Chapitre 18 | Partie 1: Lonesome Valley

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ARLETTE

Arlette se leva aux premières lueurs de l'aube. Le chien avait dormi contre elle, la réchauffant de sa fourrure épaisse. Alors que le ciel était encore sombre, elle rangea sa bâche et raviva le feu. Elle resservit du riz et des haricots froids au chien et s'en réchauffa un peu. 

La nuit n'avait pas été si mauvaise. Dormir dehors lui était finalement agréable. Bercée par le chant des insectes et la fatigue, elle n'avait été réveillée que par les merles. 

Elle préférait évidemment dormir sous un toit, habituée au confort de la vie moderne. La chaleur de ses draps lui manquait, tout comme une tasse de café et une part de tarte en guise de petit déjeuner, plutôt que la bouillie fade qu'elle se forçait à ingurgiter. 

La matinée s'annonçait radieuse. Les étoiles étaient encore visibles dans le ciel, et il n'y avait pas de brume. Elle aimait ces matins à Pinewood où elle descendait en bas alors que les premiers rayons du soleil perçaient à travers les arbres, et ouvrait la porte pour s'asseoir dehors en attendant l'arrivée d'Henry.

Le vent des montagnes s'engouffrait directement dans le passage tracé par la rivière et balayait la clairière de son souffle glacial. Arlette referma son manteau contre sa poitrine et regarda la cime des pins, rêveuse. 

C'était beau, paisible, silencieux. Elle avait envie de s'abandonner totalement à la nature, d'oublier tout d'elle-même, de ce qu'elle était et des hommes, pour retourner au monde sauvage. Mais plus elle le désirait, plus ses pensées retournèrent à Pinewood. Peut-être qu'elle n'était pas encore prête à embrasser le Wild, ou peut-être qu'elle ne l'était plus. 

Elle pensait à Henry. Parfois il venait plus tôt, alors qu'elle n'était pas encore descendue. Elle le trouvait sur le perron en train de regarder le soleil se lever. Il entrait dès qu'elle lui ouvrait et passait quelques minutes à lire le journal dans le salon alors qu'elle nourrissait le chien avant de s'asseoir au comptoir, juste devant elle, jusqu'à ce que Betty arrive. 

Étrangement, alors qu'elle venait de dormir au milieu des bois, c'était à cette présence qu'elle pensait en premier. Elle sentit ses joues et sa poitrine se réchauffer à cette simple pensée. Est-ce que c'était ce qui lui manquait le plus en cette matinée ? Non le café était important aussi, se raisonna-t-elle. 

Elle se changea les idées en allant au bord de la rivière pour se laver le visage. Elle tomba nez à nez avec une famille de renards qui passaient par de gros rochers pour traverser. En la voyant, ils s'enfuirent de l'autre côté de la rive. Elle les regarda disparaître dans les fourrés et se frotta la face. L'eau glacée brûla ses mains. Elle sentit la morsure du froid sur ses joues et ses yeux qui la réveillait définitivement. 

Elle prit une branche longue qu'elle utilisa comme perche pour déterminer la profondeur de l'eau. Il y avait largement de quoi passer à pied si le cheval n'était pas trop effrayé. Le chien en revanche était encore blessé et trop faible pour nager dans le courant. Elle le mettrait sur la selle ou le porterait elle-même.

Elle retourna seller la jument et sangler les sacs de part et d'autre de son dos. Elle repensa à cette tasse de café en imaginant le contact de la céramique brûlante entre ses mains. Et à Henry. 

C'était un type droit, qui jouait peut-être au cowboy solitaire, mais c'était quelqu'un en qui on pouvait avoir confiance. « Solide », c'était le premier mot qui lui venait à l'esprit en pensant à lui. Mais il avait aussi des défauts qui laissaient présager des temps plus difficiles pour elle. Il était trop ambitieux, trop rustre, et trop impérieux. Une fois qu'il en aurait fini avec Lloyd, il allait certainement vouloir prendre le contrôle total de Pinewood, pensa la jeune femme. Comme Louis, il allait se révéler sous un autre jour une fois qu'il aurait obtenu ce qu'il voulait.

PINEWOODOù les histoires vivent. Découvrez maintenant