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- On rentre chez moi après les cours ?
- Euh, je sais pas trop... je suis un peu fatiguée.
- Aller Aza, s'il te plaît ! Il faut que je te montre un truc !
- Quoi donc ?
- Un truc de ouf, tu vas pas le regretter, promis !
- Pas trop longtemps... ?
- Tu seras rentrée pour dîner cette fois !
- C'est pas ce que t'as déjà dit hier ça ?
- Cette fois c'est vrai, aller dit oui !
- Bon d'accord, mais pas tard.
- Youpiiii ! hurle Mickaël en se levant.
- Chut...

En montant dans la voiture de Mickaël, je sais que je fais une grosse erreur (sécher les cours de l'après-midi, conséquence : ma mère risque de me tuer), la prochaine fois j'y réfléchirai à deux fois pour ne plus me faire embarquer par Mickaël dans les bêtises.

Une quinzaine de minutes plus tard, la voiture s'arrête devant la maison de Mickaël, dos à la mienne. Personne n'est chez lui, ses parents travaillent et la femme de ménage a fini sa matinée.

Une fois dans sa chambre, il tire une petite boîte qui sent le chocolat de dessous son lit. Malheureusement pour moi, au moment où il l'ouvre, ce n'est pas du chocolat qu'il en sort mais une cassette, et mon walkman. Je reconnais la cassette, c'est celle d'Olivia...

- Mickaël... ?
- Je sais que je t'avais promis de plus en parler mais, attends au moins que je dise ce que j'ai découvert !
- Je ne veux pas savoir, je ne veux pas avoir à cette fille ! hurlais-je en sautant du lit.
- Aza... s'il te plaît...
- Non Mickaël, j'ai dit non ! Tu sais ce qui est arrivé à cette fille, tu voudrais qu'on sache qu'on était là-bas hier soir ! D'ailleurs, si ça se trouve tout le monde est déjà au courant.
- Personne ne sait rien et on a rien fait de mal de toute façon, dit-il en m'attrapant les épaules pour que je me rassois.
- Tu m'énerves Mickaël !
- Moi aussi je t'aime !

Il presse Play et la voix d'Olivia sort instantanément du walkman en disant : Je sais que tu vas t'y rendre si tu es un minimum curieux. En revanche si tu ne l'ais pas, je te conseille tout de même d'aller y jeter un œil (elle parle de la rivière, j'ai la nausée à cette pensée). La plupart du temps je venais me promener ici toute seule, après les cours ou le week-end. C'était mon petit endroit à moi, là où j'aimais me réfugier. Et puis ce soir de septembre, je t'ai vu. Il commençait à pleuvoir, je ne voulais pas rentrer chez moi mais j'avais froid. Tu es apparu dans mon champ de vision, sans que je t'aie vu venir et tu as posé ton manteau sur mes épaules. Je t'ai regardé longtemps en silence jusqu'à ce que tu me tendes ta main pour me relever. Je suis montée dans ta voiture, toute trempée et tu m'as raccompagné chez moi, je ne connaissais même pas ton prénom. Nous n'avons échangé aucun mot ce soir-là et je suis partie avec ta veste sans faire exprès. Ce soir-là, j'ai rêvé de toi, de nous, d'un future nous, peut-être. J'ignorais tout de toi et je ne pouvais m'empêcher de penser au jour où je te reverrai. Alors j'y suis retourné le lendemain mais tu n'es pas venu ni les jours qui ont suivi. J'allais en cours avec ton manteau, et le soir j'allais à la rivière mais tu ne t'ais jamais manifesté. Je t'avais presque oublié, pensant que tu ne reviendrais jamais quand tu as toqué à ma porte le soir de Noël. Je t'ai regardé longtemps, comme la première fois, ma mère m'appelait du salon pour me demander qui était là. J'ai enfilé ton manteau, celui que j'avais gardé de notre première rencontre et je t'ai suivi dehors, on a parlé, on a rit et tu es reparti sous les flocons blancs qui tombaient du ciel à cette période de l'année. Une fois encore, ton nom restait un mystère. Jusqu'à ce que tu réapparaisses le soir du nouvel an. Tu portais un nouveau manteau, et il était pratiquement minuit quand tu as sonné à la porte. Je suis venue t'ouvrir sans savoir que c'était toi. Tu as levé les yeux sur la branche de gui qui pendait au-dessus de nos têtes et tu m'as embrassé. Je me souviendrai toujours de ce baiser, c'était le plus beau de ma vie.

Mickaël éteint l'enregistrement et me regarde, je suis en train de pleurer, je ne sais même pas pourquoi je pleure à vrai dire, cette histoire est si touchante.

- Aza, je pense que tu devrais rentrer.
- Pourquoi ?
- Il faut que tu te reposes, tu as l'air exténué. On continuera un autre jour. Aller vient.

Il me prend par la main et nous descendons les escaliers, je traverse la route et lui fais signe avant de fermer ma porte et de m'affaler sur le canapé du salon.

Quand ma mère rentre du travail, elle me trouve endormie dans le canapé et me réveille doucement en me disant qu'elle va préparer le dîner.

- Tu as passé une bonne journée ? me demande-t-elle une fois que nous sommes à table.
- Oui ça était, et toi, comment c'était ?
- Hum, comme d'habitude, des clients chiants. Je ne savais pas que mon travail t'intéressait.
- Il ne m'intéresse pas, je m'efforce de faire la conversation.
- C'est un bon début.

Le reste du repas se fait dans le silence, je monte me coucher immédiatement après et m'endors presque immédiatement.

Il est plus de minuit quand l'alarme d'une sirène de police me réveille. Je me lève de mon lit et m'approche de la fenêtre, en tirant le rideau, la lumière bleue du gyrophare m'éblouit et des petits points noirs viennent me boucher la vue quelques secondes. Soudain, j'aperçois Mickaël sortir de la maison, menotté, un policier le tenant par le bras et ses parents qui accourent derrière, dans l'incompréhension. Je sors de ma chambre en cours hors de la maison pieds nus et en pyjama. Le policier est sur le point de faire rentrer Mickaël dans la voiture quand je l'intercepte pile au bon moment. Le policier tente de me dégager mais je le repousse.

- Aza, rentre chez toi, me dit Mickaël.
- Mickaël, qu'est-ce qui se passe ?
- Ce n'est qu'un malentendu, ils n'ont rien contre moi, fais-moi confiance.
- Mike...

Je n'ai pas le temps de poursuivre ma phrase que le policier baisse la tête de Mickaël pour le faire rentrer dans la voiture et ferme la portière en me disant de m'écarter.

Je sens une main se poser sur mon épaule, je me retourne et vois ma mère, elle me prend dans ses bras et me force à rentrer. Elle vient jusque dans ma chambre et me couche. Elle me chante une chanson tout en me caressant les cheveux, comme quand j'étais petite et me borde avant de s'en aller. Au moment où elle s'apprête à fermer la porte je lui demande :

- Tu penses qu'ils vont faire comme avec papa ?
- Non mon cœur, bien sur que non, ne t'inquiète pas pour ça, Mickaël va s'en sortir, c'est surement un malentendu.

Elle ferme la porte et des larmes roulent sur mes joues en silence. Peu importe ce que Mickaël a bien pu faire, il est innocent et je vais le prouver.

K7Where stories live. Discover now