Chapitre 9

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           Plusieurs jours s'écoulèrent avant que des ouvriers puissent nettoyer le château. Ils commencèrent par se frayer un passage pour récupérer tous les corps calcinés ou ensevelis. Peu de femmes du Donjon des Demoiselles avaient pu s'en sortir. Les rares étaient gravement blessées. Le feu avait tout détruit, même la salle cachée. De nombreuses familles vinrent s'y recueillir. Quelques morceaux d'os décoraient le sol noirci, mais les identifier et les relier à un défunt relevait de l'impossible.

          Parmi les morts, des objets précieux furent rassemblés, notamment deux colliers d'or, en forme de sablier dont les chaînes s'étaient emmêlées. Ce petit trésor fit le tour des mains, mais aucun ne les reconnut.

           Le Roi Louis XIV vient peu de temps après, pour observer le ravage du feu et rendre hommage à ses amis disparus. Lui seul put identifier les bijoux, mais n'en laissa rien paraître. Il demanda si quelqu'un les avait réclamés et vu que sa question n'obtint aucune réponse, il les prit et les ramena à Versailles. Là, il les rangea dans le tiroir de sa table de nuit. Il s'empara d'une feuille et la déplia en soupirant.

— Vous auriez dû rentrer et apprendre que je vous libérais de vos missions. Ce papier aurait dû symboliser le commencement de votre nouvelle vie avec votre maison tant désirée. Aujourd'hui, vous avez disparu. Je vous ai perdu. Je vous considérais comme mes filles, murmura-t-il. J'espère que vous avez découvert la paix et le bonheur que vous convoitiez tant, mes chères enfants.

Il déchira l'acte de propriété en le jetant au feu. Il referma le tiroir en léguant à l'obscurité, l'histoire d'Élisabeth et d'Adrianne. Deux espionnes de Louis XIV depuis leurs quinze ans et qui avait trouvé la mort à vingt-deux ans. Deux femmes vivant d'un amour interdit, mais bien plus dévoué à leur liberté.

           Le roi se releva et laissa choir à ses pieds sa cape d'hermine. Il se présenta devant un large miroir accroché au mur d'un rouge satiné. Il enleva sa perruque d'un noir de jais, révélant ainsi un crâne chauve. Dans ses mains, il fit danser son sceptre d'or en lâchant la bride de son imagination pour divaguer à sa guise.

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