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Je me réveille sur le canapé du salon, emmitouflé dans un plaid, ma mère à mes côtés. La soirée d'hier s'est terminée en pleurs jusqu'à ce que fatigue s'ensuive. J'ai beaucoup parlé avec ma mère et ça m'a permis de connaître un petit peu mieux mon père. Ma mère l'aimait, c'est indéniable et elle ne faisait que le couvrir de compliments.

Je me mets debout et pars dans la cuisine pour préparer le petit déjeuner. Je fais griller des tartines dans le grille-pain et les recouvre de confiture. Je sers du jus d'orange dans deux verres et apporte le tout au salon sur un plateau. Je secoue légèrement ma mère pour qu'elle se réveille et nous commençons à déjeuner.

- C'est toi qui as préparé tout ça ? s'exclame-t-elle.
- Eh bien, nous ne sommes encore que deux dans cette maison.
- Merci ma chérie.

Ma mère attrape une tartine et l'engloutit presque aussitôt avant de porter le verre de jus d'orange à ses lèvres.

- Hum, tu comptes faire quoi aujourd'hui ?
- J'ai quelques devoirs et je pense aller rendre visite à Mickaël cette après-midi, et toi ?
- Oh moi, rien de spécial !

Nous débarrassons et faisons la vaisselle avant que je monte m'enfermer dans ma chambre. Je suis bien décidée à enfin entendre toute la vérité d'Olivia, il le faut. Si Mickaël a fait quelque chose de grave, il faut qu'il en assume les conséquences.

Je m'habille et branche mon casque sur le walkman avant de relancer l'enregistrement.

Il est même venu me parler figures-toi ! Non mais quel culot, il est pratiquement venu me demander pardon à genoux le jour de ton enterrement. Je lui ai demandé comment il savait, il m'a juste répondu qu'il avait trouvé un carnet dans la voiture au moment de l'accident et qu'il savait tout de notre histoire. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'il est venu à l'enterrement, il savait qu'il aurait une chance de m'y croiser. Il m'a restitué le carnet que j'ai par la suite gardé avec moi, il est encore à ce jour dans ma chambre. Je lui ai promis de ne rien dire car je voulais que ce soit lui qui le fasse. Jusqu'à ce jour, il ne s'est toujours pas dénoncé mais j'espère qu'il le fera bientôt. Qui sait, peut-être que voyant que je ne suis plus de ce monde il va réfléchir ? Je ne dirais pas le nom de ce jeune homme ici, je ne le connais pas bien, je sais juste qu'il était dans le même bahut que moi et qu'il était un peu bizarre. Enfin bref, voilà, tu sais à présent toute l'histoire, je ne sais pas qui tu es et j'espère que tu ne m'en voudras pas. J'espère aussi que cette cassette ne finira pas oubliée quelque part, il faut que les gens connaissent mon histoire.

La cassette s'éteint et se rembobine. J'éteins le walkman et retire le casque. De fines larmes coulent en silence sur mes joues. Il faut que les gens sachent, ses parents. Je dois leur donner cette cassette, c'est à eux que reviendra le choix de faire ce qui leur semble être la meilleure chose à faire.

Je sors la cassette du walkman et la mets dans ma poche. Je descends les escaliers quatre à quatre et vais dans le garage. Je monte sur mon vélo et sors. Je pédale un peu au hasard avant de trouver la maison d'Olivia, que j'ai d'abord localisée sur Maps. Je toque à la porte, ne sachant pas trop à quoi m'attendre quand une femme ouvre la porte. Ses cheveux sont relevés en chignon et de larges poches cernent ses yeux rougis par les larmes.

- Oui ? me dit-elle en ouvrant la porte.
- Bonjour Mme Hogan.
- Vous êtes ?
- Je ne connaissais pas bien votre fille et je n'aurais maintenant plus d'occasion de faire sa connaissance mais j'ai trouvé ceci près de l'endroit où elle a été retrouvée morte. Je pense que vous devriez l'écouter. Elle raconte son histoire et pourquoi elle en est venue à cet acte, j'ai pensé que peut-être c'était à vous de juger quoi en faire.
- Merci beaucoup, me dit-elle en me prenant dans ses bras, Olivia ne nous a rien laissé avant de partir et c'est vraiment dur de ne pas savoir, j'espère que ça pourra nous apporter des réponses.
- Je l'espère aussi.

Je remonte l'allée et remonte sur mon vélo. Je pédale en sens inverse jusqu'à la maison de Mickaël. Je sonne à la porte et tombe sur la mère de Mickaël.

- Bonjour Aza, qu'est-ce qui t'amène ?
- Bonjour Suzanne, Mickaël est là ? Il faut que je lui parle, c'est important.
- Il est en haut.

Je rentre dans la maison sous le regard surpris de Suzanne et monte à l'étage sans me dégonfler. J'entre sans frapper dans la chambre de Mickaël que je trouve avachis sur son lit.

- Aza, que me vaut cet honneur !
- Ne joue pas à ça Mickaël, j'ai écouté la cassette, je sais tout. Il faut que tu ailles te dénoncer à la police.
- Ne me dis pas ce que je dois faire, je le sais déjà !
- Alors qu'est-ce que tu attends ?
- Tu as la cassette ?
- Non.
- Où est-elle ?
- Je l'ai donné à la mère d'Olivia.
- Quoi ? hurle-t-il en se levant brusquement de son lit.
- Tu as très bien entendu.
- Mais pourquoi tu as fait ça ?
- Elle a le droit de savoir, c'est sa fille !
- C'était.
- Quoi ?
- C'était sa fille, elle est morte !
- On dirait que ça te fait plaisir.
- Pas du tout !
- Alors pourquoi ne veux-tu pas te dénoncer, c'était un accident !
- Ah oui, tu étais là peut-être ?!
- Non, mais tu ne l'as pas fait exprès.
- Je l'aimais Aza, j'étais amoureux d'elle mais elle, elle ne me voyait pas, j'étais invisible à ses yeux. Ce soir-là j'avais bu, pas assez pour être ivre mais assez pour savoir que je ne devais pas prendre le volant. Je l'ai percuté, c'est vrai mais après j'ai fouillé sa voiture comme il n'avait pas de papiers d'identité sur lui et j'ai trouvé le carnet, une photo d'Olivia est tombée et j'ai compris. Alors j'ai pris le carnet et je l'ai laissé là. J'ai lu le carnet en entier et j'étais anéanti alors je suis allé à l'enterrement tout lui avouer, elle a promis de ne rien dire à la police mais elle ne voulait plus entendre parler de moi.
- Mickaël, il faut te dénoncer, si ce n'est pas toi qui le fais, alors ce sera moi.

Je sors de sa chambre en claquant la porte, dévale les escaliers et sors de sa maison pour rejoindre la mienne, pleurant de colère.

K7Where stories live. Discover now