7. ELLE

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L'alarme de mon téléphone me force à ouvrir les yeux. Je palpe à l'aveugle la table de chevet à ma gauche afin d'éteindre ce satané réveil. Pourquoi ai-je programmé cette musique assourdissante pour me tirer du lit ? Enfin, quand je clique sur « Désactiver », le silence reprend ses droits. Je fais un effort pour ne pas sombrer dans les bras de Morphée, mais c'est dur. Emmitouflée dans ma couette, je maudis la vie. Mon matelas me semble si confortable, et mes oreillers si moelleux. Je ne suis pas du matin et, pourtant, en devenant tenancière d'un café, j'ai fait un choix de vie qui me condamne à me lever tôt pour le restant de mes jours. Qu'est-ce qui m'a traversé l'esprit en ouvrant le Shining ?

J'allume la lumière et tombe sur mon reflet dans le miroir se trouvant dans un coin de ma chambre. Quelle vision d'horreur. Mes boucles sont aplaties et rebiquent dans tous les sens suite à ma nuit. Mon sommeil a été agité. Je n'ai pas arrêté de rêver, la lune n'était pas pleine hier soir, et pourtant, certains cauchemars du passé sont venus me hanter.

D'ailleurs, je me suis réveillée aux alentours de trois heures du matin, en sursaut et en pleurs. Les larmes coulaient sans que je ne puisse les contrôler. Au travers, j'ai cru apercevoir une silhouette dans le couloir de mon appart.

Un homme vêtu de noir et masqué. Mon stalker.

Mais, quand j'ai regardé dans la direction du banc de rangement dans l'entrée après avoir clos les paupières deux secondes, il n'y avait personne, excepté Salem qui avait attrapé l'un de mes foulards accrochés au porte-manteau. Il le traînait derrière lui, ses griffes prises dans les mailles. Lui qui n'a jamais touché aux rideaux ni n'a abîmé le canapé. Il se débattait avec le bout de tissu comme si c'était une souris. Je l'ai disputé avant de me mettre debout et d'éteindre le lampadaire du salon.

Je me suis ensuite recouchée avec la boule au ventre. Avec cette crainte d'apercevoir au milieu de la pénombre quelqu'un. Mais à force de paniquer, d'imaginer mille et un scénarios, je me suis rendormie épuisée.

D'un bond, je me force à me mettre debout et me dirige vers la cuisine. Il fait encore noir, le soleil ne se lève qu'à huit heure. Dans un bâillement sonore, je prends un mug et le place sous la machine. Aussitôt le bruit du café qui coule brise la quiétude matinale. La routine. Deux tartines dans le grille-pain, le pot de miel sur la table, un couteau en main. Je m'installe à table après avoir allumé la lampe.

C'est à ce moment précis, dès que le séjour se trouve inondé d'une lumière douce que je me rends compte que quelque chose cloche. Mes yeux se posent sur l'évier, puis sur l'égouttoir.

Je n'ai pas fait la vaisselle, hier soir. Les forces me manquaient. Je tombais de fatigue, j'ai directement pris une douche avant de m'affaler dans le canapé.

La casserole dans laquelle j'ai fait bouillir l'eau de mes pâtes. La poêle à l'aide de laquelle j'ai fait rissoler les dés de poivron. L'assiette profonde qui contenait mon plat. Les couverts que j'ai utilisés. Le verre à vin auquel j'ai bu. Je passe le tout en revue, méthodiquement, comme si je perdais la tête.

Je n'hallucine pas. Quelqu'un a fait la vaisselle pendant que je dormais dans la pièce adjacente.

Le bruit des toasts qui, enfin grillés, sautent me déparalyse. Je sursaute, la main sur le cœur.

Soit je deviens folle et, somnambule, je me convertis en une vraie fée du logis. Soit un individu s'est introduit dans mon appart...

Et la probabilité qu'il soit encore là n'est pas impossible.

— Salem ? appelé-je, la voix enrouée par la panique.

Je saisis mon couteau à beurre, mais je le repose tout de suite sur la planche à tartiner. Il est à peine tranchant et, donc, inefficace pour me défendre contre une potentielle menace. À la place, j'opte pour un couteau à viande. Immense et contondant. Je ne l'ai jamais utilisé pour cuisiner.

Le Diable au cœur (DARK ROMANCE)Tempat cerita menjadi hidup. Temukan sekarang