Chapitre 2: Comment j'en suis arrivée là?

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Tricoter, c'est une passion depuis toujours, depuis que ma grand-mère m'a appris à tenir une paire d'aiguilles. J'avais 13 ans, et je savais déjà réaliser des petits pulls alors que mes amies ne pensaient qu'aux chanteurs des "New kids on the block". je ne dis pas que je n'étais pas attirée par eux, mais mon intérêt pour la laine était plus important que l'appel de mes hormones. De toute façon, en parlant d'hormones, j'incarnais le stéréotype de l'adolescente boutonneuse aux cheveux gras et aux ongles rongés. J'aurais pu passer le casting pour Biactol,  les lotions contre l'acné. Je portais des lunettes aux montures épaisses, loin d'être à la mode à l'époque et je m'habillais pour ne pas être nue. Les pulls jusqu'aux genoux et le carré court étaient ma panoplie de tous les jours. Je n'existais pas, ou très peu. J'avais le pouvoir d'invisibilité comme Harry Potter, sauf que moi, ce n'était pas voulu. J'avais peu d'amies, et encore moins de petit ami.  Le seul qui ait bien voulu de moi, c'était Mathieu...il n'était pas très beau mais il était gentil. Nous étions dans la même classe, souvent assis à côté en Chimie, et un jour nos mains se sont frôlées... il a mis un mois avant de me demander de sortir avec lui. Sortir est un bien grand mot...ça s'est résumé à un échange de bave de 2 minutes chrono en faisant attention à bien tourner la langue dans le même sens. C'était notre première expérience à tous les deux, et ce fut assez excitant. Il posa timidement sa main sur mon épaule et s'avança maladroitement vers moi, les yeux déjà fermés et les lèvres entrouvertes... la vision n'était pas des plus belles, mais j'ai fait la même chose. Mon cœur s'est mis à battre la chamade tandis que mon cerveau essayait de se concentrer sur la meilleure façon d'échanger ce baiser sans me faire passer pour une "pucelle". Oui, à cette époque, être pucelle signifiait ne jamais  avoir embrassé un être du sexe opposé.

Mes années collège restent un peu floues...ma seule amie s'appelait Cécile et à nous deux, nous pesions 150 kilos...les goûters à rallonge et les soirées pyjama à s'empiffrer de bonbons devant la télévision ne nous aidaient pas à nous sentir mieux dans nos corps d'adolescentes. Nous n'étions jamais invitées aux boums, et passions nos récrés à parler de nos acteurs préférés.

Un jour Cécile a déménagé, et je me suis retrouvée seule dans ma chambre. Whitney Houston chantait I will always love you  tandis que je me regardais pleurer devant le miroir. La morve au nez, les yeux gonflés par les larmes, j'étais désespérée. Qui ne s'est jamais regardé pleurer? On a toutes fait ça ! Et plus on se regarde pleurer, plus on est émue...jusqu'au moment où on se regarde de plus prêt pour découvrir qu'on a un énorme bouton blanc qui est en train de bourgeonner entre les deux yeux...et ça nous fait encore plus de peine.

j'ai passé l'été de mes 15 ans à faire de l'exercice pour lutter contre mon mal-être. La peine s'effaçait au rythme de ma perte de poids, c'est à dire, difficilement. je suis tout de même parvenue à m'affiner et faire ma rentrée au lycée avec une taille de pantalon en moins et un soupçon de confiance en moi en plus.

Au lycée, c'était un autre monde... Certaines filles portaient des Doc Martins aux pieds et des kilts très courts...elles étaient maquillées comme le chanteur de The cure,  fumaient des cigarettes toute la journée et prenaient un air très impliqué lorsqu'on évoquait la guerre civile dans un pays à l'autre bout du monde. Certaines étaient les clones de Rachel dans Friends, et d'autres étaient juste comme moi, transparentes. Mes années lycées passèrent aussi vite qu'une saison de Game of Thrones, en moins bien.

A partir de mes 16 ans, je passais mes vacances à travailler dans la boite de mes parents. La confection d'andouilles n'a plus aucun secret pour moi... mes parents sont artisans charcutiers depuis des générations. Ils envoient des colis d'andouilles à l'autre bout de la France tous les jours, ils ont même embauché quelqu'un pour s'occuper du service "colis sous vide".

Tu finiras seule...avec des chats. (Thriller Erotico-Comique)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant