Chapitre 4

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— samedi 21 octobre —

Les vacances ont commencé hier, ça veut dire que j'ai le temps de travailler plus longtemps.
Cette nuit, comme toutes les autres depuis le début des vacances, je n'ai pas dormi du tout. En même temps les nuits d'avant j'enchaînais cauchemar sur cauchemar et ça donne plus envie de dormir. Dans tous mes cauchemars je vois ma mère ne pas survivre, je nous vois pas gagner assez d'argent pour la sauver, ou alors je la vois mourir après une opération ratée. Ça me fait mal et me rend anxieux de ne pas la sauver. C'est pour ça que j'ai décidé de prendre un autre travail, j'ai repéré un bar pas loin de chez moi, ils demandent des barmans et je suis plutôt fort pour ce qui est maniement d'objets ou d'armes. Je serais bien requis pour ce job je pense, je vais déposer mon CV aujourd'hui sur le chemin du resto. Normalement, je devrais croiser personne que je connais, comme un certain Smith, ce qui me rassure.

Mais cette fois-ci, je ne préviens pas ma mère. Je sais très bien qu'elle me laisserait jamais avoir un deuxième job. Mais je commencerais vers 22h et finirait vers 5h du matin. Vu qu'elle est fatiguée à cause de la syphilis, elle s'en rendra pas compte car elle dormira quand je sortirais. C'est plutôt Kenny dont je me méfie. Il reste souvent éveillé jusque tard comme moi donc il faudrait que je trouve un moyen de sortir en douce de chez moi.

En partant chercher le pain ce matin, je passe par le bar et dépose mon CV. J'attend patiemment la réponse qui ne devrait pas tarder. Lorsque je reviens ma mère me questionne sur mon temps, étonnement long, pour aller chercher du pain. Je lui répond juste que je me suis arrêté pour caresser un chat qui passait par là. Elle ne me pose pas plus de questions et se fait des tartines. Le reste de la journée, je me contente de travailler (mes cours cette fois-ci).

— mardi 24 octobre —

J'ai eu ma réponse hier, je suis embauché dans ce fameux bar et j'ai fait ma formation. Mon vrai début commence cette nuit. Mais je vais aussi essayer de m'entraîner en terme de discrétion. Depuis la dernière fois que j'ai vu Erwin au resto, je me suis beaucoup plus renfermé. Je veux absolument pas qu'il découvre qu'on a besoin d'argent. Ni même Hange bien qu'elle sache déjà un peu mieux comment je vis. Pour la tenue que je vais porter au bar, je pense que je vais prendre la chemise noire avec le veston rouge de la dernière fois mais cette fois-ci avec un pantalon noir basique.

La nuit arrive vite et alors qu'il est 21h, je me prépare à y aller. Mais avant de ma changer je passe faire un bisou à ma mère et je retourne dans ma chambre, innocemment. Lorsque je suis prêt, je descend. Le salon est silencieux comme une église, ce qui est bon signe. Je marche tout doucement vers la porte quand je tombe sur Kenny qui me voit. On se regarde tous les deux pendant quelques secondes avant de trouver tout type d'excuses de pourquoi nous sommes là. Il commence à me gronder alors je lui avoue tout. De toutes façons, peu importe ce qu'il me dit je prendrais ce job. Mais il est plutôt compréhensif, ce qui m'étonne beaucoup. Il m'avoue également qu'il sort pour travailler, ayant un passé criminel, il fait un peu le boulot d'un tueur à gages, mais sans buter, juste avec les poings.

On le fait tout les deux pour aider maman, les frais de guérison sont putain de cher alors on a pas trop le choix. On se quitte devant la maison, prenant tous les deux des chemins différents. Au bar je me débrouille très bien, je travaille jour et nuit et ma mère n'est toujours pas au courant.

— lundi 6 novembre —

Pendant ces deux semaines, je n'ai quasi pas dormi. J'ai encore enchaîné les cauchemars et en plus avec les cours et les deux boulots ça devient dur de suivre la cadence. J'ai des cernes monstrueuses que je tente de cacher avec du correcteur liquide emprunté à ma mère. Je me prépare pour la rentrée et à mes amis que je vais devoir retrouver. Lorsque je me dirige vers l'école, je m'endors presque dans le bus et manque de près de rater mon arrêt. Je passe à mon casier sans attendre Hange, comme à notre habitude, et je trace directement en classe. Je suis l'un des premiers avec une meuf dont je m'en fous. Je m'installe au fond de la classe et sors mes affaires puis me repose un peu. J'entends en fond les voix d'Hange et d'Erwin. Ils s'arrêtent près de moi et me parlent. Je lève la tête vers eux et ils font des têtes comme si j'étais un monstre (pas que j'en suis pas hein mais bon).

- Mon dieu Levi, t'as dormi cette semaine ?! T'as vu tes cernes ?! Me dit Hange, choquée de ma tête d'enterré.

Erwin, lui, se contente de me fixer, sachant très bien que quelque chose ne va pas. Il me dit quelque chose uniquement avec la bouche et sans le son « on en reparlera ». Putain mais il fait chier avec ça ! Je compte rien lui dire. Le prof arrive et ordonne à tout le monde de s'asseoir. Hange s'assoit près de moi tandis que Erwin s'assoit à côté de son pote, Mike. Le prof commence son cours pendant que je sens que je m'endors. Alors que je suis accoudé à la table, ma tête posée sur ma main et mes yeux fermés, le prof frappe sur sa table ce qui me fait sursauter. Il me foudroie du regard et me demande de quoi nous parlions. Je reste sans voix alors que certains camarades rigolent de mon inattention. Le prof soupire et me demande d'aller au tableau. Je me fige sur place, j'imagine déjà tous leurs regards posés sur moi. Les élèves qui rigolent, qui me jugent. Le prof me presse alors que je me lève doucement de ma chaise, anxieux. Il commence à me poser des questions sur le sujet, questions que je n'écoute pas tellement l'anxiété me monte. Ma respiration se fait plus rapide, je commence à transpirer. Je vois les deux salops qui m'emmerdent depuis le début de l'année, chuchoter sur moi mais très peu discrètement histoire que j'entende bien. Ce qui m'enfonce encore plus. Je suis paralysé, incapable de parler ou bouger. Le prof commence à s'impatienter et à m'engueuler ce qui me bloque encore plus. Les autres élèves rigolent. J'en peux plus, je sens que je vais m'évanouir.

- Mais monsieur vous voyez bien qu'il va mal ! Il est paralysé, faites quelque chose au lieu de l'engueuler !

C'est Erwin, il me défend. Le prof me fixe et remarque enfin que je ne vais pas bien et me dit d'aller m'asseoir. Je regarde Erwin qui me regarde et me sourit, je lui fait un hochement de tête, signe de reconnaissance pendant qu'Hange me tient la main pour m'apaiser. La journée continue et les tensions s'apaisent un peu ce qui me rassure et me redonne la motivation pour continuer à travailler pour ma mère.

Une vie basiqueWhere stories live. Discover now