Riley - 2

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Le ridicule ne tue pas. Il n'a jamais tué personne. Allez Riley, tu peux le faire. Enfin, je crois. Me voilà devant la grille du Club des Angel's Melody, la boule au ventre et les mains moites. Mon cœur bat trop vite. Beaucoup trop vite. Je m'approche de l'interphone. Sérieux, ils ont un truc dernier cri en plus. Je ne pensais pas que ce genre de personne prenait la peine de poser un appareil tel que celui ci. J'inspire un bon coup et appui sur le bouton d'appel. Personne ne me répond mais le portail s'ouvre. Je rentre donc dans la cour et m'avance jusqu'à la porte du bâtiment à laquelle je toque. Un type blond, qui à plus l'apparence d'un surfer californien qu'un biker de Louisiane, m'ouvre et me détaille comme si j'étais un morceau de viande. Je déglutis nerveusement et serre mes doigts les uns avec les autres.

– C'est pour quoi ? Demande t-il, me faisant sursauter.

Allez Riley, courage !

– Je cherche un certain Deep. Dis-je, maladroitement.

– Pour quoi faire ? Lâche le blond alors que deux autres gars s'approchent.

– Je suis son frère. Murmuré-je presque, paralysé.

– Pardon ? C'est un blague ? Explose de rire le type.

– Non ... Ce n'en est pas une.

– Je suis mort de rire. Comme si on allait croire à un truc aussi débile. Casses-toi de là pauvre type. Ricane un autre.

Blessé et apeuré, je recule d'un pas. Bon, ça ne se passe pas bien. Vu leur tête, je me dis que forcer serait suicidaire. Alors je ramasse le reste de ma dignité et je fuis courageusement avec elle jusqu'à ma voiture. Premier essai, c'est raté. J'ai peur maman. Je pose mes mains sur le volant et laisse tomber mon front dessus. Je tremble de partout et j'ai des sueurs froides. Je ne suis pas un gars plein de confiance en lui. Je suis du genre timide, réservé et peureux. Aujourd'hui, ce que j'ai fais, c'était un exploit pour moi. Il m'a fallut de la volonté et beaucoup de préparation mentale pour venir jusqu'ici. Tout est détruit. Je vais devoir tout recommencer. Mais pas avant plusieurs jours. Je vais déjà redescendre de mon pic d'adrénaline en faisant quelque chose d'apaisant. Comme préparer mes futurs cours. Oui, voilà, je fais faire des fiches et des fiches de cours pour mes élèves. Je prend à la rentrée prochaine, qui se trouve être dans un peu plus de trois semaines. J'ai plusieurs niveaux, différentes thématiques à aborder et donc tout pleins de choses à préparer. Autant m'y mettre tout de suite. Et faire des cours, ça m'a toujours détendu. Mes amis trouve ça débile et chiant au possible mais c'est comme ça. Pour moi, plonger dans des bouquins et faire des recherches, ça me permet de me focaliser sur un truc et oublier tout le reste. En attendant, ça me permettra surtout de ne pas penser au fiasco d'aujourd'hui. Les jours suivants se résument à manger, bosser, dormir. Et comme je me connais, j'ai mis un tas d'alarme pour structurer ma journée. Pour les repas, pour se lever et même pour aller se coucher. C'est quelque chose que Ben m'a forcé à mettre en place quand j'entre dans ma « folie » comme il l'appelle. Parce qu'il m'est arrivé une fois, après une rupture, de me plonger dans une spirale de boulot telle que j'en oubliais les fondamentaux. C'est à dire manger et dormir. Ça faisait presque quatre jours quand Ben s'est pointé chez moi pour voir pourquoi je ne lui répondais pas. Il a littéralement défoncé la porte d'entrée. Après, j'ai eu le droit à un secouage de puces en règle, une discussion comme si j'avais dix ans et un bon coup de pied au cul avant d'être forcé d'avaler un truc, d'être envoyé à la douche puis au lit. Le lendemain, j'avais au moins quinze alarmes de programmer dans mon portable et un mot de mon ami me disant que la prochaine fois, je les mets en route. Depuis, c'est systématique. Ma bulle, mes alarmes et tout le monde est content.


La deuxième et la troisième fois que je me rend chez les Angel's Melody pour rencontrer mon frère se passent comme la première, à peu de chose près. Seuls les types qui m'ouvre changent. Je mets à chaque fois plusieurs jours pour y retourner. Monsieur Courage, c'est moi ! Mais je n'abandonne pas pour autant ! Et la quatrième fois paye ! Un autre type baraqué m'ouvre. Ils le sont tous ma parole ! Contrairement à moi et à mon allure de crevette atrophiée. J'ai l'air malade et minuscule à côté de ces gars. L'homme me détaille et fait un signe du menton. Il ne parle pas mais je me contente de son geste comme invitation à expliquer ma présence sur les lieux. On inspire un bon coup, Riley, et au saute dans le grand bassin.

Angel's Melody - Le RecueilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant