Les Larmes Noires du Dragon Tome 1 - Écuyère /// v2/// Terminé

Chapitre 22 - Masque et chenil

Un quartier de lune plutôt rondouillard baignait la chambre de l'infirmerie d'une pâle lueur bleutée. Les étoiles étaient magnifiques, comme des diamants dans la chevelure d'une déesse céleste ou les pellicules dans celle de Maître Patelin.

Obscura s'était relevée et observait le ciel scintillant, accoudée à la fenêtre. Impossible de dormir. Cela faisait deux heures qu'elle se retournait dans son lit. Autant aller regarder la nuit, elle n'avait plus de médaillon à perdre de toute façon... Ses pensées vagabondaient. Elle songeait à Corbeau, à sa mère, à ses amis. À Melrius, aussi.

Elle inspira l'air froid en frissonnant. Ses mèches d'argent flottaient dans la brise et retombaient sur le col de sa chemise de nuit.

Soudain un craquement bruissa dans le jardin au pied du mur. Une silhouette noire et fugitive émergea des ténèbres des fourrés pour escalader la paroi. Elle grimpait droit vers elle, sautant de rebords en décorations, rapide et agile comme une ombre. Obscura referma la fenêtre à toute vitesse, tira les rideaux et se plaqua contre le mur à côté. Était-ce Melrius qui revenait finir son œuvre ? Songea-t-elle avec effroi, mais avant même qu'elle pense appeler à l'aide la chose à l'extérieur toqua contre la vitre.

Toc toc toc

Elle sursauta : trois petits coups discrets, suivis d'un silence attentif. Elle se précipita vers son épée. Cette fois, elle ne se laisserait pas faire !

Son sang se glaça lorsqu'elle entendit le loquet de la fenêtre s'ouvrit tout... doucement... sans le moindre grincement... Un dernier cliquetis et les rideaux se gonflèrent du vent nocturne. Un mouvement souple, un froissement de tissus et le son de deux bottes qui se posent sur le sol.

N'écoutant que son courage, Obscura se précipita en avant et l'arme levée, prête à se battre !

Elle tira sur le rideau pour dévoiler l'intrus et abattit son épée de toutes ses forces, contre le mur.

– Vous ne visez pas très bien, fit une voix amusée derrière elle. Mais d'ailleurs, vous n'étiez pas censée être clouée au lit ?

Obscura se retourna pour frapper de nouveau mais son bras fut stoppé par une poigne ferme et gantée. Face à elle, le visage de loup et barbouillé de suie du Chevalier de Poussière.

« Eh bien, est-ce ainsi que vous accueillez vos visiteurs ? ajouta-t-il avec un clin d'œil malicieux.

– Seulement ceux qui s'invitent par la fenêtre, rétorqua-t-elle. Elle rangea son arme, un peu vexée d'avoir été aussi facilement trompée.

– Je préfère toujours passer par là, cela colle mieux avec mon personnage. Ne trouvez-vous pas ?

Très à l'aise, le jeune homme s'approcha du grand meuble à pharmacie de doctoresse Kenmyr et entreprit de fouiller les tiroirs. Il les ouvrait un par un, jetait un coup d'œil curieux avant de le refermer pour passer au suivant.

- Mais qu'est ce que vous faites ? lui demanda-t-elle en croisant les bras sur sa poitrine. Vous comptez vraiment voler quelque chose devant moi ? Je vais être obligée de vous dénoncer.

– Pour dire vrai, je pensais que vous dormiez, répondit-il d'un air négligent. Je vous croyais malade et blessée, vous semblez aller beaucoup mieux, je suis infiniment ravi de l'apprendre. En revanche, si ma présence vous inquiète et qu'on vous pose des questions, vous pourrez dire que vous n'avez rien vu ni entendu et tout le monde sera satisfait.

– Vous croyez que je vais vous laisser faire aussi facilement ?

– Oh non, mais si nous en venons aux mains je m'en irais par le même chemin qu'à l'aller. J'ai l'habitude, vous savez, ajouta-t-il en continuant son exploration.