Chapitre 15

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— Bonjour à tous et à toutes ! Je m'appelle Léna, j'ai dix-huit ans et je suis l'Élue. Vous pensez sûrement tous que je suis un être maléfique assoiffé de sang et, en même temps, vous avez raison ! On vous l'a répété toute votre vie, que ce soit à l'école, à la maison, dans les livres... Et vous n'avez jamais eu de contre-exemple, à part ma génitrice, mais vous ne pouvez pas en souvenir à cause du sérum dont vous avez été victime. Je vais d'abord vous parler d'Elléa et de nos deux peuples. Au commencement, il n'y avait que du vide, pas de planètes... Seulement quatre éléments. Ces formes d'énergie ne cessaient de se battre sans aucun but. De leurs disputes naquit Elléa, un havre d'abondance où ils purent trouver une certaine harmonie. Chacun y avait sa place : l'Air en haut, l'Eau et la Terre au milieu, le Feu en bas. Des êtres vivants apparurent, adoptant en chacun une partie infime d'eux, leur permettant de le contrôler. Les oiseaux étaient les enfants de l'Air, les poissons étaient les progénitures de l'Eau, les chevaux étaient les fruits de la Terre et les dragons provenaient des flammes du Feu. Certains possédaient plus de pouvoir que les autres et furent élevés au rang de Gardiens des Éléments. Chacun était chargé dès sa naissance d'une mission : celle de s'assurer qu'ils ne meurent pas et de toujours les défendre, ainsi que le peuple des Créatures magiques. La vie était parfaite et la paix régnait en maître. Les Quatre Éléments se réunirent afin de concevoir un être capable de tous les contrôler : l'Homme. Il pouvait marcher sur ses deux pieds contrairement à la plupart des Créatures magiques, mais, comme ceux-ci, ils n'arrivaient pas à utiliser leurs pouvoirs jusqu'à leurs pleins potentiels. Leur cohabitation était normale, sans aucune hiérarchie entre les deux peuples. Adénis, un paysan un peu trop curieux, se prit de passion pour une nymphe du nom d'Hella. Il la suivait tous les jours et l'espionnait en secret pendant ses entraînements de Gardienne des Éléments. Ses facultés à se déplacer aisément dans les airs avec ses grandes ailes noires et à s'embraser complètement en l'espace d'une seconde par sa seule volonté avec le feu qui parcourait ses veines l'impressionnaient. Elle arrivait à évaporer tout un lac ou à enlever le peu de chaleur que son eau possédait, et alors à la geler. De plus, elle était l'une des rares personnes à apprivoiser les dragons, animaux magiques connus pour être les plus farouches et dangereux qu'Elléa n'ait jamais abrités. Elle réussissait par un moyen détourné de contrôler tous les Éléments en plus du sien : le Feu. Un jour qu'Adénis s'était assis sur une branche d'arbre instable, celle-ci se courba sous son poids, jusqu'à ce qu'il tombe et atterrisse devant Hella. Celle-ci s'arrêta dans son entraînement et lui plaça sous la jugulaire la flèche qu'elle tenait dans sa main. Honteux, il fut subjugué par sa beauté. Elle avait la peau hâlée et des petites taches de rousseur parsemaient le dessous de son nez. Ses longs cheveux blonds et fins étaient nattés et rassemblés dans deux chignons parfaits. Adénis n'osait pas parler, de peur de l'effrayer. Elle lui sourit en constatant qu'il ne voulait pas lui faire de mal et l'aida à se relever. Elle examina son visage pour étudier qui l'espionnait depuis tout ce temps. Le jeune homme avait une barbe naissante et la peau claire bien qu'il travaillât dans les champs. Ses mèches brunes lui arrivaient aux épaules et lui barraient la vue, ce qui l'obligeait à la replacer toutes les cinq minutes. Ces deux-là ne se quittèrent plus jamais. Elle lui enseigna le seul Élément avec lequel il avait du mal : le Feu. Elle lui apprit comment le manier afin qu'il puisse l'assister sans brûler sa maison et il l'aida en retour à s'occuper des animaux sans les carboniser. Il avait remarqué qu'elle les adorait à force de la suivre, et aussi qu'elle était assez émotive. Dès qu'elle en caressait un, cela la remplissait tellement de joie qu'elle les enflammait. Cela la brisait intérieurement, car elle se sentait mieux avec eux qu'avec les Créatures magiques ou les Humains. En effet, ces derniers n'avaient d'yeux que pour sa beauté et son corps, ce qui provoquait la jalousie des femmes. Lors d'une balade, ils eurent l'envie de se baigner dans l'eau d'une cascade au milieu de la forêt. Adénis enleva son haut et Hella, choquée, pointa son torse du doigt. Une imposante marque bleue avait pris place à l'endroit où se situait son cœur depuis qu'il avait reçu la visite des Quatre Éléments dans un rêve. Il s'agissait du sang qui coulait dans cette région de l'anatomie devenue et qu'on pouvait voir à travers la peau. Il l'avait déjà observé quand il commençait à ressentir des sentiments envers Hella et pensait que ça allait s'effacer avec le temps. Elle ôta sa robe et lui montra sa marque sous son sein, et il réalisa qu'un lien les unissait. Il lui dit de ne pas s'inquiéter et qu'ils faisaient sûrement partie d'une prophétie. Il ne croyait pas si bien dire. Hella rigola et Adénis l'embrassa. Il la souleva du sol et la porta jusque sous la cascade, tandis qu'elle enroulait ses jambes autour du bassin de son amoureux. L'eau ruisselait sur leurs corps nus et ils s'accouplèrent. Le temps sembla s'arrêter et laissa place au silence. Les animaux ne faisaient plus de bruit, les feuilles des arbres ne bougeaient plus. Même la houle de l'océan avait disparu. Pendant ce temps, des orages éclatèrent de partout dans Elléa. Les volcans crachaient du feu. La terre remuait et tremblait. Certains grands lacs gelaient et bouillonnaient en l'espace de quelques secondes. Au fur et à mesure que les va et viens s'intensifiaient, les événements se multipliaient et redoublaient de puissance sans s'arrêter jusqu'à ce que les deux amoureux atteignent le septième ciel. Une énergie impressionnante émana de leurs corps et les quitta pour parcourir le monde entier à la vitesse de la lumière et revenir. La vie reprit son cours et les catastrophes naturelles disparurent d'un coup, comme si elles n'avaient jamais eu lieu. Hella s'enleva de la verge d'Adénis, fatiguée, et posa sa tête contre son torse musclé. Il la porta comme une princesse et la ramena chez elle avant de se rentrer. Or, elle ignorait tout de lui. Les Humains pouvaient contrôler les quatre éléments, contrairement aux Créatures magiques, et se sentaient supérieurs à ce peuple, en inventant le racisme. Les parents d'Adénis avaient remarqué que son attitude avait changé ces derniers temps et ils avaient décidé de le suivre jusqu'à ce qu'ils découvrent sa relation avec la jeune nymphe. La veille de leur rendez-vous, ils l'avaient obligé à l'humilier en la faisant tomber enceinte lors de leur première fois et en l'abandonnant dans cet état. Ils avaient, suite à leurs observations, étudié les moments propices pour la fécondation et l'avaient indiqué à leur fils. Ils partirent du village pour s'installer dans la capitale : Titanbeaum, où le chef de famille avait obtenu un poste auprès du gouvernement. Quand Adénis rentra chez lui, il fut accueilli tel un héros. Ses parents l'embrassaient et le serraient dans leurs bras en cessant de lui dire à quel point ils étaient fiers de lui et il leur sourit par politesse. Il se retira dans sa chambre, prétextant être fatigué et il pleura le reste de sa soirée en se remémorant les bons moments qu'ils avaient vécu ensemble. Hella quant à elle se reposait dans son lit, rayonnant de bonheur. Elle s'endormit, le sourire aux lèvres. Le lendemain, elle se rendit chez son amoureux pour passer du temps avec lui comme tous les jours. Elle se retrouva stupéfaite quand elle découvrit sa maison, vide de tout mobilier et de toute présence, qu'elle soit animale ou humaine. Elle entra dans sa chambre en se disant que c'était une plaisanterie, et ramassa une feuille par terre. Elle l'ouvrit et lut : « Je ne me suis jamais aussi bien amusé avec une fille. PS : Je ne t'ai jamais aimé. — Adénis. » Elle cria, folle de rage, et le papier s'embrasa. La maison tout entière brûla lentement, jusqu'à devenir un immense brasier. Elle prit peur et arrêta les flammes. Elle appela un cheval venu tout droit des entrailles d'Elléa et vécu dans les bois. Au fil des mois, elle constata que son ventre grossissait et fut sûre d'être enceinte quand elle sentit un corps bouger. Elle pleura des mois, désespérée à l'idée d'élever un enfant, seule. Elle décida de retourner au village, dans la maison d'Adénis. Ce dernier avait entre-temps été renvoyé du lycée où il étudiait pour des problèmes de comportement. Il était toujours amoureux d'elle et était devenu dépressif. Il avait été détruit quand ses parents lui avaient annoncé qu'ils avaient réécrit sa lettre où il avouait pourquoi il partait. Il était alors tombé dans la drogue, l'alcool et les jeux à dix-sept ans. Mais ce soir-là, il avait décidé de se ressaisir et de revenir dans son village pour rejoindre la femme de sa vie. Celle-ci, au fil des mois, avait changé considérablement de comportement et était devenue plus susceptible, colérique, voire mauvaise. Elle ressemblait désormais à un démon. Quelques mois plus tard, la grossesse arriva à son terme. Elle logeait dans l'ancienne chambre d'Adénis et se trouvait là, les jambes écartées et le cul à l'air, en train de soupirer et de respirer bruyamment, les mains posées sur son bas-ventre. Adénis entra et entendit Hella crier. Il monta les marches des escaliers à toute vitesse et, à chaque pas qu'il faisait, sa marque le faisait souffrir. La douleur devint insoutenable quand il arriva devant la porte pour constater que le travail avait déjà commencé. Des larmes coulèrent sur son visage et il les essuya rapidement. Il l'aida à pousser et une mignonne petite fille naquit en pleurant. Il s'avança pour l'enlacer, mais Hella lui agrippa le bras et le jeta contre le mur. Il hoqueta de surprise et cria quand ses os claquèrent avec violence. Hella posa son enfant sur son lit et s'approcha dangereusement d'Adénis. Celui-ci essaya de reculer, mais fut rapidement bloqué par le mur derrière lui. Il lui demanda, effrayé, ce qu'il se passait. Elle lui répondit qu'il l'avait abandonné. Il lui expliqua que la lettre qu'elle avait lue ne venait pas de lui, mais de ses parents qui n'aimaient pas les Créatures magiques et n'avaient pas accepté sa relation avec elle. Hella le regardait tout en essayant de se calmer. Elle ferma les yeux et une larme coula. Tu mens... murmura-t-elle, la gouttelette tombant au sol. Quand celle-ci toucha le plancher, la marque d'Adénis s'ouvrit en entier et il se mit à saigner abondamment. Hella, choquée, redevint normale et se précipita vers lui pour arrêter l'hémorragie. Malheureusement, il était déjà trop tard. Elle pleura, lui caressant les cheveux, et le laissa choir. Elle se dirigea ensuite vers son bébé et chuchota « Je suis désolée ». Sa marque explosa au visage de l'enfant et Hella mourut. Sa descendance grandit et vécut une histoire d'amour similaire : elle tomba amoureuse de son âme sœur, tomba enceinte de lui et mourut presque en même temps que lui. Le scénario se répéta alors pendant des générations jusqu'à la naissance de ma mère. À partir de ce moment-là, les règles ont changé.

Léna rendit le microphone à son père, qui reprit la parole.

— Merci Léna ! Nous tenions à vous raconter cette histoire qui a vraiment eu lieu, afin que vous connaissiez l'origine des Élues, longtemps chassées d'Elléa. On dit qu'elles sont à moitié ange et démon, puisque les Créatures magiques sont plus sauvages que les Humains, étant donné qu'ils vivent dans la nature. Elles possèdent des pouvoirs plus puissants que n'importe qui d'autre. Comme les Créatures magiques, elles communiquent avec les plantes et les animaux. Elles pénètrent également leur esprit et les contrôlent, à la manière des Humains. Nous allons passer à la deuxième étape du discours. Je vais maintenant vous raconter pourquoi La Grande Bataille a eu lieu en commençant par l'histoire de sa mère.

— Non !

Le bâtiment tremblait et une ombre transparente traversa la salle jusqu'à Gregor en criant furieusement. Ce dernier ferma les yeux, horrifié, tandis qu'elle le toucha et disparut avec lui. Tout le monde était choqué, en particulier Léna, qui regardait son père, émue.

— C'était... ?

— Maman. Répondit-il en finissant sa phrase.

FIN

The Chosen One(s)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant