Chapitre 8

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— samedi 24 février —

Cela fait maintenant une semaine et quelques jours qu'Erwin est en couple avec cette meuf que j'ai juste envie d'étrangler à chaque fois que je la vois. Chaque fois que je suis là, elle le prend et l'embrasse en vérifiant bien que j'ai tout vu. Hange essaye de me rassurer ce qui marche peu mais je la suis tout de même reconnaissante d'essayer. Hange c'est mon amie depuis le CP. Lorsque j'ai commencé l'école, les autres enfants étaient méchants avec moi parce que j'étais « différent ». Ça m'a beaucoup complexé qu'on me traite différemment, surtout quand les autres parents comprenait que ma mère était une prostituée. Il la jugeait alors qu'elle n'avait que 23 ans. Et les autres gamins se moquaient de moi parce que je n'avais pas de père. Et puis j'étais assez violent et sauvage avec les autres élèves. Hange était la seule fille qui avait osé venir me parler. Même après que je l'ai mordu. Elle me souriait toujours. C'est là que j'ai compris que pas tout le monde était des salopards sur cette planète. Ça m'a fait regagner un peu espoir.

En CM1, je me faisais principalement harceler parce que je ressemblais à une fille. On me le dis encore un peu des fois. J'ai toujours détesté ça. Les autres enfants me demandaient ce que j'étais et quand je répondais un garçon ils me disaient « t'as trop l'air d'une fille pour être un garçon » et après ils rigolaient. Hange, elle, me défendait contre ses cons.

Pourquoi je repense à tout ça moi ? Je suis en train de bosser au resto, j'ai du dormir 4 heures en tout depuis que Jessica et Erwin se sont mis ensemble. Je suis fatigué mais trop déprimé pour dormir. Après mon service je reçois ma paie. Avec Kenny, on a créé un compte bancaire réservé au frais de guérison de ma mère. On en a parlé avec elle et je crois qu'on a presque atteint le budget.

Une fois rentré à la maison, Kenny rentre dans le compte l'argent que je lui passe et il m'annonce avec un grand sourire :

- On l'a fait ! On atteint le budget ! Kuch tu vas pouvoir te faire guérir !

Il saute du canapé et il nous fait un gros câlin. De base j'aime pas ça mais savoir que ma mère va se faire guérir et l'une des plus belles choses qu'il peut arriver dans ma vie ! Adieu la souffrance de ma mère, adieu la maladie !

Le jour J arrive et nous sommes à l'hôpital. Ma mère est transférée dans une chambre et nous restons des heures à attendre, stressés et heureux de ce qu'il est en train de se passer. Nous avons travailler dur pour ça et nous espérons clairement qu'elle aille mieux. J'ai prévenu Hange qui est très heureuse pour nous.

Cela fait maintenant 5h que nous attendons que les médecins aient fini. L'un des médecins sort enfin et se dirige vers l'accueil pour dire quelque chose. Il vient vers nous et Kenny et moi nous levons en même temps. Il nous regarde. Un blanc se pose entre nous. Puis il baisse les yeux et hoche un non de la tête.

C'est pas possible...

Je peux pas la perdre, elle...

Kenny et moi restons figés sur place, essayant de bien comprendre ce qu'il s'est passé. Le médecin nous annonce qu'on peut venir la voir une dernière fois. Nous entrons et la regardons. Elle est là, posée dans le lit d'un lieu qui aurait pu la sauver, qui aurait dû la sauver. Elle est là, les yeux fermés, morte.

Je me sens presque partir aussi, mes muscles me lâchent et je tombe par terre. Kenny ne montre aucune tristesse mais je sais qu'au fond il est aussi affecté que moi. La femme que j'aimais le plus au monde me quitte maintenant. Je l'embrasse sur le front et Kenny fait de même. Les médecins nous sortent alors que j'essaye de crier, de me débattre, de pleurer...
Mais rien ne sort. Rien apart un visage livide. Je n'ai aucune réaction face à sa mort qui m'a pourtant détruit de l'intérieur.

Une vie basiqueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant