Bellarke Hiatus

OneShot 4.5 - S'il y a bien une chose que je sais (c'est que je t'aime)

Partie 5

Bellamy est sûr qu'il perd peu à peu l'esprit et son reflet, dans le petit miroir de la salle de bain, est d'accord avec lui. Il a beau essayer de ne prêter aucune attention aux cernes violettes qui soulignent ses yeux rougis par le chagrin, ou à sa mine défaite et épuisée, rendue méconnaissable par sa nuit blanche, tous les signes indiquent qu'il va bientôt toucher le fond.

Il détourne les yeux de son propre regard et trempe le rasoir dans l'évier rempli d'eau avant de le tapoter doucement contre l'émail. Puis, il l'applique sur sa peau dans un geste rendu familier par l'habitude. Bellamy se rase chaque matin depuis l'âge de seize ans. La fin du monde elle-même ne pourrait pas l'empêcher d'effectuer cette routine quotidienne, pas même si la fin du monde signifie en fin de compte que son propre monde s'écroule lentement mais sûrement autour de lui.

Alors, pour ne pas y prêter trop attention, il fait ce qu'il fait chaque matin en se réveillant et se rase. De bas en haut. De sa gorge encore serrée par l'émotion jusqu'à la fossette de son menton. De sa mâchoire à ses pommettes, encore et encore. Chaque passage de la lame sur sa peau l'empêche de répondre aux questions que son esprit pose malgré lui.

Est-ce que Clarke va bien ?

Est-ce que Clarke va revenir ?

Est-ce que Clarke va lui pardonner ?

Clarke, Clarke et encore Clarke. Et si ce n'est pas la jeune femme qu'il a à l'esprit, c'est le fait qu'elle porte aujourd'hui leur enfant...

Que va-t-elle décider à propos de cette grossesse inattendue ?

Va-t-elle accepter qu'il soit là pour la soutenir, quelque soit sa décision ?

Choisira-t-elle de garder le bébé ?

Non, Bellamy refuse de répondre à ces questions, se concentre sur les poils rebelles que la lame n'a pas coupés, rince à nouveau son outil et recommence.

Cependant, son esprit est plus vicieux qu'il ne l'imaginait, et les questions reprennent de plus belle.

Comment s'organiseraient-ils pour faire de la place dans leur appartement ?

Déménageront-ils comme Bellamy l'espérait, ou attendront-ils la naissance du bébé pour se décider ?

Où dormira-t-il, dans ce cas ? Et est-ce un garçon ou une fille, d'ailleurs ? Et quels prénoms pourraient aller le mieux à l'un ou l'autre si-

Bellamy lâche un cri de douleur lorsque la lame entame la peau de sa gorge. Immédiatement, le sang se met à couler de la coupure et le jeune homme jure à voix haute devant sa maladresse. Entre sa blessure à la tête d'hier soir et ce matin, il n'a vraiment pas les idées en place, clairement désorienté par les derniers événements. Une bonne raison pour s'absenter de son travail, se dit-il en tamponnant la plaie à l'aide d'un linge humide et propre.

Il essaie de ne pas trop penser au fait que c'est d'habitude Clarke qui met un point d'honneur à le soigner à chaque fois qu'il se blesse ou est malade. Il applique un petit pansement sur la coupure et termine son rasage avant de rincer son visage à l'eau claire et d'ensuite se sécher à l'aide de sa serviette de bain.

Dans leur chambre, il fait le lit au carré, bien qu'il n'y ait pas dormi la nuit dernière, ayant préféré le canapé du salon pour ressasser ses pensées. Puis, il enfile un bas jogging usé et, peut-être parce qu'il est un peu mélodramatique et a besoin de se faire souffrir plus qu'il ne souffre déjà, attrape sous l'oreiller de Clarke celui de ses t-shirts que la jeune femme préfère, celui qu'elle a l'habitude de lui voler pour dormir ou juste lézarder le dimanche matin. Le tissu d'un bleu profond est doux sous ses doigts et, lorsqu'il le passe par dessus sa tête, une bouffée du parfum de Clarke lui parvient immédiatement. Son astuce fonctionne ainsi à merveille : Bellamy souffre définitivement plus à cet instant qu'une seconde auparavant.