Chapitre 17 | Partie 3 : Zebra Dun

89 20 1
                                    

HENRY

Une brise légère passa entre les pins rouges. Le ciel était dégagé, quelques nuages fins et blancs venaient du large. L'air était frais et apportait les embruns iodés de l'océan. Henry ouvrit difficilement la portière de la voiture. Le sel avait attaqué la carrosserie. 

Il sortit et s'étira. Ses vêtements étaient toujours mouillés, son dos était raidi par une vive douleur qui descendait jusque dans ses hanches, probablement causée par les vagues qui s'étaient écrasées sur lui. 

Il repensa à l'enfer qu'il avait vécu la veille. Pourvu que les autres aient trouvé un abri. Il regarda les branches et les troncs d'arbres qui étaient éparpillés sur la route. Ça avait été un véritable carnage... 

Il devait être sept heure du matin. A l'avant de la voiture, Will et Craig dormaient toujours. Il attrapa son coude d'une main et tourna ses hanches de gauche à droite pour essayer de débloquer son dos, vainement.

Il regarda autour de lui, découvrant l'endroit qu'il n'avait vu qu'à travers les larmes de pluie qui étaient tombées sur sa vitre toute la nuit. Il ne voyait que les étangs du nord et le petit village de pêcheurs à l'ouest. La mer était cachée derrière la colline où ils s'étaient abrités. Il sentit ses jambes reprendre peu à peu de la vigueur et décida d'escalader la colline. 

Il marcha lourdement jusqu'aux rochers. Son dos était si douloureux qu'il devait presque claudiquer, incapable de trop mouvoir ses hanches. Il essaya de s'étirer et sentit la douleur irradier son corps. Il monta tout de même les grosses pierres rouges et grises sur lesquelles de petits pins avaient poussés. 

Son ascension fut entrecoupée plusieurs fois par des quintes de toux sèche. Pourvu qu'il n'ait pas attrapé une pneumonie, pensa-t-il. 

Tout était encore humide, de grandes flaques d'eau subsistaient dans les creux des roches, mais le vent et le soleil chassaient lentement les nuages qui auraient pu les abreuver à nouveau. Au moins il ne pleuvrait plus de la journée. 

Lorsqu'il arriva au sommet de la colline, le spectacle qui s'offrit devant lui le laissa le souffle coupé. Une partie de la route menant au phare avait été détruite. Les pierres de la colline et les pins étaient tombés sur la terre battue. La majeure partie des arbres sur le banc de terre où il avait trouvé Will et Craig étaient maintenant couchés sur un sol couvert de débris. Il y avait des morceaux de bateaux et des caisses éparpillées çà et là. 

Son regard se porta sur la route. Sous les rochers, la mer s'était retirée, laissant apparaître une petite plage de sable où l'épave du bateau avait fini sa course. Elle était totalement renversée, sa coque était ouverte comme une plaie béante. Les rayons du soleil renvoyaient des reflets éblouissants dans certains endroits du sable et des tas de bois flotté autour du bateau. C'était le verre de bouteilles de whisky. 

Il remarqua alors trois hommes qui marchaient sur la plage, parmi les débris. Il reconnut Kenneth qui boitait et Paddy qui le dépassait de deux têtes. Le troisième au bout, ce devait être Raff. Au moins ils étaient vivants. Il tourna la tête vers l'est, pour essayer d'apercevoir quelques traces de vie du côté du premier feu. C'était beaucoup trop loin, il ne pouvait pas voir grand-chose.

Il redescendit la colline et alla taper contre la vitre de la voiture, réveillant Will et Craig en sursaut.

—Au boulot les gars. La route n'est pas praticable, on y va à pied.

Les deux hommes prirent leur temps pour se lever et il partit seul en avant, de sa démarche de vieil ours blessé, pressé d'en apprendre plus sur ce que les autres avaient vécu quand la grande vague avait frappé. 

PINEWOODOù les histoires vivent. Découvrez maintenant