19. Les limites

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D'après Katya, entre la clairière de la porte du couloir du temps et son village, il y avait moins d'une demi-heure de marche. La proximité des lieux ne garantissait pourtant pas leur sécurité, d'une part parce que la forêt était ensorcelée (preuve en était la colère des racines lorsque Maelle avait pénétré la forêt) et la seconde parce que les somnias en faisaient leur terrain de jeux dès la nuit tombée. En outre, Katya s'inquiétait du couvre-feu imposé par les autorités, car ses voisins donneraient l'alerte si la jeune guerrière était introuvable pour prendre son tour de garde.

- Un tour de garde ? Tu fais quoi exactement ? demanda Maelle en marchant aux côtés de Katya, tout en veillant à faire attention où elle mettait les pieds, maintenant qu'elle savait les racines mobiles et méfiantes.

- Je patrouille sur les remparts et parfois je sors pour anéantir les somnias qui sont trop près du village.

- Toute seule ?

- Bien sûr que non, se récria Katya. Personne ne va au-devant des somnias sans escorte. Nous sortons groupés avec un soigneur et d'autres guerriers. Les somnias sont des monstres féroces, connus pour être imprévisibles et puissants. Chaque sortie est dangereuse. Nous risquons nos vies pour protéger les Ecarlates.

Maelle eut beaucoup de respect et d'admiration pour la jeune fille.

- Les Ecarlates ? C'est le nom des habitants de ton village ?

- Tu te trouves ici dans le pays du Monde Rouge, ainsi qualifié en raison de la couleur de nos forêts. Les habitants sont les Ecarlates. Mon village est aux confins de ce pays. Disons, que nous sommes à la frontière et que nous la protégeons.

- Vous vous protégez des envahisseurs d'un autre pays ?

Maelle s'inquiéta d'arriver dans un pays en guerre.

- Ce serait plus simple, soupira Katya. Au moins, nous connaitrions nos ennemis et leurs pouvoirs.

Les filles sortirent de la forêt et se trouvèrent au bas d'une grande colline, au sommet de laquelle on pouvait distinguer les toits de chaumes d'habitations dépassant de remparts de pierre. Les trois lunes brillaient au-dessus de leur têtes et Maelle eut l'impression que la lune des illusions ondula, puis disparut pendant quelques seconde avant de réapparaître.

- Tu as vu ça ?

Bidule poussa un petit cri tout en sautillant plus rapidement vers le haut de la colline.

- Courons ! C'est mauvais signe. En général, c'est annonciateur d'une invasion.

Katya eu à peine le temps de finir sa phrase qu'une lumière d'un violet profond apparue dans le ciel nocturne. Cette étoile filante aurait pu fasciner Maelle, si tout ses sens n'étaient pas en alerte pour suivre le rythme de son amie. Le chemin était pentu et Katya lui demandait de suivre ses pas pour ne pas tomber dans les pièges cachés par les villageois.

L'étoile filante s'immobilisa alors, Maelle plissa les yeux : l'étoile luttait contre quelque chose pour arriver jusqu'à elles. Une paroi se dessina dans le ciel à la faveur de la lumière lila que dégageait l'étoile. Tel un mur de verre gigantesque, une barrière protégeait ce monde de l'étoile.

- Dépêche-toi, cria Katya. Tu admireras la force magique des Limites plus tard. La barrière ne tiendra pas longtemps.

Maelle se précipita et non sans effort, elles arrivèrent en haut du promontoire, juste devant les remparts du village. Aucune porte n'était visible.

- Où est l'entrée ? s'étonna Maelle.

Katya releva sa manche et découvrit un tatouage que Maelle reconnue. Sa tante Line avait immédiatement réagi quand elle l'avait aperçu, sans donner plus d'explications. En posant son poignet à même le bois des remparts, une petite porte étroite et ovale se forma.

Soudain, une détonation, comme un tir de canon retentit. Maelle se retourna : l'étoile avait réussi à forcer la paroi magique, qui se refermait puis disparut dans le noir. Soudain un second bruit sourd fit trembler sol et la forêt frissonna de toutes sa flore. L'impact de l'étoile ! Katya lui attrapa la main et la fit entrer dans le village. Derrière elle, Maelle vit disparaître le halo de lumière mauve au cœur de la forêt.

- C'était quoi ce truc ?

Katya posa son index sur ses lèvres pour intimer le silence à Maelle, avant de chuchoter :

- Un somnia. Ils viennent sur Eterae en passant par la barrière que tu as vue. Ce sont les « Limites » de notre univers. Elles nous protègent, mais il arrive que parfois des somnias les percent. Suis-moi sans bruit, nous allons chez moi et je ne souhaite pas qu'on te repère. Pour rester ici, il te faudra la protection politique de mon mentor, sans quoi les autorités pourraient décider de t'envoyer à la capitale pour avoir illégalement pénétrer dans ce village. Comme prisonnière, précisa-t-elle en avançant à pas de loup le long des remparts.

- Comme... Maelle déglutit.

- Chut ! Et s'ils apprennent que tu viens de Rêvalon, ils te tueront ! On y va ?

Pourquoi les habitants d'Eterea haïssaient-ils autant les terriens ? Elle voulait poser cette question, mais se mordit les lèvres pour ne plus parler. Le village était plongé dans une obscurité coupée par les rares lumières aux fenêtres des habitations. Les villageois fermaient leurs volets battants les uns après les autres avec précipitation. Était-ce dû au couvre-feu ou à l'impact de l'étoile qui s'étaient écrasée dans la forêt ? Katya rasait les murs et Maelle l'imitait le souffle cour. Bidule ne sautillait plus et restait également muet. Il s'était réfugié dans les cheveux longs de Maelle, plutôt que dans le col du pull de Katya et elle ressentait la chaleur de la petite boule de poils rose sur le haut de son crâne. D'une certaine manière, elle trouvait cela rassurant. Elles ne traversèrent pas le village mais longèrent uniquement les remparts, évitant ainsi les rues plus larges et les places désertes. Constitué de maisons mitoyennes pas plus hautes qu'un étage, le village avait un côté médiéval et inquiétant.

Des bruits de pas retentirent sur leur droite.

- C'est la garde des Limiteurs ! chuchota Katya. S'ils nous trouvent...

Elle ne finit pas sa phrase et indiqua dub menton une petite maison un peu bancale et à l'écart du reste des maisons mitoyenne. Son jardinet en friche était à l'abandon devant une porte à la peinture écaillées. Katya s'y précipita, ouvrit la porte et y fit entrer Maelle avant de fermer à clé.

Une fois à l'intérieur, Maelle pensa être en sécurité mais les pas de la garde se rapprochèrent. Elles restèrent dans le noir, sans bouger d'un cil. Bidule se pelotonna dans les cheveux de Maelle et Katya gardait les yeux rivés sur l'entrée.

Un garde donna des coups sur la porte.

- Katya ! Ouvre !

Cette dernière ne répondit pas tout de suite et poussa Maelle vers une armoire dans le fond de la pièce qui devait lui servir de salles à manger et de cuisine à la fois. Elle lui indiqua d'y entrer d'un geste de l'index et referma les portes sur elle.

Avaient-elles été découvertes ?

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Rdv vite pour la suite !

La cité miroirWhere stories live. Discover now