Chapitre 75 - Et après... suite

223 42 2
                                    


Trois semaines après ces trois jours plus tard, le vingt-sixième jour du mois de Mycosidor Quadriméal.

Edhel marchait d'un pas tranquille dans les rues bondées d'Essealis, son uniforme de garde impérial entrouvert de quelques boutons pour profiter de la petite brise. Il tirait parti d'une mission de messager pour flâner dans les avenues marchandes, passant distraitement en revue les couvertures de vieux livres d'alchimie dans la devanture d'un bouquiniste, quand un aboiement joyeux le fit se retourner.

– Corbeau, où étais-tu caché ? Rit-il en l'appelant.

Le loup faufila son fauteuil entre les jambes de deux promeneurs et trottina vers lui.

'J'ai bientôt fini. Dès que j'aurai livré le message, on rentrera en faisant un détour par la rue de la Tarte aux Tripes.'

L'animal jappa avec impatience. Il aimait cet itinéraire. Chaque fois qu'ils passaient par cette rue, Edhel lui offrait un petit quelque chose à l'une de ses nombreuses boucheries et triperies.

Soudain le loup se retourna. Aux aguets, les oreilles dressées et la truffe en pleine action, il traversa la foule pour s'arrêter face à la porte d'une brasserie. Il aboya poliment ; son maître le rejoignit et jeta à son tour un coup d'œil par la vitre.

C'était un restaurant plutôt renommé, où aristocrates et bourgeois de la ville venaient pour déguster des plats simples et savoureux, arrosés d'une très bonne bière locale, la Cuvée du Dessous de Pavé. Des serveurs filaient entre les rangées de tables, apportant choucroutes, blanquettes de mourlouton et tartares de patabuffle, pendant qu'un claveciniste déroulait une mélodie entraînante.

C'est alors qu'Edhel le vit.

Ergil courrait, un tablier blanc atour de la taille, transportant à bout de bras un plateau de larges chopes d'une bière blonde. Il ne portait plus son masque, mais il était presque méconnaissable tant son allure était différente. Il se tenait droit, la mine réjouie, lançant plaisanteries et clin d'œil, zigzaguant entre les clients sans renverser la moindre goutte.

Alors qu'il passait à côté de l'entrée, il croisa le regard d'Edhel. Ils se saluèrent, échangèrent un sourire entendu et reprirent chacun leur vie.

– Leurs andouilles à la mode de Marlanth sont un délice, ici, fit Thilas en s'approchant, les bras chargés de paquets. J'ai dépensé assez d'argent chez eux pour qu'ils fassent des ristournes quand je leur envoie de nouveaux clients. Tiens, cadeau.

Edhel attrapa le sachet que lui tendait le Chevalier. C'était un petit livre d'alchimie.

– Merci, Thilas, je ne l'avais pas encore lu, celui-là.

– De rien, de rien, répondit l'autre avec un geste désinvolte. Comme ça tu te sentiras redevable et tu m'apprendras enfin à faire un philtre de bonne humeur. Un qui soit indétectable, bien sûr, il ne faudrait pas que la patronne s'aperçoive de quelque chose.

Ils rirent et reprirent leur marche. Edhel rappela Corbeau qui geignait encore à la porte, espérant revoir celui qui l'avait chouchouté au chenil durant des mois. Il finit par se décoller de la vitre et rejoignit ses maîtres dans le silence des roues bien huilées.

✻ ✻ ✻

Les Larmes Noires du Dragon Tome 1 - Écuyère /// v2/// TerminéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant