10.

8 2 2
                                    

Le bip sonore de mon réveil me fait l'effet d'une claque et je saute du lit encore endormie. Je me suis posée des questions sur ce que Mickaël avait bien pu faire toute la nuit et qui m'avait envoyé le message de la veille. Je m'habille et descend à la cuisine prendre un petit déjeuner. Quand j'arrive ma mère est en train de mettre ses chaussures et s'apprête à partir.

- Je t'ai fait chauffer des tartines et j'ai sorti la confiture, me dit-elle en me voyant descendre les escaliers.
- Merci maman, bonne journée, à ce soir.

Je file dans la cuisine et me sers un jus d'orange avec mes tartines. J'aperçois le journal en coin de table mais ne m'attarde pas dessus sachant d'avance ce qu'il contient : l'affaire Olivia Hogan.

Je débarrasse la table et remonte me laver les dents et quand je suis prête je prends mon vélo pour aller au lycée. Je me suis habituée à y aller avec et maintenant, ça ne me dérange pas plus que ça. Le trajet est un peu plus long mais il n'en est pas moins agréable, je peux sentir le vent me décoiffer et faire marcher tout mon corps pour contrôler le vélo.

La journée passe longuement étant donné que les cours sont à mourir d'ennui et quand enfin, la dernière sonnerie de l'après-midi retentie je sors presque en courant du lycée. La cassette m'a obsédée toute la journée et maintenant, je me sens prête à entendre les révélations d'Olivia.

Je range mon vélo dans le garage et monte dans ma chambre. Je pose mon sac par terre et attrape la cassette qui se trouve là où je l'ai laissé la veille. Je branche mon casque au walkman et le place sur mes oreilles avant d'appuyer sur Play.

Les heures ont défilé jusqu'au petit matin sans aucune trace de ta personne. J'ai fini par m'endormir en guettant par la fenêtre. Je n'avais aucun moyen de te joindre et j'ai commencé à sérieusement paniquer. J'étais triste, je pensais que tu m'avais oublié jusqu'à ce que je te vois dans le journal, accident de voiture, mort sur le coup. Le conducteur qui t'a rentré dedans à appeler les urgences avant de se tirer et de te laisser. Aucune empreinte, rien. Tu étais mort. J'ai pleuré, beaucoup, pendant des jours, j'étais inconsolable. Mes parents ne comprenaient pas ce qui se passait étant donné que je ne sortais plus de ma chambre. Je suis allé à ton enterrement, j'ai rencontré certains membres de ta famille qui n'avaient pas l'air aussi anéantis que je l'étais et ça m'a rendu folle. Comment ces gens pouvaient-ils se pointer à ton enterrement sans la moindre émotion ? C'est aussi là que je l'ai vu, ton assassin, mais je ne le savais pas encore, car oui, je sais qui était le conducteur du véhicule qui t'a percuté.

Je stoppe l'enregistrement, les larmes aux yeux. Et si c'était Mickaël, et si c'était lui le conducteur qui a tué ce garçon, non, ça n'est pas possible, c'est impossible, Mickaël ne partirait pas de cette façon en laissant un cadavre.

Je sens ma tête tourner légèrement et je décide de l'appeler pour en avoir le cœur net. Il répond après trois sonneries :

- Oui Aza ?
- Qu'est-ce que tu as fait Mickaël ?
- Comment ça ?
- Ne joue pas à ça, réponds-moi !
- Tu as écouté la cassette ?
- Je n'ai pas terminé.
- Et où en es-tu ?
- C'était toi le conducteur ?
- Aza...
- Réponds-moi !
- Ma mère m'appelle, à plus !
- Mike, mike !!

Je hurle dans mon portable en entendant qu'il a raccroché. Je commence à fulminer de colère à l'intérieur de moi mais je n'ai pas envie d'écouter la fin de l'histoire d'Olivia. Quelques minutes plus tard j'entends la porte d'entrée claquer et ma mère m'appeler. Je dévale les escaliers et elle semble soudain surprise que je débarque si vite étant donné que je ne me pointe quasi jamais quand elle rentre.

Je l'aide à préparer le dîner et nous mangeons devant la télé. Comme c'est le week-end je reste avec elle au salon. Nous regardons une rediffusion d'un film que nous aimions beaucoup auparavant quand je me décide à aborder un sujet cher à mes yeux.

- Maman ?
- Oui chérie ? me répond-elle.
- Tu pourrais me raconter l'histoire de papa ?
- Oui ma puce, si tu veux l'entendre, dit-elle les larmes aux yeux.

Je la regarde et attend qu'elle se mette à parler.

- Bon, par où commencer, hum par le commencement j'imagine. Tu es prête ?

Je hoche la tête en guise de réponse.

- Ton père était un homme charmant et généreux mais ça lui arrivait quelques fois de boire un verre de trop avant de prendre le volant. Ce soir-là, on s'était disputés et il avait pris le volant pour aller je ne sais où. J'avais appris quelques mois plus tôt que j'étais enceinte de toi. J'imagine qu'il a fait la tournée des bars environnant et au moment de rentrer il a percuté la voiture d'en face. C'était un jeune de vingt-deux ans, il est mort sur le coup. La police à emmener ton père et l'a placé en garde à vue. Il est rentré à la maison en attendant de passer devant un juge et ne voulant pas – parce que c'était inévitable- aller en prison il s'est suicidé. J'avais retrouvé une lettre avec un bouquet de fleurs sur la table de la cuisine en rentrant du supermarché, ton père s'était pendu à la cave.

Ma mère s'arrête et je vois des larmes roulées sur ses joues. Je la prends dans mes bras, pleurant à mon tour.

- Je suis désolée maman, je suis si désolée...
- Tu n'y es pour rien trésor, me rassure-t-elle en me caressant les cheveux.

Un silence, comblé par le bruit de nos pleurs s'installe doucement.

- C'était des azalées, me dit ma mère après un petit moment.
- De quoi tu parles ?
- Du bouquet que ton père m'a laissé, c'était des azalées, c'est de là que vient ton nom.

K7Where stories live. Discover now