CHAPITRE XLVIII.

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       DE

           PÉNIBLES

                             MOMENTS.

   Saül, derrière le volant de sa voiture attendait, patientait, attendait, patientait,... s'exhortait à prendre son mal en patience. Le temps passait, passait, passait et Wendy ne revenait point. Que devait-elle bien faire !? Que disait-elle au juste à Peter ? Et comment réagissait celui-ci ? Se montrait-il attentif et repenti ou plutôt récalcitrant et belliqueux ? De lui, rien ne l'étonnerait plus ! Et s'il faisait preuve de brutalité connaissant la franchise de Wendy qui ne devait guère mâcher ses mots !? Puis sans s'en rendre compte, un sourire lui échappa. Brutaliser Wendy !? L'homme qui le ferait n'était pas encore né ! Bizarre ! Même absente, il lui suffisait de songer à elle pour retrouver un peu de sérénité et de quiétude. Si seulement... Saül préféra ne point aller au bout de sa pensée. Pas de souhait pour le moment autre que désirer la guérison de son père. Lorsqu'il ira mieux, lorsque tout rentrera dans l'ordre, lorsque leur existence retrouvera un semblant de normalité il se permettra alors de rêver, de faire des projets, de se projeter vers un futur où Wendy sera à ses côtés... Pour l'instant, son père était sa priorité.

  Toutefois, il ne pourrait pas s'empêcher de rêver en dormant. Après tout, le sommeil était fait pour ça...

   Il en était là de ses pensées lorsque Wendy réapparut toujours aussi fraîche et pimpante avec un sourire malicieux sur les lèvres. Elle avait dû malmener le pauvre Peter. Quoi !? Le pauvre !? Bien fait pour lui !

  - Alors, tu n'es pas venu à la rescousse malgré mon retard !

  - À la rescousse !? C'est Peter qui a dû passer un mauvais quart-d'heure !

  - Ça, tu peux le dire ! Et encore, il n'a rien vu !

   

******************

  Debout au chevet de Sébastien, le trio se consultait du regard pour répondre à la question du convalescent. Comment lui faire comprendre que son fils après qui il demandait refusait de venir le voir ? Wendy qui avait cru avoir poussé Peter dans ses derniers retranchements en l'acculant au mur avait espéré jusqu'à la dernière minute le découvrir à la clinique ayant accouru pour se jeter dans les bras de son père et solliciter son pardon. Vu sa réaction à la fin de leur conversation une telle chose lui paraissait un aboutissement normal et logique. Quelqu'un qui avait formulé le désir de partir en pleine nuit vers cette même clinique et ce même père qu'il avait fuis ne pouvait qu'accourir dès le lever du jour. Néanmoins, avec Peter, il fallait continuellement s'attendre aux surprises. Aux mauvaises, bien évidemment !

   Pourtant, cette fois, Wendy se trompait ainsi que les autres qui pensaient pareillement à elle car au même instant Peter poussa la porte de la chambre restée entrebâillée et pénétra à l'intérieur avec un gobelet de café à la main. Apparemment, il ne venait pas d'arriver. Il devait être là bien avant eux. Sa mine défaite et abattue, ses yeux cernés et ternes, ses yeux ébouriffés et pendouillants disaient son anxiété, son insomnie et sa peur. Tardive mais présente et apparemment sincère.

  Wendy s'écarta de Sébastien et invita les deux autres à en faire de même. Il était temps de permettre les retrouvailles entre le père et la brebis égarée. Wendy ne voulait point sortir car craignant la réaction de Sébastien qui devait être superbement remonté contre son renégat de fils. Son désir de se retrouver sur place se nourrissait de sa crainte de voir le père mal réagir et piquer une colère noire qui viendrait saboter tous ses efforts ayant abouti à un certain équilibre émotionnel. Le malade avait beau vivre une période d'accalmie, de calme convalescence, il risquait à tout instant de rechuter et de revivre cette détestable phase de déni, de refus de s'accepter, de marasme et de repli sur soi. Pour Sébastien, Wendy était prête à administer une bonne raclée à Peter mais pour l'instant elle préférait demeurer vigilante et espérer un beau dénouement. Après tout, le savon qu'elle lui avait passé la veille au soir devait sûrement donner son fruit. Ne serait-ce que par calcul, par pur intérêt personnel, Peter devait jouer son rôle de fils repenti.

UNE FILLE PAS COMME LES AUTRES. TOME I. (TERMINÉ). Où les histoires vivent. Découvrez maintenant