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Je sonne à la porte des Miller plusieurs fois avant qu'on vienne m'ouvrir. Je tombe sur Suzanne, la mère de Mickaël qui a l'air épuisée comme peuvent en le témoigner les cernes sous ses yeux.

- Bonjour Aza, me dit-elle d'une voix endormie.
- Je vous dérange ? Je repasserai ça ne fait rien.
- Non non, entre, qu'est-ce que tu veux ?
- Que vous a dit la police hier soir ?
- Ils l'ont arrêté comme principal suspect dans la mort de cette petite qui s'est noyée, hum Olivia ?
- Oh... Mme Miller, je vous promets que votre fils est innocent.
- J'aimerais bien te croire Aza, pourtant ils ont des éléments à charge contre lui...
- Ils vous ont dit lesquels ?
- Non, ils ne nous ont rien dit...
- Mme Miller, est-ce que je peux monter à l'étage quelques secondes pour récupérer quelques affaires que j'ai oubliées hier ?
- Oui vas-y !

Je monte à l'étage rapidement et fouille la pièce du regard, j'aperçois le walkman et la cassette sur le bureau de Mickaël, je le glisse dans ma poche et redescends en vitesse. J'aperçois la mère de Mickaël dans l'entrebâillement de la porte, elle n'a pas bougé d'un centimètre et regarde dans le vide. Elle ne semble pas m'avoir remarqué.

- Merci Mme Miller, tenez bon, il va bientôt sortir, j'en suis sûre.
- J'aimerais te croire.

Je sors et elle referme la porte derrière moi, je ne me retourne pas et rentre chez moi, je monte les escaliers quatre à quatre jusqu'à ma chambre où je pose le walkman sur le bureau. Je repère mon casque sur le sol et vais le chercher. Je le branche dans le walkman et presse Play. La voix d'Olivia reprend là où elle s'était arrêtée :

J'ai attendu des mois, tu n'es plus jamais réapparu. Je tournais en rond dans ma chambre, je devenais folle. Tu n'avais pas le droit de jouer avec moi de la sorte. Le 17 mai, j'avais passé une mauvaise journée, c'était un jeudi, je m'en souviens très bien. Je me suis mise à pleurer quand je suis arrivée à la rivière, je ne pouvais plus m'arrêter quand une main s'est posée sur mon épaule, je me suis retournée, c'était toi. Je voulais te repousser, te hurler de t'en aller mais je me suis nichée au creux de tes bras pour continuer de pleurer. Tu me caressais les cheveux et ce simple contact m'apaisait. Ensuite tu m'as porté jusqu'à ta voiture que je n'avais pas entendue arriver et tu as pris le volant. Tu as conduit pendant quelques heures, je dormais sur le siège passager. Quand je me suis réveillée on était arrivés près d'une clairière où se trouvait une cabane en bois. L'endroit était à couper le souffle. Tu m'as conduit à l'intérieur et nous avons fini sur le canapé, une tasse de thé à la main en train de rire et de parler. J'étais heureuse parce que je t'avais retrouvé mais je me demandais quand est-ce que cet instant se terminerait pour laisser place au chagrin, le chagrin que tu me faisais éprouver chaque fois que tu partais. La nuit est tombée et nous nous sommes endormis sur le canapé. Au réveil, tu n'étais plus là. J'ai pris peur et je t'ai cherché partout. Tu es sorti de la salle de bains, une serviette autour de la taille, tout sourire et quand tu as vu que je pleurais tu t'es approchée et m'as pris dans tes bras. J'avais eu peur que tu te sois volatilisé, de nouveau. Quelques jours ont passé et il fallait que je rentre avant que mes parents ne soient morts de peur. Tu m'as raccompagné chez moi et tu ne m'as pas répondu quand je t'ai demandé quand tu comptais revenir. Je suis sortie de ta voiture le cœur amer et je suis rentrée sans me retourner. En entrant dans la maison j'ai entendu ta voiture redémarrer avant que mes parents ne viennent me prendre dans leurs bras en larmes.

J'ai arrêté la cassette en me demandant si Mickaël avait déjà tout écouté. Il fallait qu'il sache la suite. J'ai enfilé une paire de chaussures et mon manteau et j'ai pris mon vélo pour me rendre au commissariat. Une fois arrivée, un policier est venu me voir à l'accueil pour savoir ce que je voulais.

- J'aimerais parler à mon ami, Mickaël Miller.
- Mickaël Miller est suspect dans l'affaire Olivia Minez, vous ne pouvez pas lui parler tant qu'il ne sera pas mis hors de cause.
- Je vous en prie, il faut vraiment que je lui parle, c'est important.
- Oui aller, partez, il y a plus urgent que vous je pense, dit-il en regardant derrière mon épaule.

Je suis sa direction et remarque qu'il n'y a personne d'autre que moi dans le hall. Puisqu'il ne me laissera pas entrer il faut que j'y aille moi-même. Je pousse la porte menant aux bureaux et entre à l'intérieur. Au fond de la pièce, je vois Mickaël sortir d'une salle, menotté, je fonce droit sur lui en hurlant son nom. Il m'aperçoit et son visage change d'expression. Il est surpris de me voir là. J'entends le policier hurlé derrière moi mais n'y accorde aucune attention. Mickaël est remis en cage par le policier qui le suit. Il me regarde, je suis sur le point de craquer, il m'accorde cinq minutes et pas une de plus pour parler à Mickaël. Je me rapproche des barreaux et tant la main vers Mickaël qui me tend la sienne de l'autre côté.

- Qu'est-ce que tu fais ici ?
- Je suis venu pour t'aider Mike, je sais que tu es innocent.
- Aza, ils ont des éléments contre moi, je ne suis pas près de sortir.
- Qu'est-ce qu'ils ont trouvés ? Qu'est-ce que tu as fait ?
- Ils ont trouvé mes empreintes partout sur la voiture d'Olivia.
- Quoi ? Comment ça ? Pourquoi, tu... ?
- Écoute Aza, j'ai trouvé la cassette à l'intérieur, je ne savais pas ce que c'était ni que ça venait d'Olivia, je l'ignorais.
- C'est toi qui as cassé la vitre de la portière ?

Mickaël détourne les yeux et baragouine une réponse à peine audible.

- Je n'ai pas entendu.
- Oui c'est moi Aza, je suis dans la merde, mais je te promets que je ne l'ai pas tué.
- Les cinq minutes sont écoulées jeune fille, hurle le policier de son bureau.

Je me retourne et sors du commissariat en colère, j'entends la voix de Mickaël me répéter en boucle qu'il ne l'a pas tué. Je claque la porte pour ne plus entendre que le bruit des voitures dehors.

Cette affaire est décidément plus compliquée que ce que je pensais.

K7Where stories live. Discover now