II - Le génie incompris

1 0 0
                                    

~~ Kiri ~~

Mon nom, c'est Kiri. Kiri Del Vardenstarg. Oui, c'est bien moi. Vous avez bien entendu. Vous vous trouvez bel et bien en présence du n°1 de l'école des gardes de la ville. Quoi ?!! Ce n'est pas pour ça que vous me connaissez ?!!! Je serais la risée de l'école de gardes ?!!! Le seul depuis des centaines d'années ?!!! Non, détrompez-vous. Ça n'est ABSOLUMENT pas le cas. Comment pourrais-je l'être alors que, demain, c'est moi qui suis demandé pour aider à protéger le prince ?... Oui ! Je vous assure que ça n'est qu'une rumeur. Bien sûr !

Vous savez, ça commence à devenir insultant...

Bon, assez discuté ! Il est temps de retourner en cours.


Là, tout de suite, j'ai « Généalogie de la famille royale ». Comme je connais déjà tout, je vais m'installer au fond, près de la fenêtre. Ainsi, je pourrai rêvasser tranquillement sur la journée de demain. Protéger le prince... C'est un rêve qui se réalise... C'est un véritable honneur que d'avoir été choisi. C'est une véritable fierté... Je n'ai pas intérêt à échouer !

Personne ne vient s'asseoir à côté de moi. Tant mieux : on ne viendra pas me déranger dans mes rêves. Après tout, je suis un solitaire moi.

- Eh ! Le bigleux ! T'es sûr que t'arriveras à reconnaître le prince demain ?!, me crie un élève.

La classe se met à ricaner, comme d'habitude... Mais cette fois-ci, même la petite Yûko qui, jusque-là, a toujours été neutre, affiche un sourire moqueur. Bon, je dois l'avouer : personne ne m'apprécie. Mais je le leur rends bien. Et puis, ils sont juste jaloux. Après tout, ils n'ont pas l'honneur de protéger le prince.

Le cours commence une fois que le professeur a repris son sérieux. Et moi, j'essaie de retourner dans mes rêveries. Le temps passe lentement, et quand la cloche finit enfin par sonner, je sors rapidement de classe, pressé de rejoindre mon cours d'option : Mathématiques. La majorité pense que ça ne sert à rien en tant que garde. Moi-même n'en vois pas l'utilité. Mais j'adore jouer avec les nombres.

Et, au moins, là-bas, c'est calme.


- Eh ! Looser ! Ne laisse pas entrer de voleurs cette fois-ci !

C'est au tour du couloir entier de se mettre à ricaner sur mon passage. La rumeur est fausse, je vous dis !! Ils sont juste jaloux ! Il n'y a rien de plus ! Vous ne me croyez pas ?! En fait, vous aussi vous êtes jaloux... C'est ça, hein ?

- Ce mec n'aura jamais son diplôme de toute façon, murmure un garçon à l'un de ses amis. Alors, à quoi ça sert de l'envoyer faire une mission de cette ampleur ?

- Pour lui redonner espoir peut-être. Ou alors parce que c'est la seule fois où il pourra approcher le prince d'aussi près...

Les messes basses et les rires moqueurs continuent de naître sur mon passage. Tous jaloux, je vous dis...


Bon d'accord, il y a peut-être une toute petite raison supplémentaire à ça. Mais, tout le monde peut faire des erreurs, non ? Alors pourquoi la mienne devrait-elle me suivre partout où je vais ?

Demain, c'est l'occasion de me racheter et de prouver à tout le monde que j'ai ma place dans cette école, que je ne suis pas simplement une encyclopédie sur pattes mais que j'ai aussi les qualités d'un garde.

Un seul et unique faux pas et je suis foutu. Je ne serai pas la risée de l'école mais celle de la ville si j'échoue à protéger le prince. Je dois réussir à tout prix ! Je leur ferai oublier l'épisode d'il y a deux ans !


On m'avait donné un poste de garde chez Madame Del Crystal. C'était juste pour une nuit, mais cette nuit-là, elle gardait de précieux diamants dans sa maison. Et il fallait absolument qu'elle les ait pour le lendemain pour un échange de la plus haute importance.

Une femme s'est présentée sous le nom de Madame Del Rosère. Son nom figurait sur la liste des personnes autorisées à entrer. Alors je l'ai faite entrer et l'ai menée jusqu'au salon. Puis j'ai rejoint mon poste.

La femme n'est jamais ressortie. Ou plutôt si. Mais par la fenêtre, les diamants dans son sac. Elle s'était débarrassée de sa robe et portait alors une tunique noire comme la nuit. Il s'agissait en réalité de Castle, la voleuse de châteaux. Et elle ne s'était même pas déguisée. Je veux dire par là qu'elle n'avait pas pris la peine de modifier son visage.

Et pourtant... Je ne l'avais tout simplement pas reconnue. Et ça, c'est parce que je n'ai jamais réussi à retenir le visage de quelqu'un. Pas depuis ce jour fatidique d'il y a douze ans : la seule personne que j'appréciais, sur qui je comptais et a qui je faisais confiance m'a trahi. Depuis, aucun autre visage que le sien ne reste dans ma tête.

Et on se demande comment je pourrais être garde un jour avec un tel problème. Mais il n'y a aucune raison que je n'y arrive pas. Demain, je le prouverai ! Et tous se tairont. Et tout redeviendra comme c'était par le passé, il y a plus de deux ans.

Aldn Ablas, Les Mondes MiroirsWhere stories live. Discover now