CHAPITRE V : Le Lapin Envoie un Petit Bill

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Lorsque Cal avait ouvert les yeux, la première chose qu'il avait vu était un sourire jusqu'aux oreilles, non, l'habituel arc de sang qui cornait les lèvres de Louve

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Lorsque Cal avait ouvert les yeux, la première chose qu'il avait vu était un sourire jusqu'aux oreilles, non, l'habituel arc de sang qui cornait les lèvres de Louve. Il avait rampé loin d'elle, surpris et terrorisé. Il était encore peu sûr des intentions de la fille, mais en même temps, il était difficile de faire confiance à une personne qui pourrait le dévorer jusqu'aux os. Peut-être se ferait-elle un collier de ses dents ou un vêtement de sa peau. Mais au lieu de ça, elle lui avait lancé : « Il faut fuir. »

Cal l'avait suivie tant bien que mal; en tanguant encore sous les effets de la Brume. Louve était rapide. Elle se faufilait entre les obstacles sur les routes, grimpait sur les voitures à l'arrêt, se balançait sur les feux tricolores et passait sous les rubans de police avec une aisance surhumaine. Son amulette et ses beloques aux chevilles cliquetaient en accompagnant ses déplacements. Le vent balayait son visage plein de terre et faisait trembler les plumes de sa tenue. On aurait dit que le Royaume de Brume était une jungle, mais il ressemblait énormément au monde réel et Louve, elle, semblait totalement hors du commun. 

« Où est-ce qu'on va ? » Cal avait rassemblé ses maigres forces pour poser la question, d'une voix tremblante.  

Des Monstres Cornus et des Monstres Neiges se promenaient encore à pied, en voiture, ou même en bus sans remarquer leur présence. Contrairement à leurs mouvement lents et fatigués, comme des chenilles qui rampent au sol, ceux des étrangers étaient pressés. En levant les yeux au ciel, Cal pouvait observer l'Œil qui les scrutait. Son iris était passée du blanc au rouge, ce qui plongeait la ville dans des nuances de couleurs chaudes, comme dans un four. Louve avait entrainé le garçon devant une cabine téléphonique. Un Monstre Cornu était à l'intérieur, combiné sur la tête, entre les deux yeux. À leur vue, la créature avait disparu dans un nuage de poussière. Louve avait tiré le garçon à l'intérieur et avait refermé la porte à la hâte. Elle lui faisait un peu mal, mais il avait peur de pousser la moindre plainte.

Il lui fallait cependant engager la conversation d'une façon ou d'une autre s'il voulait obtenir des réponses. « Samouraï a insinué qu'il connaissait Alice, tout à l'heure... pareil pour Sirène. Est-ce que toi aussi ? » commençait Cal. 

Le regard que lui avait lancé Louve traduisait un message clair : ce n'était pas le sujet le plus approprié à la situation, pardi ! Ils étaient sûrement coursés, traqués et pourchassés comme des criminels par des samouraïs-de-Brume, et sans doute, par le Royaume entier ! Le garçon pouvait bien admettre qu'il aurait fallu s'intéresser aux intentions de Louve, à celles de Samouraïs, il aurait fallu demander si elle voulait le dévorer ou au contraire, le protéger. Il se rendait compte qu'il ne devrait sûrement faire confiance à aucun de ces gens. L'ambivalence de leur comportement, tantôt menaçant, tantôt accueillant avait fini par l'embrouiller. 

Mais alors, comment survivre ?

Dans une ultime tentative, Cal avait tiré les peintures d'Alice de sa poche et les avait montrés à Louve : « Regarde. C'est chez toi, le Royaume des Loups. Et ici, c'est le Royaume des Eaux, celui de Brume et le Royaume des Sorts. » Il essayait tant bien que mal de lui faire comprendre l'absurdité de la situation. Aussi incroyable que cela puisse paraitre, toutes les peintures correspondaient au Pays de l'Ailleurs. Louve les avait attrapés et les observait avec ébahissement. On aurait dit un animal auquel on aurait montré un tour de magie. 

Alice au Pays de l'AilleursWhere stories live. Discover now