CHAPITRE LX.

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        ON
             PAYE
                      TÔT
                            OU
                                 TARD...
              
                 

   Wendy s'était résolue à narrer sa triste histoire à Sam dans le dessein de le convaincre de la nécessité de constamment lutter, de constamment conserver l'espoir d'un lendemain meilleur, de constamment garder en vue qu'il y avait plus malheureux que soi et qu'il était constamment possible de modifier le mal en bien, de tirer sa force de sa faiblesse même puisque devant la volonté de la personne rien ne pouvait faire obstacle. Au bout de son récit, elle ne pouvait guère dire si son plan avait remporté le résultat escompté ou non puisque Sam après l'avoir écoutée avec tout l'intérêt requis avait fait preuve, ensuite, d'une froideur choquante et même blessante. Ne désirant point le brusquer ni l'embarrasser, elle préféra partir et laisser l'infirmier s'occuper de lui. Il était temps de s'occuper du docteur qui avait causé tout ce remue ménage !

    En partant à la recherche des inspecteurs afin de les prévenir du réveil de Sam qui devait donner sa déposition elle rencontra sur son chemin un homme chic, au visage agréable et au maintien assez assuré.

   - Bonjour, mademoiselle Wellington. Je me présente : je suis maître Trimart, avocat des Strauss. Je représente...

   - Vous désirez ?

   - Monsieur Strauss est prêt à...

   - Monsieur Strauss !? A quel titre ? Aucune plainte n'a été portée contre lui ! Aucun crime ne lui a été imputé ! De quel droit serait-il prêt à faire quoi que ce soit !? Le seul conseil que je puisse lui donner est de trouver de meilleurs avocats pour défendre sa fille car je puis vous assurer qu'elle écopera de la peine la plus lourde qui soit.

   - Écoutez au moins ce qu'il peut vous proposer !

   - Que pourrait-il bien proposer ? Laissez-moi deviner ! Faire soigner la victime de sa fille par les spécialistes les plus compétents - car bien évidemment sa fille est trop nulle pour réussir quoi que ce soit sans oublier qu'une prisonnière ne pourra pas jouir d'une liberté de mouvement pour s'acquitter d'une tâche aussi difficile - lui offrir les meilleurs kinésithérapeutes, choisir les psychologues les plus selects, lui payer des aides soignants, l'installer dans une maison équipée d'un ascenseur pour faciliter ses déplacements en fauteuil roulant...

   - En effet ! Vous avez bien pensé....

    - Je n'ai pas besoin de votre monsieur Strauss pour offrir tout ça à mon ami. Il bénéficiera de tout ça et plus encore. Il pourra aussi jouir du plaisir de voir la criminelle qui a bousillé sa vie se faire juger et aller croupir en prison. Et soyez sûr que je m'assurerai qu'elle ne bénéficie pas de circonstances atténuantes ni de certificat médical allégeant une irresponsabilité passagère. Maintenait, ôtez-vous de mon chemin.

   - Peut-être que votre ami acceptera. Il aura une rente pour le restant de ses jours ! Il ne manquera de rien !

   - Il aura tout. Sauf l'usage de ses jambes. A cause de votre médecin de pacotille ! Saviez-vous que monsieur Pierce est un sportif ? Un coach ! Comment fera-t-il désormais ? Sa vie est chamboulée et vous avez encore l'audace de parler de compensation !

   Wendy, furieuse, se montrait d'une impolitesse frisant la grossièreté mais il fallait reconnaître que la situation n'était point aux civilités. Certains riches se croient tout permis. Avec leur argent ils veulent tout acheter, tout arranger, tout légaliser... Pour eux l'être humain n'a aucune valeur. Tout ce qui compte c'est leur bonheur, leur foutu bonheur et bien-être même au détriment d'autrui. Moi et après le déluge ! Une philosophie égocentrique invitant à piétiner faible, démuni et impuissant. Avec leur sale argent ils croyaient possible, et juste - à condition de connaître le mot - de réparer leurs erreurs, voire leurs crimes. Leur ruse pouvait aller jusqu'au point de menacer, terroriser ou acheter quelqu'un pour lui faire endosser la responsabilité. Profiter de la misère, de la peur et de la crédulité de certains déjà opprimés par la vie et obligés de ployer l'échine. Encore et toujours. Une pauvre et horrible époque où le Mal prend toutes les facettes !

UNE FILLE PAS COMME LES AUTRES. TOME I. (TERMINÉ). Où les histoires vivent. Découvrez maintenant