2 : Ouvrir les yeux sur son mal-être

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(6.09) Rentrée.

PUTAIN DE MERDE C'EST LA RENTRATION (-Clare)

...

Il était trois heures sept du matin, et Elo n'arrivait pas à dormir, les pensées trop mélangées pour trouver le sommeil. Après la soirée catastrophique de samedi, elle avait passé le dimanche au lit ne ne sortant que trente minutes pour faire un petit jogging avant de se remettre au lit, histoire d'avoir l'impression d'avoir passé une journée productive. Mais depuis qu'elle s'était recouchée, elle n'avait pas réussi à fermer les yeux un seul instant.

Elle avait peur. Elle se demandait si Clare allait la laisser tomber, si son père allait tout dire, si tous les gens de son école étaient aussi sexistes que le gars de l'autre fois, si elle allait réussir à s'habituer à cette nouvelle vie mélangée à l'ancienne. Pour l'instant, ce n'était pas gagné.

Elle était triste, aussi. Elle pensait à Garance. Garance qu'elle avait critiqué sans arrêt avec Clare l'année dernière parce qu'elle passait du temps avec son copain. Garance qu'elle avait embrassée. Sept fois. Garance qu'elle avait touchée. Deux fois. Garance qu'elle avait aimée. Trop de fois.

C'était ça, le plus gros secret d'Elo. Elle aimait les filles, et les garçons. Enfin, elle aimait une fille et les garçons. Mais est-ce que pour autant elle était bisexuelle ? Elle essayait de ne pas se coller d'étiquette, même si son père l'avait 'gentiment' fait pour elle. Le soir du bal, Garance avait raccompagnée Elo chez elle. Elle lui avait alors expliqué que son copain avait compris qu'elle avait une liaison, et qu'il était sur le point de la quitter. Elle était triste, peinée, ravagée. Elle a dit qu'elle l'aimait, qu'elle était pas prête à le perdre, et qu'il fallait tout arrêter. Que sa famille, fervente catholique, ne comprendrait jamais. Alors Elo l'a embrassée, pour lui faire comprendre qu'elle n'était pas prête à abandonner, qu'elle l'aimait. Garance lui a rendu son baiser, puis elle a disparu. Le lendemain, Elo avait été bloquée sur tous les réseaux et Garance était partie pour son école d'architecture à Montpellier.

Et Elo a eu le cœur brisé. Mais ce n'était pas le pire.

Le pire, c'était que son père les avait vues. Il l'a traitée de 'gouine', de 'marie couche-toi là' et autres insultes qui lui ont donné la nausée. Elle a juré que c'était la première fois, que c'était pour tester, que ça ne se reproduirait plus jamais. À ça, il a répondu 'y'a intérêt ; sinon, je te jure que je dis tout à ta mère, à ton frère, à tout le monde.'

Tout le contraire de ce qu'Elo avait toujours espéré entendre.

Alors dans son lit ce soir-là, Elo pensait à toute cette histoire et se demandait si elle allait un jour réussir à comprendre ce qu'elle était. À comprendre qui elle aimait, et qui elle n'aimait pas. Pour l'instant, tout ce qu'elle savait, c'est qu'elle aimait encore Garance et que penser à elle lui faisait beaucoup trop mal. Mais bien sûr, elle ne pouvait en parler à personne.

Elle aurait pu le dire à sa mère, mais elle s'était sentie obligé de se taire après l'épisode de son père. Quant à Clare, elle avait beaucoup d'autres choses à penser. Gérer la sexualité de sa meilleure amie paumée ne devait pas en faire partie, du moins selon Elo.

Soudain, son portable vibra, l'extirpant de ses pensées. Elle se retourna et l'attrapa avant de constater qu'elle avait reçu une demande d'ami d'un certain pikachuattaqueéclair.

Intriguée, elle cliqua sur le profil et constata rapidement qu'il s'agissait de Léo. Son feed n'avait rien de celui d'un influenceur : on pouvait le voir avec un bob vissé sur la tête allongé sur un transat ou lancer une balle à son chien sur un boomerang Instagram, où l'animal le lui ramène aussitôt. Elo se prit à sourire devant certaines blagues qu'il faisait. Il avait peut-être le potentiel d'un futur ami, finalement.

EloWhere stories live. Discover now