de venir s'assoir aux côtés de Dongsun. Il resta silencieux, le temps que les deux se calment.

- Parfois je regrette d'avoir eu un petit frère, commença Dongsun, le regard perdu dans le vide pendant que son fils passa ses bras autour de son cou pour rester coller contre sa poitrine. Peut-être que je n'aurais jamais eu aussi triste s'il n'avait pas été là.

- Je suis reconnaissant de l'avoir connu. Ces quelques semaines à ses côtés ont été les plus belles de ma vie. Sans déconner, je ne me croyais même pas capable d'être aussi heureux. Tout ca c'est grâce à ton frère.

Elle pouffa doucement avant d'acquiescer.

- Tu as raison. Changbin était peut-être le petit frère parfait.

- Est. Il n'est pas encore mort.

- Oui... Pas encore...

Je la vis grimacer sous la douleur des sanglots coincés dans la gorge.

- Je voulais te remercier pour tout ce que tu as fait avec Changbin, poursuivit-elle en posant doucement sa main sur mon genoux. Grâce à toi, il a passé de très bons moments à tes côtés aussi. C'est comme si tu lui avais redonné goût à la vie. Amusant, non ? Pouffa-t-elle. Elle marqua un long temps de pause avant de se relever, son fils toujours dans les bras. Rentrons, il se fait tard.

- J'aimerais rester encore un peu.

- Felix... Elle déglutit. Laissons les parents à ses côtés, au moins ce soir. On verra demain.

Demain était trop incertain, mais Felix n'osa pas déranger plus. Alors il rentra chez sa grand-mère, plus muet que d'habitude. Il n'avait pas faim, il n'avait pas envie de regarder la télé, il avait seulement envie de dormir.

Dormir longtemps, bien dormir, jamais se réveiller. Être au calme, sans méchant parents, sans méchants camarades, être en paix avec Changbin, pour toujours.