Partie 1

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Elle ouvrit les yeux, elle avait la vision floue, elle ne savait plus où elle se trouvait. Ses sens lui revenaient peu à peu, elle sentait l'odeur forte de l'éther évaporé qui s'était mélangé à l'air. "Un hôpital ?" pensât- elle, ses souvenirs appuyèrent ses pensées : j'ai eu une crise, je suis sûrement à l'hôpital.

-Elle s'est réveillée! Cria l'infirmière.
Une vielle dame qui avait transformé sa belle peau naturelle en une peau dépigmentée avec des taches énormes. Le tout ressemblait à un gros bol rond rempli de morceaux de pain cramés, trempés dans du lait.
Le docteur s'approcha, en marchant lentement avec ce tic de remonter la monture de ses lunettes qui glissait sans cesse sur son nez. Il était un ancien interne des hôpitaux, un vrai génie en chirurgie cardiothoracique.

- Bonjour Mme Kane, comment allez-vous? Je vais vous faire un check up complet, ensuite je vais essayer répondre à toutes vos questions. Dit-il.
Avec l'aide de l'infirmière il fit son check up.

-Mme, tout va bien dit-il, si vous avez des questions je vais essayer d'y répondre.
-Je me souviens que j'ai eu une crise, répliqua-t-elle. Depuis combien de temps suis-je ici? Docteur?
-Un mois Madame, vous étiez dans le coma.
-Un mois! S’écria-t-elle. Des larmes coulèrent de ses yeux bridés, elle pensa à sa famille et à toutes les tortures par lesquelles cette dernière est passée.
-Ne vous inquiétez pas Madame, tout est rentré dans l'ordre, vos jours étaient comptés et vous le saviez, votre cœur était souffrant, il vous restait peu à vivre, mais Dieu soit loué, on a pu vous trouver un cœur pour vous le transplanter et votre corps réagit bien avec.
- Moussa, va être content de savoir qu'un avenir radieux nous attend aujourd'hui.
Le médecin réagit tardivement par un sourire forcé. Pourquoi cette lente réaction? Parce qu'il savait que tôt ou tard ma grand-mère apprendrait la bonne ou mauvaise nouvelle. Bonne ou mauvaise parce que le choix du qualificatif de cette nouvelle ne dépendait que d'elle.

-Et il y a encore mieux Madame, vous êtes enceinte.
Il ne pouvait pas garder cela pour lui, cette femme couchée devant lui était si radieuse, avec ce mélange de bonheur et de larmes. Il savait que cet état d'âme, que ce bonheur pouvait basculer à tout instant et il voulait que ce sourire persiste encore plus longtemps.

-Oui, vous êtes enceinte d'un mois et une semaine, insista-t-il. Vous étiez enceinte de 3 semaines lors de la greffe.
-Al Hamdoullilah ! Cria-t-elle. Aujourd’hui c'est le plus beau jour de ma vie. Docteur, quand pourrai-je sortir?
-On va vous garder maximum une semaine de plus pour voir l'évolution de votre état général.
-J'ai hâte de sortir, répliqua-t-elle
Une semaine passa et ma grand-mère, Aicha Ly, alla chez sa mère pour se reposer un peu.
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-Bonjour docteur!
-Bonjour Mr Ka, comment allez-vous? Et Mme Kane?

Babacar Ka était le meilleur ami de mon grand-père, c'était un homme élancé, de teint clair, charismatique, génie en informatique, il a cheminé avec mon grand-père depuis la classe de Terminale. On le reconnaissait à sa voix rauque puissante, ce qui avait poussé ses amis à le surnommer HP, pas la marque de matériel informatique mais plutôt l'outil informatique: haut-parleur.

-Tout va bien docteur, je suis ici pour vous demander votre avis par rapport à un sujet auquel vous vous attendiez sûrement.
-Mr Ka, je savais que tôt ou tard ce moment allait arriver. Je sais qu'on ne peut pas s'empêcher de lui dire la vérité. Le problème c'est comment aborder le sujet sans qu'elle ne le prenne mal?
-Comme vous l'avez si bien dit, il y a un risque parce qu'Aicha est enceinte, mais il y a aussi le fait qu'elle pose beaucoup trop de questions qui pourront nuire à la fausse information que nous lui avons donnée. Cependant Moise-le surnom de mon grand-père- avait tout prévu continua-t-il. Moise avait laissé une lettre pour elle, je pense que lui remettre cette lettre est la meilleure des choses à faire, car seuls les mots de Moise, pourront apaiser la souffrance que va probablement causer cette nouvelle.

Le docteur lui donna son approbation en faisant confiance en cet amour saine et extraordinaire que Mme Kane porte et portera toujours envers Mr Kane parce qu'il n'y a rien que cet amour qui pourra faire voir à cette dernière le bon côté des choses.

Mon grand-oncle Babacar quitta l'hôpital et se mit en route vers la maison maternelle de son ami Aicha Ly.

-Babacar, ce n'est qu'aujourd'hui que tu te décides à me rendre visite depuis ma sortie d'hospitalisation? Ou plutôt depuis mon réveil ?
-Ne dis pas cela toi aussi, répliqua-t-il. Tu es ma sœur préférée, je vais me rattraper ne t'inquiètes pas.
- On verra bien, dit-elle avec le sourire aux lèvres.
-Au fait Babacar, ton ami n'a même pas cherché à me joindre, même s'il est en voyage au moins il peut appeler sa femme. Est-il même au courant de mon réveil?

-Il l'est, c'est lui-même qui m'envoie, Il m'a demandé de t'accompagner à Kazemizu et de te donner quelque chose.

Ma grand-mère était un peu choquée elle savait que ce lieu était presque un temple aux yeux de son mari, elle savait que quelque chose de sérieux l'attendait.

-C'est sûrement important, alors allons-y, dit-elle.

Babacar conduisait vers Kazemizu, sans piper mot. La route était longue et le déplacement a duré une trentaine de minutes, trente minutes de silence, des heures aux yeux des deux amis.

-Marée basse, c'est excellent! dit Aicha pour briser la tension.

Babacar répliqua en hochant la tête. Les deux descendirent de la petite falaise. Arrivée vers la rive, Aicha contempla encore une fois cet endroit magnifique. Elle se rappela de sa première venue ici, c'était il y a tout juste trois ans. Elle se rappela des crabes, des oursins, de la couleur du massif, des roches, des pêcheurs, des plongeurs, des vagues qui s'heurtaient à ces mêmes roches avec une force indescriptible, un endroit extraordinaire connu par peu de gens. L'eau qui ruisselait en glissant entre les ouvertures naturelles d'une plaine miniature de roches et d'algues, rendait ce lieu unique au monde en faisant sortir ses différentes couleurs. Un endroit qui ne dévoilait sa véritable beauté qu'en marée basse, à l'heure du crépuscule. Éblouie par la beauté de ce lieu qui n'a rien perdu de sa valeur, ma grand-mère avait oublié pendant un cours instant la raison de sa venue ici.

Babacar lui fit signe de s'asseoir et elle le fit, il la rejoignît et lui tendit la lettre, elle la prit.

-je vais la lire à haute voix, dit-elle.
-Ne t'en fais pas, cela ne me regarde d'aucune manière, répliqua-t-il.
Elle hocha la tête et ouvrit la lettre:

« Chère Aicha,

Je suis tellement heureux que tu puisses lire cette lettre, car cela signifie que tu as lutté de toutes tes forces pour survivre et que tu as accepté ce cœur que le bon Dieu a voulu t'offrir. Sûrement tu as hâte de revoir ce visage qui te manque tant et qui t'as d'une manière ou d'une autre poussé à combattre la maladie de toutes tes forces, ce visage qui est le mien.
Je m'en excuse mais cela ne vas pas être possible pour le moment parce que j'ai fait une chose que tu arriveras peut être à me pardonner après avoir lu cette lettre. Aicha, j'ai tué..... »

Fin Partie 1

Poussière d'étoileWhere stories live. Discover now