Chapitre 4

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— Il y a beaucoup trop d'Alphas dans cette pièce.

— Et pas assez de femmes !

Julie déboulait de la cuisine, une bouteille de vin dans chaque main et un paquet de chips coincé sous le bras. Jasper la suivait, encombré par des assiettes remplies de bâtonnets de légumes crus et de sauces. Juan sourit à sa meilleure amie. Ils n'étaient pas restés brouillés longtemps après la Révolution Équitable, mais ses fonctions pendant cinq ans l'avaient rendue assez peu disponible. Dès son retour à la vie normale, elle avait monté un parti politique pour continuer à défendre les droits des Omégas, mais elle ne souhaitait plus se mettre sur le devant de la scène, pas avant plusieurs années dans tous les cas, préférant être salariée du parti pour en gérer la communication. Elle était donc beaucoup plus disponible pour ses amis, et depuis deux mois que Juan habitait avec Jasper, Markus et leurs enfants, elle avait été plus présente que jamais auprès de lui, allant parfois jusqu'à rester dormir avec lui lorsqu'il se sentait trop seul et triste. C'était la première fois qu'il voyait Christopher et Rémi depuis longtemps, en revanche. Les enfants de ce dernier étaient chez leur mère, retournée vivre et travailler aux USA depuis quelques années. Les enfants avaient préféré rester avec leur père, mais faisaient le trajet vers chez elle à chaque vacances scolaires. Rémi travaillait toujours pour le Palais Présidentiel, dont il coordonnait les équipes de sécurité. Christopher gérait la fondation qu'il avait créé avec la fortune de sa mère, saisie par l'état lors de la Révolution. Son salaire n'était pas élevé, mais il logeait dans un des foyers pour jeunes homogenres de la fondation, lorsqu'il n'était ni chez Rémi, ni chez Samir.

Juan fronça le nez. Il trouvait vraiment que trois Alphas c'était trop. Leur phéromones, pourtant parfaitement contrôlées, lui piquaient le nez. Jasper s'installa entre lui et Markus, qui sirotait un verre de vin en allaitant son bébé, ce qui ne cessait de l'étonner. Il avait pourtant eu les explications sur le fonctionnement de l'allaitement et le taux d'alcool dans le sang, mais le voir en direct était toujours surprenant. Jasper glissa une main dans ses cheveux bleus et l'attira vers lui, lâchant une bouffée de phéromones apaisantes rien que pour lui. Juan ferma les yeux et inspira, avant de se lover contre son ami.

— On devrait vous prendre en photo. La presse adorerait. « Jasper Tahéal, défenseur des Omégas pour mieux les collectionner » je vois ça d'ici, s'exclama Christopher, amusé.

— Tu dis ça parce que t'es jaloux de mon harem. Je débute juste, mais je suis certain que je peux avoir une jolie petite collection d'ici la fin du mois. Julie, tu veux participer ?

Pour toute réponse, un talon s'écrasa sur le petit orteil de l'Alpha, qui couina exagérément, et la jeune femme s'installa seule sur le vieux sofa, bière à la main. Markus gloussa et déposa le nourrisson dans les bras de son compagnon.

— Tiens. Voilà ta première mission de gestion de harem. Il a besoin d'une couche propre.

— Mais... Mon honneur alpha !

— Il est dans la salle de bain, rangé à côté des lingettes et de la crème pour le cul de ton fils.

Christopher et Rémi ricanèrent, bientôt suivi par les trois Omégas tandis que Jasper se levait pour s'occuper de son dernier-né. Juan remonta ses genoux et les enlaça, posant son menton dessus. Les yeux dans le vague, il cessa de suivre les conversations autour de lui. Il était tout tourné vers sa vie intérieure, comme de plus en plus souvent. Il se projetait dans les mois à venir, il s'imaginait avec un ventre rond, il s'imaginait avec son bébé, son miracle, à lui, au creux de ses bras et à son sein comme Yaël avec Markus, il imaginait les minuscules pyjamas et les adorables bonnets qu'il pourrait crocheter, et parfois il souriait sans raisons. D'autre fois, il ne pensait à rien. Du tout. Pendant longtemps. Comme ce soir, où il ne réussit à sortir de cette espèce de transe que lorsque Jasper revint et l'attira de nouveau contre lui en diffusant des phéromones apaisantes. Apaisantes, mais pas que, maintenant qu'il le réalisait. Légèrement possessives, mais pas d'une manière agressive. Juste assez pour qu'il se sente protégé.

RévolutionWhere stories live. Discover now