Les Larmes de l'Ikebana

Mickaël

  Une fête, hein ? Je ne me souviens même pas à quand remonte ma dernière fête... La fête pour mon dixième anniversaire, je crois. Mouais... C'est assez médiocre, mais on s'y fait avec le temps - l'âge forme la sagesse, même si cette phrase n'a aucun rapport avec mon sujet !- Aussi, ma grand-mère n'a jamais été quelqu'un qui soit forcément enchantée d'apprendre que son petit-fils participe à ce genre d'événement, et cela continue encore aujourd'hui, malgré le fait que j'ai seize piges et que dans deux ans, elle voudra sans doute me virer de l'appart avec un joli coup de pied dans le cul tout en jetant sur ma pauvre tronche mes maigres valises. Je me retrouverais alors dehors, à pleurer ma mère comme un gamin de cinq ans.

  Tout en ne cessant de penser à cela, je monte les quelques marches qui me séparent de l'appartement. Enfin, elles sont pas mal nombreuses tout de même ! Et il n'y en a jamais une qui a pitié de moi. Pourquoi notre immeuble n'est pas doté d'un ascenseur ! Rah ces feignants de mécaniciens !

  Une fois la ligne d'arrivée en vue, je pousse un long soupire de soulagement, parce que j'ai été pas mal crevé par la journée, notamment aussi par le handball que je fais en association dans le lycée. Ils sont tous nuls, mais je ne dis rien, de peur de les faire pleurer, ces pauvres mecs à fleur de peau.

  Je finis par entrer en poussant la porte, la langue pendante comme un chien. En me voyant dans cet état, cela alarme ma grand-mère qui vient m'apporter une gamelle d'eau - pas littéralement bien sûr ! Je suis pas un chien tout de même ! - que je bois d'une traite. Elle m'aide à m'asseoir sur l'un des sofas du salon et part reprendre ses activités de tricotage comme si de rien n'était. J'observe ses mouvements rapides et secs et peux comprendre quelques mots qu'elle marmonne. Quand elle fait ça, je sais qu'en réalité, elle s'adresse à moi, par rapport au fait que je peux vraiment me montrer imprudent parfois.

- Grand-mère... Tu sais que tu n'es pas obligée de t'inquiéter autant pour moi... J'suis grand, je sais me débrouiller !

- Mais oui... Bien sûr... Je te crois mon petit qui arrive à rentrer à l'appartement en m'apportant une odeur aussi désagréable !

- Grand-mère ! J'ai seize ans, bientôt dix-sept ! Alors il faut bien que je m'occupe de moi-même !

- On croirait entendre ton crétin de père à ton âge !

  En entendant cela, j'affiche une grimace. Finalement, pour changer de sujet, je prononce d'une toute petite voix :

- Au fait, tu sais David ? Il organise une fête et...

- Tu aimerais bien y aller, c'est ça ?

- Bah... Ouais...

- Je n'aime franchement pas ce type... Mais vas-y, donc ! Mais je te préviens, si je te retrouve dans un sale état, mon coco, tu vas passer les pires minutes de ta vie !

- Ça n'arrivera pas, Grand-mère !

- Et prends une douche avant, parce que sinon, ce n'est pas moi qui vais t'interdire d'aller à cette fête mais l'hôte et les invités !

- J'allais le faire, Grand-mère !

  Qu'est-ce qu'elle est chiante parfois ! Et aussi cassante... M'enfin, je peux enfin avoir la liberté que j'avais tant envie depuis plusieurs années à présent !