La routine

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*(Chapitre corrigé)*


* Décompte : 50 semaines à vivre. *

Peux-tu m'aimer ? Il me reste un an à vivre.

Comme chaque matin, lorsque mon réveil sonne, je me pose ces mêmes questions : Pourquoi ? Pourquoi continuer à me lever encore et encore si la vie a décidé que d'ici douze mois, je ne serai plus de ce monde ?

Le compte à rebours a commencé il y a déjà quelques semaines. Le docteur Stevens avait du m'annoncer que je suis porteuse d'une tumeur très grave au niveau de chaque poumons. Oui, je suis atteinte par le cancer. Il ne comprenait pas pourquoi les spécialistes ne l'avaient pas remarqué plus tôt. Pour lui, il était impossible de ne pas l'avoir aperçu bien avant.

Au fond de moi, à un an près, j'aurais sans doute préféré en finir directement. Ça m'aurait au moins évité d'avoir à entendre ce fichu réveil chaque matin à huit heures m'annonçant que je viens encore de perdre un jour d'existence dans cette misérable vie que je mène, ou plutôt que je subis.

Il est huit heures deux précisément. Comme à mon habitude, je me lève de mon lit, allume la cafetière, prépare ma tasse de café et la déguste paisiblement devant mon journal. Ensuite, comme l'indique mon programme organisé, à précisément neuf heures huit, je sors de chez moi pour me rendre au café du coin, afin d'y boire une seconde fois de ce breuvage, accompagné, cette fois-ci, d'un bon croissant ou bien d'un pain au chocolat, suivant mon envie.

Je dis bonjour au gérant ainsi qu'aux clients habitués avec qui j'ai souvent l'occasion d'échanger quelques sourires de temps à autres. Globalement, ma vie n'a rien d'intéressant.

Je n'ai jamais eu de petit copain, ni réellement d'ami en réalité, à croire que ce délais d'un an était prévu : je suis de trop dans ce monde et surtout, je ne m'y sens pas à ma place. Personne ne me regarde dans la rue, ni même ne s'intéresse à moi un dixième de secondes. Est-ce parce que c'est moi ? Ou est-ce la société actuelle qui veut ça ? Drôles de questions. J'en parlerai à mon cerveau une prochaine fois, histoire d'être un peu moins seule.

Enlever mes tumeurs ? Impossible. Ce sont deux grosses tâches qui logent sur chacun de mes poumons. Ce n'est même pas envisageable d'imaginer pouvoir me les enlever, sinon j'en mourrai probablement instantanément.

Mais... de toute façon, le jour où je quitterai ce monde, personne ne risquera de s'en rendre compte. Mes parents ? Je les rejoindrai simplement là-haut, plus tôt que ce qu'ils auraient voulu. Ils me manquent terriblement. C'était un tragique accident de voiture.

Parfois, j'aimerais que tout change. J'aimerais avoir des amis, un petit mari, un bébé, un chien et une belle grande maison près de la mer. Oui oui, je parle bien du rêve que tout le monde n'arrive finalement presque jamais à réaliser. Mais qui est vraiment heureux sur cette terre ?

Installée sur ma chaise, coté fenêtre, dans le café du coin, comme à mon habitude, j'ai finalement pris un pain au chocolat. Même si le café est rempli, tout le monde sait que cette place sera occupée de neuf heures dix jusqu'au moins dix heures. C'est ma routine de tous les jours et, encore... je crois que le plus passionnant vient d'être fait.

Je jette un coup d'œil vers ma montre : dix heures. Il est temps pour moi d'aller payer l'addition et de quitter cet endroit.

– A demain Rick.

– A demain Lise, me répond-il gaiement.

Oui, « à demain ». Je crois que je ne dois même plus lui demander ce dont j'ai besoin ; il le sait déjà et vient me l'apporter dès que je m'installe à ma table. Il change seulement parfois mon pain au chocolat contre un croissant si je suis d'humeur chieuse. Mais le client est Roi, n'est-ce pas Rick ?

La toute dernière fois.Where stories live. Discover now